Chronique|

L’éternelle question... pourquoi?

La garderie de Sainte-Rose où a eu lieu la tragédie mercredi matin.

CHRONIQUE / Des scènes comme celle survenue mercredi matin à la Garderie éducative Sainte-Rose de Laval, alors qu’un homme a foncé directement à l’endroit où se trouvaient des dizaines d’enfants, on ne peut accepter ça.


Il n’y a pas si longtemps, des scènes comme celle-là, on regardait ça avec un œil détaché, à la télé, provenant d’un État américain quelconque et on se disait que ça n’arriverait pas chez nous.

On entendait des phrases comme: «Ça arrive juste aux États-Unis».

Mais les temps ont changé. La distance s’est rapprochée.

Cette violence est maintenant la nôtre, même si elle nous lève le coeur. Cette violence qui s’exprime de plus en plus souvent dans ce monde qui hurle de douleur.

J’ai déjà écrit sur la violence masculine. Celle qui détruit des vies.

Parce qu’à chaque fois qu’un drame se produit et qu’on assiste à un geste violent commis par un homme, la même question revient sans cesse.

Est-ce que la masculinité toxique existe?

Oui. Elle existe. Mais la féminité toxique aussi existe. Elle ne n’exprime pas de la même façon, mais elle est là, pas très loin.

Je ne suis pas de celles qui diront que chaque homme porte en lui une violence qui peut exploser à tout moment.

Parce que les exemples autour de moi ne vont pas dans ce sens-là. J’ai autour de moi des hommes bons et aimants. Mais je sais que certains portent en eux une colère indescriptible.

La question que tout le monde se pose maintenant. Comment un homme sans histoire, qui n’a aucun lien avec la garderie en question, peut-il accélérer et ne s’arrêter qu’après un choc terrible?

À partir de quel moment le cerveau déconnecte à ce point-là? C’est impossible pour nous de comprendre. Et pourtant, on cherche à le faire. Il faut absolument qu’il y ait une explication rationnelle.

À chaque drame, on cherche des réponses. À chaque fusillade, on tente une explication. Tout le monde y va de son analyse. C’est humain, je le sais.

Et toutes les explications sont lancées. «C’est la faute de la pandémie, c’est le manque de ressources ou de l’inflation.»

Ou on tente de retourner dans le passé des individus. «Il a été abusé quand il était jeune, il a été battu. Il n’a pas été aimé par ses parents. Il avait un mauvais entourage.»

Le danger nous guette lorsque l’on tente de suranalyser.

Dans le cas de Pierre Ny St-Amand, on essaie de trouver ce qui ne va pas.

Il n’avait pas de lien avec la garderie en question. Il a une femme et des enfants. Il n’était pas connu des milieux policiers. On cherche l’histoire qui pourrait expliquer un tel geste, mais on ne le trouve pas.

J’ai bien aimé les propos du Dr Mathieu Dufour, chef du département de psychiatrie à l’Institut Philippe-Pinel, mercredi quelques heures après le drame de Sainte-Rose.

Il a dit ceci: «Il faut toujours faire attention de ne pas immédiatement penser, quand il y a un crime sévère, comme celui qui vient de se passer, que c’est dû à quelqu’un qui souffre d’une maladie psychiatrique. Ça peut évidemment être le cas, mais il y a aussi d’autres personnes qui peuvent commettre des crimes, comme des gens qui ont de la difficulté à gérer leurs émotions, des troubles de personnalité ou des problèmes de toxicomanie.»

L’erreur que l’on commet tous est de vouloir obtenir un diagnostic rapide pour expliquer l’inexplicable.

Mais un problème de santé mentale, ça ne s’évalue pas à distance.

Et comme le disait la psychiatre Marie-Ève Cotton, «la haine n’est pas une maladie mentale».

Elle a bien raison. Et ce qui est triste, comme le mentionne la psychiatre, c’est seulement lorsque des drames comme celui de mercredi surviennent qu’on s’intéresse à nouveau à la santé mentale.

Au quotidien, ça ne nous intéresse pas plus qu’il faut. À moins d’être touché de près, soit personnellement ou via un proche. Là, on comprend mieux.

Chercher à comprendre la détresse n’est pas une simple affaire. Et les mêmes questions reviendront encore une fois lors d’événements tragiques.

En attendant, essayons de prendre soin de notre monde. Essayons d’être davantage dans la bienveillance que dans l’adversité. Dans nos relations au quotidien et sur les réseaux sociaux, essayons d’avoir une pensée pour ceux et celles qui souffrent. Parfois en silence.

Depuis mercredi, la souffrance est multiple.

Des parents qui ne se remettront jamais de cette journée.

Des éducatrices qui resteront à jamais marquées par cet événement tragique.

Comme communauté, nous pouvons être solidaires, malgré notre sentiment d’impuissance parfois.

Je l’ai déjà écrit dans une chronique précédente. Prenons soin les uns des autres. Il est plus que temps.

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Journaliste de formation et animatrice depuis huit ans, Catherine Gaudreault aime échanger et questionner les personnalités qui font l’actualité. Originaire du Saguenay–Lac-Saint-Jean, elle a choisi la Mauricie il y a dix ans. Elle a été à la barre de deux émissions d’actualité, dont une avec le Dr Pierre Mailloux dans les dernières années. Rigoureuse, travaillante et dynamique, elle anime maintenant Catherine le midi et La Mauricie maintenant au 106,9 Mauricie.