Le premier ministre semblait coincé dans son troisième lien et c’est la pandémie qui lui a sauvé la mise. Pour parler franchement: il avait l’air fou. Il n’a pas profité du fait qu’il était le seul à avoir l’expérience d’un tel événement; le plus nerveux des cinq. Éric Duhaime qui s’est avéré un bon débatteur était satisfait à la fin qu’on ne parle pas de ses finances personnelles si ce n’est qu’une allusion de l’animateur. Il lance de phrases creuses sans trop de conviction sur un ton nonchalant. Nadeau-Dubois a été égal à lui-même, frondeur, acteur, maître de l’image, digne du maître Justin avec l’air de jeune premier un peu baveux en plus. Charmeur pour aller chercher les jeunes, il ment comme il respire. Il se dit souverainiste avec la souveraineté au 19e rang des priorités de son parti qui compte 54% de fédéralistes. Il est un démagogue qui sait cacher son programme.
Dominique Anglade, qui doit vivre avec les décisions libérales du passé et qui n’a plus de parti pour l’appuyer, a démontré qu’elle connaît ses dossiers, mieux que le premier ministre tout au moins, mais la débandade de son parti causée par ses prédécesseurs, lui porte ombrage et tentait tant bien que mal de contrôler le débat. Elle démontre un grand courage.
Ce qui a frappé dans ce débat c’est la sincérité du chef du PQ, Paul Saint-Pierre Plamondon, que la plupart découvraient ou entendaient pour la première fois. C’était rafraîchissant de voir qu’un candidat puisse à l’occasion accepter les bonnes idées d’un adversaire. Il était toujours clair, posé et vrai dans son discours. Comme le dit si bien Mario Dumont: «Il a été positif, compétent et pertinent.» De plus, il n’embarquait jamais dans les échanges cacophoniques que le modérateur avait peine à interrompre. Pour moi il a été le meilleur avec Nadeau-Dubois mais l’a emporté sur le plan sincérité et franchise.
Avec la pandémie, la population n’a pas eu la chance de le connaître et comme on dit souvent: «Quand on veut exclure quelqu’un, on l’ignore». Sa façon intelligente de ramener la souveraineté dans l’espace public devrait faire réfléchir les gens qui ont écouté, lors de la dernière élection, le chant des sirènes de François Legault. De plus, Legault a clairement indiqué que le Parti libéral n’était plus l’opposition officielle à la souveraineté. Bernard Drainville devait se sentir petit dans ses souliers. La CAQ gardera le pouvoir mais il y a fort à parier que la coalition de ce parti laisse présager des luttes internes entre les deux factions (souverainiste et fédéraliste) où jusqu’à présent les fédéralistes on dicté le jeu.
Paul St-Pierre Plamondon a aussi prouvé dans ce débat qu’il connaissait tous les enjeux et qu’il ne pense pas uniquement à la souveraineté comme on le prétend. Il a tout d’un leader car il a su rajeunir le PQ et le ramener au rang des grands partis, alors que certains analystes le vouaient à l’extinction. Il a su ramener à la vie l’esprit de René Lévesque et c’est un bel hommage en cette année où le plus grand de nos premiers ministres aurait fêté ses 100 ans. Pour lui, le projet d’un pays n’est plus un tabou mais une solution évidente à des problèmes évidents dont la cause est le manque d’autonomie face à Ottawa. On ne peut être plus clair. Aujourd’hui, le premier ministre essaie de nous faire croire que c’est une lutte à deux. Un piège que Legault à tendu à Nadeau-Dubois qui est tombé dedans et qui se dit la principale et seule opposition. Quelle arrogance! Les deux en profitent pour jouer la carte du populisme. Un moyen simple de se débarrasser des adversaires, qui sont pourtant bien vivants. Est-ce que la presse saura enlever pour un instant ses lunettes roses ou partisanes et admette ce qui se passe?
Gaston Bouffard
Shawinigan