Projet de loi 12: sommes-nous en train de créer une injustice pour corriger une aberration?

Carrefour des lecteurs / Les intentions du projet de loi 12, soit rompre le lien de paternité d’un agresseur sexuel avec l’enfant issu de cette agression, sont nobles. En effet, il est aberrant qu’un violeur puisse revendiquer les mêmes droits qu’un père légitime. Le gouvernement évalue qu’environ 170 enfants naissent d’un viol chaque année au Québec. Même si tous les violeurs ne réclament pas la paternité, ce nombre demeure élevé. Néanmoins, ce nombre représente quand même une infime proportion des naissances annuelles totales.


En revanche, la proportion des couples qui se séparent après la naissance des enfants est significative et avoisine même les 50%. Bien que la plupart des couples composent bien avec la garde partagée, une fraction des couples entretiennent une querelle éternelle. Dans certains cas, le conflit prend même une tournure acrimonieuse. Le cas échéant, il peut alors devenir tentant pour une femme à la moralité élastique d’invoquer rétroactivement un viol pour se débarrasser du père.

Le système de justice criminelle n’est pas parfait mais un jugement de culpabilité requiert l’absence de doute raisonnable. C’est là que le bât blesse: le nouveau projet de loi ne requiert pas une condamnation au criminel pour dépouiller un homme de ses droits parentaux. Sa culpabilité est jugée au civil selon un critère beaucoup moins rigoureux: la prépondérance de la preuve.

De plus, quelle est la définition d’un viol au sens civil? La question est pertinente car la définition du viol s’est passablement élargie au cours des dernières années. Une femme peut-elle invoquer un viol sous prétexte que sa libido n’était pas au rendez-vous cette journée-là? Le cas échéant, la plupart des hommes dans la vingtaine seraient des violeurs car dans cette tranche d’âge, la libido masculine est souvent plus forte que la féminine. Une femme peut-elle invoquer un viol sous prétexte qu’elle n’a pas expressément consenti à l’acte conjugal? Le cas échéant, la grande majorité des hommes matures seraient des violeurs car les couples de longue date ne se formalisent pas d’un tel consentement oral ou écrit. Une femme peut-elle invoquer un viol sous prétexte que son consentement n’était pas admissible à cause de son état d’ébriété? Mais alors… Est-ce qu’un homme pourrait lui aussi invoquer son état d’ébriété pour prouver son non-consentement? Et que dire de ces femmes qui simulent prendre la pilule? Pourraient-elles perdre elles-aussi leurs droits parentaux?

Bref, sans définition claire de ce qu’est un viol, ce projet de loi ouvre la porte toute grande à l’abus. À quoi bon rendre justice à une centaine de femmes par année, si des milliers d’hommes pourront désormais se voir privés injustement de leurs droits parentaux? Et que dire de ces pauvres enfants qui se verront privés de leur père?

Le ministre Jolin-Barrette est-il en train de créer une injustice pour corriger une aberration?

Romain Gagnon Montréal

Andréa Richard Trois-Rivières