Il faut remonter à ses années de joueuse afin de comprendre la genèse de son histoire. Évoluant pour le Collège Marie-de-l’Incarnation et ensuite les Diablos du Cégep de Trois-Rivières, c’est vers la fin de son parcours collégial qu’une discussion est venue changer son parcours de vie.
«Un arbitre d’expérience est venu me voir pour me dire que j’avais le profil pour devenir une officielle. Je pense que j’avais l’oeil et surtout le caractère. Je me suis donc inscrit et je n’ai jamais arrêté depuis ce temps.»
La jeune arbitre de basketball a rapidement gravi les échelons. Dès sa première saison, elle a été d’office pour la finale des Championnats provinciaux. Houle y a pris part pendant plusieurs années avant de faire le saut au niveau universitaire, il y a neuf ans. En 2022, Houle a arbitré ses premiers Championnats nationaux. Elle a réalisé un fait d’armes unique en devenant la première personne à être de la finale dès sa première présence à cette compétition d’envergure. «J’ai vraiment eu un parcours de rêve. On dirait que j’étais tout le temps à la bonne place au bon moment.»
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Une remise en question et un cadeau du ciel
À la suite de cette finale historique, l’officielle de 39 ans a remis en question la suite de sa carrière. «Je pensais vraiment que je ne pouvais pas aller plus haut. C’est énorme d’arbitrer la grande finale des Championnats nationaux dès sa première année. Je me suis assise avec mon mari pour me demander si je poursuivais ou si je prenais ma retraite.»
La vie a facilité sa décision. Lors d’un voyage à Toronto en famille, elle a reçu un appel inespéré. Basketball Canada lui a annoncé qu’elle allait participer à la formation afin d’obtenir sa licence internationale de basketball trois contre trois. À noter que le pays ne peut que former deux personnes tous les quatre ans.
«Je me souviens très bien que j’étais au Temple de la renommée du hockey lorsque mon téléphone a sonné. J’étais vraiment sous le choc. Je ne m’attendais vraiment pas à ça. Ce n’était même pas quelque chose dont je rêvais.»
Sa plus grande surprise a été provoquée par son âge. Les règles stipulent qu’afin d’être admissibles, les officiels doivent être âgés de 40 ans ou moins pour le volet trois contre trois. «Je pensais que j’étais trop vieille puisque l’on m’avait déjà invitée à obtenir cette même licence pour le basketball à cinq contre cinq lorsque j’avais 30 ans et on m’avait dit que j’étais trop vieille. Je m’étais donc dit la même chose pour le trois contre trois, mais non, j’étais tout juste correcte à 39 ans.»
Quelques semaines après le coup de fil, la Trifluvienne était en direction de la République dominicaine pour sa formation. Après un test physique, d’anglais et de nombreuses évolutions sur le terrain, elle est devenue la quatrième Canadienne active, dont la seule Québécoise, à obtenir cette licence internationale. «C’était l’opportunité d’une vie et je l’ai saisie. Je me suis tellement préparée pour cette formation et je suis très fière de moi.»
Depuis sa formation, elle affectionne particulièrement le basketball à trois contre trois qui diffère de celui à cinq contre cinq. «C’est tellement rapide et intense. Tu n’as pas tout le terrain à couvrir, mais tu dois demeurer alerte en tout temps. Les règlements sont aussi différents alors c’est un très beau défi. Ça ne prend pas de temps que tu as la piqûre en regardant cette façon différente de jouer.»
Sa première expérience internationale arrive à grands pas. Du 5 au 12 août, elle sera du côté de Bali, en Indonésie, pour la présentation des Jeux mondiaux de plage. «C’est une grosse compétition. C’est une importante marque de confiance de m’envoyer là-bas pour ma première assignation. Je suis très reconnaissante et excitée. Ça concrétise les efforts que j’ai mis depuis 20 ans.»
À plus long terme, son objectif est les Jeux olympiques de Los Angeles en 2028.
Des défis et des sacrifices supplémentaires
En étant une femme dans un milieu masculin, Houle a dû faire face à des défis importants. Durant son parcours, elle a eu trois enfants. Ne voulant pas perdre sa place dans la hiérarchie, elle a limité ses pauses au maximum.
«J’ai arbitré jusqu’à 38 semaines de grossesse pour reprendre seulement quelques semaines après mon accouchement. J’ai souvent allaité mes enfants durant la mi-temps. Je sentais que si je ne voulais pas perdre ma place, je devais faire ça. Je devais me remettre en forme très rapidement afin de suivre le rythme du jeu. C’était une autre mentalité complètement il y a plusieurs années. Les choses ont évolué pour le mieux depuis ce temps alors que les femmes peuvent reprendre leur place à leur retour.»
Malgré l’évolution des mentalités, le recrutement des femmes demeure un enjeu. «Nous ne sommes que trois femmes encore à ce jour à arbitrer au niveau universitaire québécois. Nous avons encore du chemin à faire. J’espère sincèrement inspirer de jeunes filles à suivre mes traces. C’est une école de vie, le sport, et tu ne sais jamais où elle peut te mener, j’en suis la preuve.»
En ce qui concerne sa position géographique, Trois-Rivières n’est vraiment pas la ville idéale pour le basketball universitaire. Chaque fin de semaine, elle doit prendre la direction de Québec, Montréal ou Sherbrooke afin d’arbitrer. Sa paye s’évapore donc assez rapidement.
«Je suis toujours sur la route. Si je vais arbitrer à Montréal, ce qui prend sept heures dans mon samedi ou dimanche avec la route et le match, je vais faire environ 200 $. Je ne crois pas qu’il y a beaucoup de gens qui feraient tous les sacrifices pour 200 $, sans compter que tu vas probablement te faire crier dessus. C’est vraiment la passion qui me pousse à faire ça.»
Son horaire d’arbitre lui fait également rater de précieux moments familiaux. «Mes deux plus vieux fils jouent au hockey et ils sont très bons. Ils jouent tout le temps la fin de semaine alors je n’ai pratiquement jamais la chance de les voir. C’est tout un sacrifice. Je suis chanceuse d’avoir l’appui de mon mari et de ma famille.»
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Une enseignante dévouée
Malgré son dévouement et sa passion débordante, la mère de famille ne gagne pas sa vie avec le basketball. Son métier principal est celui d’enseignante de première année à l’école de l’Envolée, à Trois-Rivières.
Comme si son horaire n’était pas déjà assez chargé, à sa deuxième année dans l’établissement, elle a décidé de mettre sur pied une équipe de basketball, de cross-country, d’athlétisme et de dek hockey. Elle agit d’ailleurs comme entraîneuse de toutes les formations. «Ce n’était pas nécessairement dans mes tâches, mais je voulais offrir cette opportunité à nos élèves. Il est possible de s’épanouir dans le sport et je pense qu’ils le voient un peu avec moi. Ça peut les faire rêver.»
En grande partie grâce à elle, l’Envolée a remporté le prix d’école primaire ayant le plus contribué au développement des activités physiques et sportives dans son milieu lors du plus récent gala d’excellence du RSEQ Mauricie. «Par le sport, les jeunes développent de bonnes habitudes de vie et plusieurs qualités importantes qui leur serviront pour le reste de leur vie. Pour moi, le sport est aussi important qu’une matière scolaire.»
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