Pour que l’hébergement soit envisageable, il faut d’abord s’assurer que la chambre réservée est accessible, et ce, à partir du stationnement. En effet, garer la voiture pas trop loin, surtout l’hiver, est un détail non négligeable. Circuler sur les trottoirs mal déneigés et glacés est un supplice que toutes personnes en situation de handicap souhaitent éviter.
L’idéal est d’avoir accès à un stationnement intérieur. Le bonheur! Avoir les roues de son fauteuil roulant bien au sec et laisser son manteau dans la voiture est un plus. Ça fait un volume de moins à traîner et pas de traces de gadoue sur le beau plancher du hall d’entrée.
Peut-être l’avez-vous remarqué, mais les comptoirs d’accueil dans la majorité des hôtels sont beaucoup trop hauts pour qu’une personne assise ou de petite taille puisse s’y sentir invité. Parfois, un bout de comptoir est prévu à cette fin. Sinon, l’accompagnateur est de mise pour échanger une carte de crédit contre les cartes-clefs.
Si l’on roule en fauteuil électrique, recharger la batterie la veille est une bonne précaution. Les corridors des hôtels sont souvent très vastes, mais tellement agréables à sillonner par le fait même.
En apercevant l’écriture braille sur chaque petite plaquette indiquant le numéro des chambres, j’ai toujours une pensée pour les non-voyants. Si personne n’est là pour les accompagner, se rendre à sa porte doit être toute une péripétie tactile!
Arrivé à la chambre, on peut immédiatement remarquer si elle est bel et bien adaptée pour un fauteuil roulant. Un seuil surélevé n’indique rien de bon. Généralement, cet obstacle au bas de l’ouverture de la porte est absent même pour les chambres dites régulières. C’est surtout une fois à l’intérieur que je m’assure de l’accessibilité à la salle de bain.
Depuis l’âge de 34 ans, je vis avec un handicap hors norme. En effet, il est plutôt rare que quatre amputations se retrouvent sur un seul et même corps. Cette condition particulière élimine toutes mes chances de tomber sur une chambre entièrement adaptée à mes besoins. Il y a toujours un robinet trop loin pour que mes moignons l’atteignent ou il n’y a pas assez d’espace devant la toilette pour que je puisse y faire mon transfert.
Habituellement, les personnes en fauteuil roulant stationnent leur bolide à côté de la cuvette. Elles lèvent l’accoudoir et se glissent sur le siège. Dans mon cas, quand mes prothèses de jambes sont remisées, je préfère m’installer face à la toilette. Je n’ai qu’à me retourner sur mon fauteuil et reculer sur le siège. De cette façon, je n’ai nullement besoin de m’acharner à lever l’accoudoir. C’est une opération complexe à effectuer avec des prothèses de mains comme avec des moignons. Les loquets situés dans un espace trop étroit pour mes options doivent être débloqués pour que le bras du fauteuil se soulève.
Une fois en place, je ne suis pas au bout de mes peines. À la maison, j’utilise un bidet installé à même le siège pour «m’essuyer». À l’hôtel – ou n’importe où ailleurs –, c’est de l’aide de mon amoureux dont j’ai besoin.
Après avoir fait le tour de la chambre et parfois, d’avoir bougé quelques meubles pour mieux circuler, je suis prête à m’installer. Mon premier réflexe est de retirer mes quatre prothèses. Comme chez moi après une grosse journée, j’aime me changer «en mou» lorsque je n’ai pas besoin de ressortir. Ensuite, j’ouvre la valise. Comme nos escapades pour le travail nous amènent à réserver que pour une nuitée, j’essaie le plus possible de ne sortir que les essentiels.
Au gré des besoins du moment, j’avoue que je m’éparpille un peu. Puis, après m’être familiarisée avec la configuration des lieux, je finis par trouver mes marques. Un petit ménage s’impose alors. D’abord, j’établis le meilleur endroit pour disposer mes prothèses et mes manchons. Mes vêtements sont prêts pour le lendemain et ma brosse à dents est à peu près la seule chose que je place dans la salle de bain.
Je choisis aussi le côté du lit en fonction de la facilité de déplacement en pleine nuit. Comme le chauffage est particulier et le plancher recouvert de tapis, l’air très sec peut être une source d’inconfort. Les bouteilles d’eau bien remplies trouvent donc leur place sur les tables de chevet.
Juste avant de fermer les lumières, on s’assure que tout est prêt pour un lendemain efficace. Il ne reste qu’à chercher le sommeil qui ne tarde jamais à me faire tomber dans les bras de Morphée.
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Artiste peintre, conférencière, auteure… et quadruple amputée, Marie-Sol St-Onge partage sa façon de voir les choses qui l’entourent. Un angle de vue différent, mais toujours teinté d’humour et de positivisme.