Des photos sensibles... et encore plus de vedettes

L'«espion des vedettes» Pascal Desgagnés

Un policier-analyste qui préfère éviter de revoir des images. En une scène, la juge Rachel Gagnon de la Cour du Québec, qui décidera de la culpabilité ou de l’innocence du présumé «espion des vedettes» Pascal Desgagnés, a pu mesurer le côté sensible des photos subtilisées aux victimes.


Le policier-analyste en informatique Antoine Salame de la police de Longueuil en est à sa cinquième journée à la barre des témoins. La fatigue commence à se faire sentir.

À la demande de la Couronne, il dépose, les uns après les autres, des centaines de fichiers informatiques qui auraient été trouvés dans les ordinateurs de Desgagnés en 2018 et qui servent de preuve au procès. L’informaticien de 48 ans, consultant dans plusieurs ministères et organismes, est accusé de s’être introduit dans les comptes personnels de dizaines de personnes, dont plusieurs personnalités publiques.

Au total, le policier a eu entre les mains 5000 vidéos et 80 000 photos. Le service de police de Longueuil a dû utiliser la technique de reconnaissance faciale pour bien identifier les images.

Les 28 personnes qui ont porté plainte à la police ont regardé les photos et les vidéos avec les policiers pour confirmer qu’il s’agissait bien de clichés qu’ils avaient pris eux-mêmes ou qui étaient dans leur téléphone cellulaire.

La juge Gagnon regarde les images qui défilent sur un écran caché au public. Rappelons qu’une ordonnance de non-publication couvre l’identité des plaignants et le contenu des données volées.

Pas une autre fois

Au milieu des images plus anodines, surgissent des photos à caractère sexuel dérobées dans le téléphone d’une vedette. Le policier Antoine Salame prévient qu’il va détourner le regard. «Je ne veux pas les regarder une autre fois», lance-t-il.

L’analyste explique comment un logiciel lui a permis de remonter l’historique des fureteurs internet de l’accusé. Il a ainsi pu voir les fichiers visionnés, que le contenu soit présent ou même effacé dans certains cas.

En contre-interrogatoire, le policier s’impatiente face aux questions de l’informaticien. «L’accusé me pose des questions comme s’il ne connaît pas les machines virtuelles alors qu’il en avait une vingtaine dans ses ordinateurs!» lance M. Salamé, irrité.

Pascal Desgagnés veut savoir si, au moment de la perquisition, son matériel avait pu être contaminé par un virus de type «cheval de Troie» (logiciel malveillant installé à l’insu de l’utilisateur). Réponse : non.

L’analyste a-t-il la preuve physique que l’accusé était devant l’ordinateur au moment des connexions dans les comptes des victimes? L'analyste, qui a seulement jonglé avec les données informatiques, n’est pas le bon témoin pour répondre à cette question, tranche la juge Gagnon.

Encore plus de vedettes

Radio-Canada a obtenu un document déposé par la poursuite et détaillant encore davantage le fichier d'indexation trouvé dans le contenu effacé de l'ordinateur de Desgagnés. Ce fichier, récupéré par la police, compterait plus de 500 noms, dont plusieurs personnalités comme les membres du Canadien de Montréal Carey Price et Brendan Gallagher et plusieurs artistes connus, tels Louis-José Houde, Marie-Pier Morin, Louis-Jean Cormier et Charlotte Cardin.

Toutes ces personnalités ne sont pas considérées comme des victimes.

Le procès se poursuit pour au moins trois semaines, avec les témoignages d’autres policiers spécialisés en informatique. Les plaignants témoigneront par la suite.