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Peut-on électrifier tous les autobus scolaires d’ici 2040?

Dans le parc canadien d’autobus scolaires qui compte entre 45 000 et 50 000 unités, 82 autobus scolaires électriques se trouvent à l’Île-du-Prince-Édouard, 766 au Québec (en date d’avril dernier), 52 en Colombie-Britannique (en date de janvier 2022) et 20 en Ontario.

CHRONIQUE / Jusqu’où les Canadiens sont-ils prêts à aller pour protéger la santé de leurs enfants, en convertissant le parc d’autobus scolaires? C’est ce à quoi l’étude Pistes de solutions pour l’électrification du parc d’autobus scolaires du Canada a tenté de répondre.


Cette analyse, produite par Dunsky Énergie + Climat pour le compte de l’Alliance canadienne pour l’électrification des autobus scolaires (ACEAS), tente de démontrer quels seraient les efforts à mettre pour arriver à une électrification totale d’ici 2040. Mais aussi les défis qu’il faudrait surmonter pour y arriver.

Selon l’ACEAS, coordonnée par Équiterre et Green Communities Canada, le Canada est clairement en retard dans ce secteur. Même si le gouvernement fédéral a présenté son Plan de réduction des émissions pour 2030. En vertu de ce plan, Ottawa a mis en place un objectif de 35 % des ventes totales de véhicules moyens et lourds, soient des véhicules à zéro émission (VZE), d’ici 2030 et de 100 % pour 2040. Mais ceci englobe tous les types de véhicules moyens et lourds, dont les autobus scolaires.



Ceux-ci, « plus particulièrement, représentent une solution facile pour la transition vers des VML à zéro émission : leurs itinéraires sont prévisibles et souvent relativement courts. Entre les trajets planifiés, ils sont généralement ramenés à une installation centrale où ils peuvent être rechargés, ce qui en fait des candidats idéaux pour l’électrification », résument les auteurs de l’analyse.

Une autre analyse récente de Dunsky Énergie + Climat a révélé qu’un seul autobus scolaire électrique pourrait entraîner des économies de 11 800 $ sur les coûts de soins de santé au cours de sa durée de vie, qui est normalement de 12 ans.

Plus de 2850 autobus électriques par année

Avec un parc d’autobus scolaires du Canada qui est relativement récent, combien de nouveaux autobus devraient être électriques pour atteindre une électrification totale en 2040? Présentement, 45 % des autobus scolaires ont moins de cinq ans, mais 22 % du parc canadien a plus de 10 ans.

Dans la majorité des provinces canadiennes, les autobus scolaires doivent être mis hors service lorsqu’ils atteignent l’âge de 12 ans. Au Québec, cette durée de vie utile peut être étirée à 14 ans, pourvu que le propriétaire attende la livraison d’un autobus électrique.



Dans ce parc qui compte entre 45 000 et 50 000 unités, 82 autobus scolaires électriques se trouvent à l’Île-du-Prince-Édouard, 766 au Québec (en date d’avril dernier), 52 en Colombie-Britannique (en date de janvier 2022) et 20 en Ontario.

Si on veut remplacer la totalité du parc en 2040, il faudrait que plus de 2850 autobus neufs soient électriques chaque année. Ce qui représenterait un taux de mise hors service annuel variant entre 51 et 85 %.

Les auteurs de l’étude ont poussé l’audace d’analyser comment pourrait se dérouler une électrification totale pour 2035. Dans ce cas, il faudrait qu’environ 5600 autobus soient remplacés cette année et l’année prochaine pour rattraper le retard. Ensuite, la cadence serait ralentie.

Toutefois, l’ACEAS souligne que les contraintes de la chaîne d’approvisionnement ont limité la capacité de production au cours des dernières années. Elle estime que les gigawatts-heures (GWh) de batteries nécessaires annuellement pour convertir tous les autobus scolaires d’ici 2040 sont de 0,5 GWh, ou de 0,5 à 0,9 GWh pour atteindre la cible plus précoce de 2035.

Or, la capacité locale en GWh requise pour répondre aux ventes prévues de tous les véhicules électriques en 2025 et 2030 est estimée à 140 GWh et 290 GWh, respectivement. Cependant, la production des autobus scolaires est marginale (plus ou moins 1 %) par rapport à la production totale de véhicules.

Parmi les mesures recommandées par l’ACEAS, on retrouve un soutien financier accru du gouvernement fédéral pour accélérer la transition. « Les résultats de l’analyse montrent qu’en particulier à court terme, la motivation pour effectuer la transition vers les autobus scolaires électriques est faible en l’absence d’un soutien gouvernemental substantiel. » Même si les autobus électriques sont moins coûteux à opérer, il demeure un écart substantiel lors de l’achat du véhicule. Écart qui devrait diminuer avec le temps.



En contrepartie, la faible utilisation quotidienne des autobus et l’arrêt des opérations durant l’été pourraient générer des revenus aux exploitants. En souscrivant à des programmes V2G (pour vehicle to grid ou la « charge bidirectionnelle »), les transporteurs scolaires pourraient profiter du fait que l’énergie stockée dans les batteries soit retournée dans le réseau électrique, au besoin. Selon l’analyse, un autobus électrique doté de la technologie V2G pourrait redonner à son propriétaire annuellement entre 3100 $ et 3300 $ en Ontario, entre 3700 $ et 4000 $ au Québec et entre 1200 $ et 1500 $ au Nouveau-Brunswick.

L’étude complète Pistes de solutions pour l’électrification du parc d’autobus scolaires du Canada peut être téléchargée à bit.ly/42yofJ0