« Ça va prendre des clarifications parce que sinon, ça veut dire qu’on peut se détruire les uns, les autres, et qu’il n’y a rien de criminel là-dedans », remarque Claudie Paul, une Innue qui a vu son terrain détruit par des membres de la nation huronne-wendat en juin 2022. Cette dernière a fait une plainte pour lancer une poursuite criminelle, mais le DPCP l’a informée qu’une telle avenue n’était pas possible, lors d’une discussion téléphonique.
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Me Patricia Johnson, procureure aux poursuites criminelles et pénales, porte-parole adjointe au bureau du DPCP a confirmé au Quotidien « qu’aucune accusation ne sera portée relativement à cet événement, n’ayant pas la conviction d’une perspective raisonnable de condamnation eu égard à la preuve recueillie et des principes juridiques applicables en droit criminel. Rappelons qu’avant d’entreprendre une poursuite, le procureur doit être convaincu, sur le fondement de son analyse objective de l’ensemble de la preuve, d’une perspective raisonnable de condamnation. »
Selon les informations que le DPCP a fournies à Claudie Paul, la jurisprudence reconnaît une croyance sincère de droits aux deux nations sur le territoire, sans toutefois préciser de quels droits il s’agit. Devant ce vide juridique, aucune poursuite criminelle ne peut être lancée, alors que les deux nations octroient des permis d’occupation permanente du territoire à ses membres.
À l’heure actuelle, il y aurait plus de 200 campements et chalets construits par les Hurons-Wendat et les Innus dans la Réserve faunique des Laurentides.
« Mon certificat d’occupation [octroyé par le conseil de bande de Mashteuiatsh] me donne une apparence de droit, mais qui n’est pas plus reconnu que celui des Wendats », explique Claudie Paul. Autrement dit, une action criminelle ne peut être entamée, car les titres ancestraux ne sont pas assez clairs.
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Claudie Paul, qui a poursuivi la construction de son chalet après le saccage, s’inquiète pour l’avenir. Elle n’a aucune protection contre de futurs bris. La barrière à l’entrée de son terrain a été arrachée, il y a quelques semaines, et cette dernière craint de subir d’autres saccages à tout moment.
De plus, il semble qu’un Huron-wendat soit en train de se construire un chalet à moins d’un kilomètre du sien, ce qui inquiète aussi Claudie Paul. « Je demande à mon conseil de définir des règles d’établissement des camps sur le territoire avec les Hurons-Wendat », dit-elle, afin d’éviter une trop grande proximité et l’émergence de conflits, notamment pendant la chasse qui vient de commencer pour les Premières Nations.
« Personne ne veut se mêler de ce conflit entre Autochtones, mais à un moment donné, il va falloir que quelqu’un tranche », déplore Claudie Paul.
Le ministre responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuit, Ian Lafrenière, admet que le problème entre les deux nations autochtones est complexe. « J’ai offert un médiateur, mais l’offre a été refusée jusqu’à maintenant », dit-il, ajoutant que les négociations se poursuivent entre les deux peuples.
« Ils doivent trouver une solution ensemble ».
Selon ce dernier, la signature de traités permettra d’éclaircir la situation et d’offrir plus de stabilité.
L’origine du conflit
En juin 2022, le Conseil de la Nation huronne-wendat avait assumé les actions prises pour détruire toute nouvelle installation non autorisée sur le territoire qu’elle juge exclusif. Ce territoire est toutefois revendiqué également par Mashteuiatsh, Essipit et Pessamit, comme un territoire commun aux trois communautés innues.
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À la suite de ces événements, le conseil de bande de Mashteuiatsh (Pekuakamiulnuatsh Takuhikan) a pris en charge les recours légaux du volet civil, en lançant un recours judiciaire contre Wendake, exigeant un remboursement des frais de 90 000 dollars. En attendant la décision de la cour, Mashteuiatsh a indemnisé les trois familles ayant subi des bris. Claudie Paul a pour sa part reçu 42 000 dollars, alors que les dommages étaient estimés à 60 000 dollars.
« La réclamation en dommages déposée devant la Cour supérieure du Québec suit son cours et fait l’objet d’une gestion particulière par le tribunal, explique Mélodie S. Lapointe, la conseillère en communication pour Pekuakamiulnuatsh Takuhikan. Une audition se déroulera d’ailleurs le 2 octobre prochain pour entendre certains moyens préliminaires présentés par la Nation huronne-wendat », a-t-elle ajouté.
Pour l’instant, Pekuakamiulnuatsh Takuhikan n’a pas voulu réagir sur la décision du DPCP, car le conseil de bande analyse cette décision.
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