Le clown Guillaume Vermette banni d’une école

Guillaume Vermette

Le suicide demeure un sujet tabou. Le clown humanitaire Guillaume Vermette en a eu une preuve supplémentaire alors qu’une direction d’école lui a fait comprendre qu’elle n’avait pas apprécié sa conférence dans laquelle il est question de santé mentale.


«Je suis barré d’une école où j’ai donné ma conférence sur la persévérance et la santé mentale», écrit le Trifluvien, dans une publication Facebook, qui a été commentée et partagée par des centaines de personnes.

«Apparemment, ce serait parce que dans cette conférence, je parle de suicide et la direction aurait jugé qu’il s’agit d’un sujet qu’il ne faut pas parler aux adolescents. Je comprends leur inquiétude par rapport à ce sujet délicat, mais je suis convaincu que cette décision n’aide en rien et contribue au problème», poursuit-il.



Durant sa conférence, Guillaume Vermette confie qu’à un certain moment de sa vie, il a voulu mourir. «Mais surtout, je mets l’accent sur le fait que je n’ai pas gardé ça en dedans, que j’en ai parlé et que je suis allé chercher de l’aide. En fait, c’est l’essentiel de cette conférence: encourager les jeunes à prendre soin de leur santé mentale et à aller chercher de l’aide lorsqu’ils en ont besoin», précise-t-il.

Cette conférence, qu’il a présentée «des dizaines et des dizaines de fois», souligne-t-il, a été créée en collaboration avec des intervenants qui travaillent en prévention suicide. Il dit qu’il en a découlé «de magnifiques retombées» et de nombreuses rétroactions que ce soit de jeunes, d’enseignants, de parents ou d’intervenants. «Plusieurs jeunes sont venus me parler après cette conférence spécifiquement, pour me dire qu’ils avaient besoin d’aide. Je les ai écoutés et je les ai référés à des spécialistes. Plusieurs m’écrivent, encore quelques semaines après la conférence, pour me remercier.»

Le clown humanitaire précise que la direction de cette école – qu’il ne nomme pas – n’a pas vu sa conférence et ne s’est pas adressée à lui directement. «Mais ils m’ont fait comprendre, par l’entremise d’un messager, que ma conférence était problématique et que j’étais un clown pas drôle.»

Il semble que la direction ainsi que certains intervenants n’auraient pas apprécié qu’après sa visite, plusieurs élèves demandent de l’aide. «Alors ils me pointent comme le responsable de leur souffrance. Personnellement, je suis fier de ces jeunes qui ont fait preuve de courage pour aller demander de l’aide. Bravo!»



Le fondateur de la Caravane philanthrope écrit également qu’il présente cette conférence justement parce que «la santé mentale est un sujet toujours tabou et mal compris en 2022». «Cette direction, qui a voulu me chicaner, vient plutôt de raviver ma motivation à continuer de donner cette conférence et de brasser la cage des directions d’école que je croise sur mon chemin chaque semaine», conclut-il.

Mais faut-il ou non parler de suicide aux jeunes? Au Centre de prévention du suicide Accalmie, on précise que tout est dans la manière. «Je pense qu’avec les jeunes, il faut quand même être prudent dans le sens où il y a de bonnes pratiques. Il ne faut pas qu’il y ait d’obligation et on ne peut pas parler à des jeunes de première secondaire de la même façon qu’on parle à ceux de cinquième secondaire. On ne parlera pas directement du suicide, on va parler davantage de la prévention et de ce qu’on fait pour garder une bonne santé mentale. Les bonnes pratiques, c’est vraiment de dire: ‘‘Parlons d’espoir, parlons de prendre soin de soi, parlons de demander de l’aide’’», explique Geneviève Moreau-Blier, coordonnatrice clinique au Centre de prévention suicide Accalmie.

Les Centres de prévention suicide n’offrent pas de conférences aux écoles. Ils y tiennent toutefois des kiosques à certaines occasions. Ainsi, si des jeunes se sentent interpellés, ils peuvent y obtenir de l’information. «Le jeune à ce moment-là a le choix de venir me parler et de venir me rencontrer. Il n’a pas d’obligation, il ne se sent pas pris là-dedans.»

Avant de présenter une conférence, Mme Moreau-Blier a pris l’habitude d’avertir son public du contenu à venir. «S’ils sont sensibles, s’ils ont vécu quelque chose, que c’est trop difficile pour eux, je leur dis de ne pas hésiter à sortir et qu’il n’y a pas d’obligation de rester.»

La coordonnatrice clinique n’a pas assisté à la conférence de Guillaume Vermette, difficile donc pour elle de prendre position. Mais de la façon dont le clown humanitaire décrit comment il aborde le sujet, elle ne voit pas de problème. «De ce que j’en comprends, il a fait part d’un bout de sa vie et il a mis l’emphase sur le fait qu’il est allé chercher de l’aide. Si ça permet à des jeunes qui n’en parlaient pas nécessairement, d’ouvrir la porte et de parler de leur souffrance, je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose, c’est même très bien dans les circonstances», souligne-t-elle. «Parler de santé mentale et de persévérance, c’est même ultra important. Si Guillaume peut être un exemple pour ces jeunes-là, pourquoi pas?», conclut-elle.

Guillaume Vermette a préféré ne pas accorder d’entrevue sur le sujet. Il n’a pas souhaité non plus identifier l’école précisant toutefois qu’il ne s’agit pas d’un établissement de la Mauricie ou du Centre-du-Québec.

* * *

Si vous ou un proche vivez des moments difficiles: Ligne de prévention du suicide au 1-866-APPELLE (277-3553)