Chronique|

Noël du Pauvre: la tradition de générosité au temps de l’inflation [VIDÉO]

L’animatrice du Téléthon Le Noël du Pauvre, Sophie Bernier, sera à la barre de ce grand rendez-vous de la générosité, ce soir dès 17h sur les ondes de Ici Radio-Canada Mauricie et Centre-du-Québec.

CHRONIQUE / Le sous-sol du Centre d’action bénévole de Nicolet a été transformé en petit bureau, l’espace de quelques jours. À cet endroit, on accueille les gens qui n’ont d’autre choix que de demander de l’aide au Noël du Pauvre afin d’arriver à combler les besoins de base en cette fin d’année. Par la porte, deux personnes entrent l’une après l’autre. Elles ne se connaissent pas. Mais elles ont toutes les deux un point en commun: c’est la toute première fois qu’elles osent demander de l’aide. Parce qu’elles n’ont plus le choix.


Ce qui se lit dans les visages de ceux qui traversent cette porte pour une première fois, remarque la directrice générale Isabelle Bombardier, c’est de la honte. La honte d’en être rendu là, de ne plus pouvoir joindre les deux bouts. Malgré qu’on ait un emploi, malgré qu’on se croyait pour toujours à l’abri. «Et pourtant, il n’y a tellement pas de honte à demander de l’aide», confie Mme Bombardier.

C’est pour aider toutes ces personnes vivant avec la pauvreté que la région aura une nouvelle fois rendez-vous avec la générosité vendredi soir à l’occasion du 64e Téléthon du Noël du Pauvre. Cette tradition toute mauricienne a pris un nouveau visage ces derniers temps avec les défis qu’impose l’inflation à de plus en plus de gens dans notre société. S’il peut paraître cliché de dire que le visage de la pauvreté change, force est de constater que cette année, c’est vrai plus que jamais.



À Shawinigan, on compte déjà près de 15% de demandes d’aide de plus que les années antérieures, confirme Émilie Marchand, responsable des communications au Centre d’action bénévole Le Trait-d’union et en charge de la campagne pour le Noël du Pauvre au Centre-de-la-Mauricie. L’an dernier, pas moins de 650 familles avaient pu être aidées. En date de mercredi, alors que les demandes entraient toujours, on comptait plus de 750 formulaires, tous qualifiés pour recevoir cette aide financière qui apportera un petit baume à l’approche de la période des Fêtes.

«On le voit vraiment que les visages changent. Nous avons de plus en plus de travailleurs qui viennent et qui demandent de l’aide. On s’entend que ces jours-ci, avec la hausse du panier d’épicerie et du coût des loyers, si tu travailles au salaire minimum, tu n’arrives juste pas. On demande de l’aide pour combler les besoins de base, vraiment de base», constate-t-elle.

À Nicolet aussi, on constate à quel point les visages ont changé. Au Centre d’action bénévole, pas moins de 10% des demandes cette année proviennent de personnes qui n’avaient jamais demandé de l’aide auparavant.

Et bien que des familles comptent au nombre des personnes qui ont besoin d’aide, ce sont davantage les personnes seules, et de plus en plus les personnes âgées, qui représentent le plus grand nombre de demandes. «Sur les 149 demandes que nous avons jusqu’ici, plus de 130 sont pour des personnes qui vivent seules», signale Mme Bombardier.



C’est un peu ce qu’a pu constater Sophie Bernier, l’animatrice du téléthon pour une septième année consécutive, lorsqu’elle s’est rendue sur le terrain dernièrement afin d’aller à la rencontre des organisations un peu partout sur le territoire, et de recueillir des témoignages en vue du téléthon qui sera diffusé dès 17h sur les ondes de ICI Mauricie et Centre-du-Québec. La solitude pèse lourd sur les épaules des gens qui vivent seuls et en situation de pauvreté.

(Amélie St-Yves)

«Et on dirait que la pandémie a exacerbé tout ça. Les personnes seules vivent tellement de solitude, parce qu’elles n’ont même pas les moyens de sortir pour, par exemple, aller prendre un café. Elles n’invitent pas les amis à la maison pour venir souper, parce qu’elles n'ont même pas les moyens de faire l’épicerie», explique l’animatrice.

Elle repense à ce père de famille dont les deux filles habitent à l’extérieur de la région. L’aide financière qu’il recevra du Noël du Pauvre servira à payer un souper de Noël à ses deux filles qui viendront le voir. «Sans ça, je ne crois pas qu’il aurait les moyens de les recevoir, et il resterait probablement seul à Noël», constate-t-elle.

Pour Sophie Bernier, l’utilité du téléthon revêt une toute autre signification en cette année où chaque hausse, ne serait-ce que de quelques dollars, frappe fort chez bien des personnes vivant en situation de pauvreté. «Chaque petit changement est vécu dix fois plus durement pour ces personnes, parce qu’elles n’ont plus de marge de manoeuvre. C’est un fardeau, un poids mental très lourd à porter. Alors au téléthon, nous n’avons pas la prétention qu’on va régler le problème de la pauvreté. Mais au moins, si on peut donner un peu de répit pendant un moment. C’est notre mission», considère la cheffe d’antenne du Téléjournal Mauricie.

Vendredi, c’est donc aux quatre coins de la région que vous pourrez faire des dons afin d’aider un maximum de personnes à passer un Noël un peu plus doux, en cette fin d’année qui ne nous a pas laissé beaucoup la chance de souffler. À Nicolet et à Shawinigan, il est également possible de participer à la campagne «Parraine ta famille» pour le Noël du Pauvre, ou encore de laisser des sous dans les nombreux barrages routiers qui seront érigés un peu partout. Les dons en ligne sont également possible sur le site web lenoeldupauvre.com.

«Et si vous pensiez aller au restaurant trois ou quatre fois ce mois-ci, pourquoi ne pas annuler une seule de ces sorties et de donner le 100$ que ça vous aurait coûté pour des gens qui en ont vraiment besoin? Parce que pour eux, ça va vouloir dire énormément. Ça va juste leur permettre de pouvoir aller s’acheter à manger et s’assurer de continuer d’avoir un toit sur la tête», fait remarquer Émilie Marchand.