On commence par le commencement? O.K., je veux bien.
Reset²
La semaine de résidence de création pour Véronique Giasson et compagnie a pris fin avec la grande première publique de Reset² devant quelque chose comme 90 spectateurs. La créatrice a tenté de mettre des mots sur son œuvre à chaque entrevue ou rencontre publique cette semaine mais il fallait assister à la représentation pour bien capter le sens de sa démarche.
Il fallait voir les quatre interprètes à l’oeuvre dans la rigueur qu’imposait cette chorégraphie dense et manifestement exigeante. Il fallait voir cet engagement inconditionnel et cette ferveur pour saisir la beauté derrière les concepts. La beauté de certains gestes, de certaines idées de cette pièce étonnante.
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On peut voir dans l’oeuvre une réflexion sur l’individualité, la singularité de chacun qui a pourtant besoin des autres pour trouver son sens. Une réflexion sur l’entraide qui n’est pas abdication de soi mais un enrichissement. Comme l’épuisement qui n’est pas qu’un affaiblissement de l’être mais un révélateur de la nature profonde de l’humain.
À travers une chorégraphie très touffue, les quatre interprètes Kennedy Henry, Merryn Kitzinger Charles Cardin-Bourbeau et Danny De Matos ont payé de leurs forces leur besoin de communiquer avec les spectateurs. Sur une musique troublante et d’une redoutable efficacité qu’on doit à Philippe Barrios, ils ont tranché dans tous les sens l’espace de la scène de la salle Anaïs-Allard-Rousseau avec une conviction communicative. Ils ont surexploité leurs forces au point où on se demandait s’ils arriveraient à soutenir certaines poses musculairement audacieuses, faisant ainsi de la fatigue même un élément dynamique dans la chorégraphie. Franchement intéressant.
Finalement, Reset² s’est imposé comme un spectacle d’une fascinante, singulière et touchante beauté bien au-delà des considérations techniques. Une autre preuve qu’un spectacle de danse contemporaine, au moins un, est essentiel dans la programmation du Festival international DansEncore.
Le Gala
Cela nous mène au gala, événement identitaire du festival. Pour en avoir vu quelques-uns, je ne me souviens pas qu’un seul m’ait déçu. Pourtant, plus j’en vois, plus hautes sont mes attentes. Celui de la 29e édition a trouvé le moyen de monter la barre d’une coche supplémentaire.
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La soirée s’est ouverte sur un numéro choral très joliment chorégraphié par Alex Francoeur pour les représentants de la relève de la danse au Québec. Un vilain pépin technique avec la présentation vidéo du numéro a rapidement été gommé par le travail inspiré des jeunes sur Avec des fleurs de Daniel Bélanger. Un très judicieux mariage pour mettre en valeur la candide foi de ces jeunes mais fervents interprètes.
Ils ont été suivis par trois danseurs du Teatro San Carlo de Naples, présent pour la toute première fois à Trois-Rivières. Ils nous ont offert quelques minutes de pure splendeur. Une poésie physique et visuelle renversante par des interprètes d’exception qui transcendent complètement les exigences physiques de leur travail pour offrir de la grâce, pure et simple.
On se demandait comment les deux codirectrices artistiques Maria Juliana Vélez et Mireille Baril allaient réussir à marier la poésie et le spectaculaire qui constituaient les deux pôles de ce gala. Sans minimiser leur mérite, avec des numéros de ce calibre, elles pouvaient difficilement rater leur coup.
Côté émotion, j’avoue avoir été moins touché par le numéro, pourtant très prometteur, d’Alex et Alex en compagnie d’Elliott Maginot au piano et Camille Paquette Roy au violoncelle.
L’émotion est plus efficace quand elle surprend et à ce titre, Pokemon Crew a fait fort en emballant les insolentes acrobaties de leurs prodiges de la voltige dans un concept de fable apocalyptique. Il y avait à leurs envolées un côté grave et pesant inattendu mais fort intéressant.
Comme pour Accrorap et son hip-hop contemporain lourd de symboles et pourtant envoûtant grâce notamment à une mise en scène et des effets visuels brillants ainsi qu’à un dynamisme apparemment inextinguible. Du hip-hop contemporain poétique, ça existe et c’est bon.
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Pas beaucoup de traces de poésie dans le ballroom de Denys et Antonina que le public a acclamé pour leur cha-cha et leur jive décomplexés et diablement toniques. Oubliez la danse sociale de vos parents, celle d’aujourd’hui est passée à une vitesse supérieure et audacieuse.
Les galas de DansEncore, c’est évidemment quelques numéros endiablés qui font hurler de plaisir. Celui de DM Nation a été orgiaque. Visuellement, déjà, c’était un feu d’artifice délirant: effets visuels dans les chorégraphies, éclairages hyper clinquants pour mettre le feu à des costumes guère plus modestes le tout dans une énergie tonitruante. C’était absolument excessif et totalement emballant.
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Comme le veut la plus vieille règle du métier, il faut finir un spectacle en force et on n’aurait difficilement pu trouver mieux pour cela que RB Dance Company. Les Parisiens ont conçu un numéro exprès pour DansEncore et on devrait chanter leurs louanges jusqu’à la fin de leurs jours pour ce cadeau inestimable. Look Back sur une chanson du metteur en scène et chorégraphe Romain Rachline Borgeaud est une pièce d’anthologie. Cette danse gavée de rage qui sort des tripes pour être absorbée par les spectateurs au même endroit est profondément exaltante. Il se dégage de ce numéro offert dans un noir et blanc furieux une énergie extraordinairement cathartique. C’est brut, féroce, viscéral: une finale en poing d’exclamation. On en sort groggy... et comblé.
Dommage que la représentation de samedi soir affiche complet. Quelqu’un a-t-il songé à agrandir la salle Thompson?