Près de 25 ans plus tard, voilà que leur fils Nicholas Trottier-Lacourse a repris le flambeau, avec l’aide de trois partenaires, pour transformer l’établissement touristique de Saint-Mathieu-du-Parc en un restaurant de type gastronomique.
« C’est un bel exemple de repreneuriat à la fois familial et externe », soulignait fièrement le président-directeur général du Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec (RJCCQ), Pierre Graff, lors de sa récente tournée d’entreprises de la relève.
D’ailleurs, celui-ci dit observer au Québec un phénomène de reprise collective qui, souvent, prend une telle forme hybride.
« Avant, le repreneuriat était strictement familial, donc, soit ça passait ou ça cassait, sinon, il y avait des repreneurs externes. Maintenant, les gens vont avoir l’humilité de dire qu’ils ne sont pas à l’aise de reprendre tout seul et d’aller chercher des profils complémentaires pour réduire la pression psychologique, financière ou stratégique qui vient avec le milieu des affaires », explique-t-il.
Ce fut le cas du directeur de l’Auberge, Nicholas Trottier-Lacourse, qui a concocté le projet de reprise avec un chef réputé, Samy Benabed, arrivé dans le décor à l’été 2020.
Un ami d’enfance s’est ensuite ajouté comme actionnaire, Étienne Prud’homme, pour assumer aujourd’hui le rôle de maître d’hôtel, de même qu’un ancien client, Florent Borrel, qui gère dorénavant le Comptoir, situé à côté.
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« Il est allé chercher des gens qui pouvaient apporter beaucoup par rapport à son profil, chacun ayant sa spécialité. Et ils partagent une vision commune, soit celle d’avoir l’audace de développer non seulement une auberge, mais qui va être une destination gastronomique », fait remarquer le pdg du RJCCQ.
« Et c’est aussi un des messages qu’on veut passer, c’est que pour être viable à long terme, la reprise doit avoir un facteur X, doit avoir quelque chose qui fait qu’on va se démarquer. Et eux ont eu l’audace de partir une auberge gastronomique en région », renchérit-il.
Le processus de transfert se sera étalé sur trois ans. « La COVID nous a presque aidé pour la transition, nous laissant le temps de nous établir », raconte le fils des fondateurs.
Et même si le modèle coopératif avait été envisagé au départ, les partenaires en ont décidé autrement tout en conservant, disent-ils, « l’esprit de coop » dans la façon de traiter la quinzaine d’employés et de répartir les tâches.
« En reprenant en janvier dernier, on était déjà sur une bonne pente montante. On n’a pas les difficultés des entreprises qui démarrent », avoue M. Trottier-Lacourse.
Et celui-ci se plaît à dire que si auparavant, « le restaurant était un service pour les chambres, on est de plus en plus un restaurant avec des chambres ».
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Or, pour Pierre Graff, le cas de l’Auberge Saint-Mathieu est d’autant plus inspirant qu’au Québec, en ce moment, « on a un enjeu qui est la baisse des intentions de se lancer en affaires ».
« Le repreneuriat est important parce que dans les dix prochaines années, 70 % des business au Québec vont être à reprendre. Clairement, il y a un enjeu parce qu’on a un manque de relève. Il y a beaucoup de cédants et 50 % d’entre eux ont plus que 55 ans. Malheureusement, souvent, ils ont peur de dévoiler qu’ils veulent céder parce qu’ils ont peur de perdre leurs clients, leurs fournisseurs, leur staff », souligne-t-il.
Pour son regroupement, « c’est important de montrer non seulement toutes les facettes du repreneuriat, car il n’y en a pas qu’une seule, mais également de démontrer le rôle que veulent jouer les jeunes chambres de commerce par rapport au repreneuriat ».
« Les 43 jeunes chambres de commerce que j’ai la chance de représenter au Québec offrent un réseau, de l’accompagnement, mais aussi du rayonnement », plaide M. Graff.
En ce sens, la présidente de la Jeune Chambre de la Mauricie, Célia de Montigny, n’est pas peu fière des deux prix remportés par l’Auberge Saint-Mathieu lors du Gala Edis 2023. Si l’établissement a reçu le prix coup de coeur-révélation de l’année, son chef Samy Benabed a décroché le titre de personnalité d’affaires masculine.
« Ce fut une décision unanime et facile pour les membres du jury, qui se démarquent au niveau de l’entrepreneuriat en région. C’est vraiment une soirée qui est reconnue année après année pour donner de la visibilité », fait-elle valoir.
Pour le grand patron du Regroupement provincial, « ce genre de structure qui va vous donner une tape dans le dos est un grand plus pour la communauté d’affaires ».
« Je trouve ça tellement important le rôle des jeunes chambres de commerce là-dedans. Et le rayonnement, c’est redonner à ceux qui créent de la richesse », conclut M. Graff.