«On a analysé toutes les composantes du PIB potentiel, explique le premier directeur, modélisation et prévisions économiques de la Banque Scotia, René Lalonde. On a projeté ça dans le futur et on a conclu que, selon les politiques actuelles, la moitié de l’écart serait comblé uniquement en 2035.»
C’est loin de l’objectif du gouvernement Legault qui veut avoir comblé l’écart d’ici 2036, même s’il s’approche de son objectif d’abaisser l’écart à 10 % en 2026.
En 2018, l’écart de richesse entre l’Ontario et le Québec était de 16,4 %, mesuré avec le PIB réel par habitant. L’écart est maintenant de 12,8 %, selon la mise à jour budgétaire du gouvernement publiée l’automne dernier.
Il faudra déployer de nouvelles politiques «énergiques» pour accélérer le rattrapage économique du Québec, croit M. Lalonde. Ces politiques devraient se concentrer sur la stimulation des investissements des entreprises et sur l’adoption de mesures pour inciter les Québécois à demeurer plus longtemps, ou retourner, sur le marché du travail.
Le Québec est désavantagé par rapport à l’Ontario quand on tient compte des tendances pour le pourcentage de personnes qui participent au marché du travail en raison du vieillissement plus important de sa population, constate M. Lalonde.
L’Ontario accueille plus d’immigrants que le Québec, ce qui ralentit le vieillissement de sa population. L’équipe d’économistes ne s’est toutefois pas prononcée sur les seuils d’immigration du gouvernement Legault. Des associations dans le milieu des affaires suggèrent, pour leur part, qu’on remonte les cibles pour atténuer la rareté de la main-d’?uvre.
Sur l’angle du PIB par habitant, M. Lalonde considère que l’effet des cibles d’immigration est neutre. «C’est certain qu’augmenter les cibles d’immigration augmenterait la croissance du PIB potentiel, mais ça augmenterait aussi la population. Donc, l’effet sur le ratio du PIB par habitant n’est pas évident. Ça pourrait aller dans une direction ou dans l’autre.»
Plusieurs outils sont à la disposition du gouvernement pour stimuler les investissements des entreprises. M. Lalonde croit que Québec devrait favoriser les interventions ciblées plutôt qu’une baisse généralisée du taux d’imposition des entreprises, «car les entreprises peuvent utiliser les économies d’impôt à d’autres fins que les investissements».
Des progrès en Ontario
L’autre élément à prendre à compte est que l’Ontario ne demeure pas immobile pendant que le Québec tente son rattrapage. La province pourrait adopter, elle aussi, des politiques afin de stimuler son PIB potentiel.
Le Québec a connu une croissance plus rapide de son PIB potentiel en raison de la pandémie, selon les estimations des économistes de la Banque Scotia. La pandémie et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement ont plombé l’industrie automobile, un secteur économique important en Ontario.
«Dans les derniers trimestres, la croissance du PIB potentiel du Québec était légèrement supérieure à l’Ontario, selon nos analyses, mais c’était un effet grandement temporaire dû aux contraintes de lignes de productions et d’approvisionnement dans le secteur de l’automobile.»
L’élimination graduelle de ces contraintes devrait donner un élan à l’économie ontarienne. «On s’attend à une remontée du PIB potentiel de l’Ontario au-delà de celui du Québec, dit M. Lalonde. On parle même d’un écart de 0,4 point de pourcentage, soit 1,6 % (pour le Québec) versus 2 % (pour l’Ontario).»
«Ça a un effet important dans l’analyse, ajoute-t-il. Ça fait que, oui, les politiques actuelles ne sont pas suffisantes pour combler l’écart.»