Un manquement à l’entretien des freins cause le décès d’un travailleur

La CNESST a publié son rapport concernant un décès survenu sur la route forestière 25.

Des manquements dans la gestion de l’entretien des véhicules sont à l’origine du décès d’un conducteur de semi-remorque le 18 avril 2022, au kilomètre 125 de la route forestière 25, au nord de La Tuque.


C’est ce qui ressort du rapport de la CNESST publié jeudi. La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail a interdit à l’employeur, Les sables et terres Mont-Carmel, l’utilisation des équipements en cause lors de l’accident. Elle rappelle que pour éviter de tels accidents, «les employeurs doivent mettre à la disposition de leurs travailleurs et travailleuses des véhicules et des équipements sécuritaires et en bon état».

Le manque d’entretien a en effet «entraîné une diminution de l’efficacité du système de freinage de la semi-remorque», indique le rapport. Le camion est un modèle Mack de l’année 2012. La semi-remorque, au moment de l’accident, était également en surcharge de 570 kilos. Selon le billet de pesée du jour de l’accident, la semi-remorque était chargée de 26 320 kilos de pierres de gros calibre.



Selon le rapport de la CNESST, «le jour de l’accident, le conducteur, qui possède un permis de conduire de classe 1 valide, devait livrer une cargaison de pierres.» Son expérience dans cette fonction de même que son ancienneté chez l’employeur sont toutefois des éléments demeurés inconnus de l’enquête.

Le camionneur a quitté Notre-Dame-du-Mont-Carmel au volant d’un camion attelé d’une semi-remorque, s’est arrêté à La Tuque pour y récupérer son chargement et, finalement, a pris la route en direction de Parent. Au kilomètre 103, la route se divise en deux. Le conducteur a alors entrepris un virage vers l’embranchement de gauche afin de s’engager sur le pont qui traverse la rivière Manouane. Cependant, il n’a pas été en mesure de terminer son virage, car le camion a défoncé une structure de bois qui se trouvait à la droite du pont et est ainsi tombé dans la rivière. Les secours ont été appelés, et le décès du conducteur a été constaté sur place.» Le conducteur est décédé des suites de ses blessures, le camion ayant plongé tête première sur les rives du cours d’eau.

«En tentant un virage afin d’emprunter le pont de la rivière Manouane, le travailleur, qui conduisait un camion semi-remorque, a perdu la maîtrise de celui-ci et a terminé sa course dans la rivière», ajoute le rapport.

La CNESST indique que pour éviter de tels drames, l’employeur doit notamment «se doter d’un programme d’entretien régulier; tenir un dossier ou des fiches d’entretien pour tous ses véhicules; prendre les mesures nécessaires pour que les travaux mécaniques soient effectués lorsque des problèmes sont soulevés.»



«Par la loi, l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique de ses travailleurs», souligne également la Commission.

«Contrairement à d’autres juridictions, le Québec n’impose aucune forme de certification ou de vérification des compétences relativement à l’ajustement des freins.»

—  rapport de la CNESST

«Il a également l’obligation de s’assurer que l’organisation du travail ainsi que les équipements, les méthodes et les techniques pour l’accomplir sont sécuritaires. Les travailleurs et travailleuses doivent faire équipe avec l’employeur pour repérer les dangers et mettre en place les moyens pour les éliminer ou les contrôler.»

La CNESST transmettra les conclusions de son enquête à la SAAQ, au Comité paritaire de prévention du secteur forestier, à l’Association du camionnage du Québec, à l’Association des routiers professionnels du Québec et au Regroupement des entrepreneurs et camionneurs indépendants du Québec afin qu’ils sensibilisent leurs membres.

Le rapport d’enquête sera également diffusé dans les établissements de formation offrant le programme d’études en transport par camion pour sensibiliser les futurs travailleurs.

Toujours selon le rapport de la CNESST, l’entreprise Les sables et terres Mont-Carmel, qui se spécialise dans le transport de matières en vrac, ne possède aucun mécanisme de participation des travailleurs. Ces derniers ne sont pas syndiqués non plus et leur nombre varie selon les besoins de l’employeur.

La dernière vérification de la semi-remorque datait du 20 janvier 2022. «L’inspection annuelle du camion, quant à elle, n’a pas eu lieu», indique le rapport. Elle était prévue le 22 avril.



La CNESST souligne que «contrairement à d’autres juridictions, le Québec n’impose aucune forme de certification ou de vérification des compétences relativement à l’ajustement des freins, qu’ils soient manuels ou automatiques. Dans de telles circonstances, il existe une possibilité que l’employeur puisse confier cette responsabilité à une personne sans en connaître ses aptitudes réelles, voire même d’être en mesure de les évaluer. La personne à qui cette tâche est confiée peut croire de bonne foi, à défaut d’avoir subi une évaluation de ses capacités, qu’elle a les connaissances requises pour effectuer ces vérifications et entretiens. L’insuffisance du contrôle des qualifications des personnes chargées de l’ajustement des freins pneumatiques peut entraîner un dysfonctionnement menant à une défaillance de ceux-ci», indique la CNESST.

Dans le cas précis de l’accident sur la route forestière, la CNESST constate une déficience de l’entretien des véhicules de la compagnie Les sables et terres Mont-Carmel. «Cette gestion déficiente a fait en sorte que les quatre freins de la remorque étaient mal ajustés lors de l’événement, ce qui a entraîné une diminution de l’efficacité du freinage contribuant ainsi à la survenance de l’accident», conclut la Commission.