Fête des anges: un baume sur le deuil périnatal

Élisabeth Morin, son fils Thomas et son conjoint Olivier Gélinas étaient présent pour une deuxième fois, afin d'honorer la mémoire de bébé Rosalie.

Dès qu’un enfant est désiré et attendu, dans la vie, on s’enthousiasme à le projeter dans l’avenir. Des parents, des grands frères ou grandes sœurs en devenir déposent déjà des rêves sur cet être en puissance. Mais quand sa destinée s’interrompt avant même d’avoir commencé à se tracer, la perte des parents est au moins proportionnelle à l’amour qu’ils avaient mis en réserve pour cet enfant.


La Fête des anges qui se tenait au Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap, samedi, visait donc à réconforter et à outiller des personnes qui ont vécu la fin trop abrupte d’une petite vie durant la grossesse, à sa naissance ou dans la première année de vie d’un bébé. Parce que le deuil périnatal ne se résume pas à la finalité biologique de la fausse-couche, de l’accouchement qui a mal tourné ou de la mort subite du nourrisson.

Élisabeth Morin en est à sa deuxième participation à la Fête des anges, après avoir vécu une grossesse ectopique – lorsque l’embryon se développe en dehors de l’utérus –, l’an dernier. Elle et son conjoint, Olivier Gélinas, ainsi que son fils Thomas ont voulu s’offrir ce temps d’arrêt à la mémoire de bébé Rosalie.



«C’était vraiment un bébé très attendu, très désiré», raconte la jeune femme. «On a cheminé vraiment tous ensemble, parce que bébé Rosalie, c’était le premier enfant biologique de mon conjoint», remarque-t-elle, précisant que Thomas, 7 ans, est le beau-fils d’Olivier.

«Ça a été une grosse épreuve, on n’est jamais prêts à perdre un enfant», témoigne Élisabeth Morin. «Et pour mon fils aussi qui l’a vécu un peu en décalé: quand c’est arrivé, j’ai passé ma semaine de vacances à l’hôpital et il se faisait garder par mes parents. Il ne comprenait pas pourquoi je n’étais pas là», raconte-t-elle, alors que le garçon descend l’escalier de la Chapelle de la Paix, tout sourire, un chocolat chaud à la main.

Si Élisabeth revient à la Fête des anges un an plus tard avec sa famille, c’est pour faire mémoire: «C’était super récent l’année dernière, et c’était vraiment pour avoir l’impression d’être entourée. Cette année, c’est pour se donner un temps d’arrêt et se donner le droit de penser à elle une fois de temps en temps».

L’écoute sans jugement, la clé



«C’est une épreuve terrible», reconnaît Simon Bournival qui a pris part à l’animation de cet évènement plus d’une dizaine de fois. Organisée en partenariat avec le Service diocésain de pastorale du diocèse de Trois-Rivières, le Complexe funéraire J-D Garneau, le Papillon bleu et le sanctuaire qui en est l’hôte, la Fête des anges visait à honorer la vie des petits partis trop tôt, à donner aux familles une occasion de se rencontrer et à leur proposer des outils de communications pour traverser leur deuil.

Simon Bournival (à droite) a pris part à l'animation de la Fête des anges plus d'une dizaine de fois.

Toutefois, pour l’entourage de la famille touchée par le deuil périnatal, pour les intervenants médicaux ou le milieu de travail, cette douleur bien réelle des parents est parfois incomprise ou mal mesurée. «Il y a beaucoup la maladresse des gens qui disent des choses, sans mauvaises intentions, mais qui laissent beaucoup de traces chez les parents. Souvent, c’est ce qu’ils retiennent», témoigne la travailleuse sociale Annick Bertrand, intervenante au Papillon bleu depuis cinq ans.

Pour éviter cet écueil, Annick Bertrand n’a qu’un mot d’ordre à prodiguer à l’entourage: l’écoute. «C’est vraiment d’avoir une bonne écoute, de ne pas juger les réactions de la personne, et d’offrir de l’aide plus subtilement, parfois, offrir un livre, un bol de soupe, aller prendre un café...», énumère-t-elle, à l’issue de la conférence qu’elle a donnée sur les communications en situation de deuil.

Le Papillon bleu s’adresse aux parents qui vivent un deuil périnatal dans la région de la Mauricie et du Centre du Québec. On y offre de cafés-causeries entre parents sur différents thèmes, des rencontres mensuelles en ligne pour les parents, les proches et les intervenants, la possibilité d’une rencontre individuelle avec l’intervenante pour la famille endeuillée, et plusieurs autres ressources.

Des symboles universels

Au cours de la journée, plusieurs symboles d’espoir et de libération ont été mis de l’avant pour favoriser le recueillement. En premier lieu, la lumière d’une bougie qui a brillé pour chaque enfant, tout l’avant-midi. «Peu importe notre confession, notre religion, notre spiritualité, le symbole de la lumière est important, c’est universel. Dans la noirceur, il y a toujours quelque part une lumière qui peut nous rappeler qu’il y a de l’espoir», évoque Simon Bournival, agent de pastoral diocésain.

Après la conférence, une rose blanche a été offerte à chaque famille, remise dans un échange qui permettait de manifester la compassion mutuelle des familles endeuillées. Un sac réconfort a aussi été donné aux familles participantes, comprenant chandelles, sucreries, tisanes, savons et crèmes, toutes des choses pour ajouter un peu de douceur au quotidien. Puis, à la fin de la rencontre, un ballon a été libéré vers le ciel, portant une étoile avec le nom de chaque petit ange dont on honorait ici la trop courte vie.



Pour l’animateur de la journée, Simon Bournival, et les autres partenaires dans l’organisation, l’objectif était de rejoindre ces familles dans leur traversée du deuil pour leur apporter un certain apaisement: «C’est un cadeau qu’elles se font, de prendre un moment pour faire mémoire. Ça leur donne une occasion de voir d’autres familles qui vivent quelque chose de semblable et de pouvoir partager avec elles. Et j’espère qu’elles repartiront avec un baume sur le cœur», dit-il.

Rappelons que le 15 octobre est la Journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal. Au Québec, l’événement est souligné depuis 2008.

Un ballon a été libéré vers le ciel, portant une étoile avec le nom de chaque petit ange dont on honorait ici la trop courte vie.