J’avais déniché une «couchsurfeuse» de ma région pour une entrevue. Comment ça marche? Qui s’inscrit sur une telle plateforme? Est-ce sécuritaire?
En gros, sur le principe des sites de rencontre, on dresse un profil avec des photos, une description de nos intérêts et la liste des pays visités. On ajoute au besoin une photo du fameux divan sur lequel les invités pourront dormir. Pas sûr de vouloir ouvrir vos portes à des inconnus? Vous pouvez vous rendre disponible pour un café. Dans tous les cas, offrir son toit étant un geste altruiste, aucune rétribution n’est attendue pour passer la nuit chez l’habitant.
Dans un monde idéal, avant de déposer une requête, il faut lire le profil de ceux qui sont prêts à nous accueillir. On leur envoie un message personnalisé en démontrant qu’on a bien hâte d’échanger sur notre passion pour Marvel ou qu’on pourra donner un coup de main pour cuisiner un plat préféré en commun. L’idée, c’est aussi de passer, peut-être, un peu de temps avec notre hôte. Politesse oblige, pas question de se quêter un pieu sans prévoir un peu de temps de conversation à destination.
Enfin, autre directive du petit manuel du «couchsurfer»: toujours lire les commentaires des autres voyageurs sur celui ou celle qui vous accueillera. Comme pour une chambre d’hôtel à réserver sur Booking.com, on veut s’assurer que d’autres recommandent le gîte avant d’y poser nos valises.
J’ai créé mon profil avec enthousiasme quelques années plus tard, vers 2010, avec l’intention de tester l’hospitalité des étrangers. Résultats mitigés. Avec un ami, j’ai voulu combattre les prix mirobolants à Londres pour un simple week-end. Pas de réponses. Personne ne semblait vouloir accueillir deux hommes.
J’ai tenté ma chance à nouveau, cette fois pour un café seulement, à mon arrivée à Auckland, en Nouvelle-Zélande. J’y ai rencontré un Néo-Zélandais qui, après une boisson chaude, m’a invité à découvrir son quartier. N’ayant pas réussi à l’effrayer, je suis reparti en fin de journée avec une invitation pour une randonnée sur un volcan, deux jours plus tard.
Reprenant espoir, j’ai formulé quelques autres demandes d’hébergement qui n’ont jamais abouti, malgré les recommandations positives d’autres voyageurs.
Si j’ai abandonné Couchsurfing pendant un temps, j’ai réactivé le site, devenu application mobile, de manière sporadique pour consulter son babillard virtuel et connaître les événements organisés dans les villes que je visitais. Un de ces événements a suffi pour une rencontre inattendue qui finirait à tout hasard devant le notaire, le temps d’un échange d’anneaux.
De gratuit à 18 $ par année
Puis l’application est devenue payante. Il en coûte désormais 18 $ par année pour accéder à son contenu, une somme négligeable si on économise régulièrement sur les frais d’hébergement. On y a ajouté les Hangouts, cette option de se rendre disponible pour trois heures pour un café, une bière, une marche dans le quartier ou un bon repas dans un restaurant typique.
À la manière de Facebook, on crée un statut et on attend les invitations.
«Jonathan veut boire un café», peut-on scander pour trois tours de cadran. Les autres membres en ligne peuvent alors proposer de se joindre à nous.
En Bosnie-Herzégovine, en Angleterre et en Écosse, en juin, j’ai eu l’envie de réactiver mon profil, uniquement pour la fonction Hangouts. Comme un Dédé Fortin qui retourne sur sa rue Principale après la construction d’un «centre d’achat», j’avais les attentes plutôt basses. Qu’avait-on fait de Couchsurfing?
Après avoir affiché une requête pour visiter la ville, à Londres, j’ai rapidement reçu une requête pour visiter non pas la ville, mais un appartement privé. L’intention n’était pas d’offrir un hébergement ni de participer à un événement. Non seulement je me suis redemandé ce qu’on avait fait de Couchsurfing, mais aussi des sites de rencontre traditionnels. On semble avoir formellement ajouté Couchsurfing aux options pour trouver l’âme sœur. Mieux vaut être prévenu quand ce n’est pas ce qu’on cherche.
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À Édimbourg, quelques jours plus tard, j’ai rejeté une autre proposition louche avant de rencontrer Manuel pour un repas. En tant qu’homme, me disait-il, il éprouvait beaucoup de difficulté à trouver quelqu’un pour l’héberger. Les femmes rejetaient ses demandes alors que les hommes préféraient accueillir la gent féminine. S’il avait dû s’enfuir d’un hôte alcoolique au caractère bouillant, il semblait s’en tirer malgré tout, puisqu’il parcourait l’Europe à petit prix. C’est lui, admettait-il, qui n’avait pas étudié le profil de l’individu avant de se rendre chez lui.
Mariam, rencontrée le lendemain, aime le caractère spontané des Hangouts. Elle était encore satisfaite de son utilisation de Couchsurfing. Alors qu’elle se trouvait à 200 mètres de moi environ, selon l’application, elle m’a proposé de me rejoindre pour une marche vers Dean’s Village. Trois minutes plus tard, d’un point de rencontre devant l’église Saint-Gilles, nous nous mettions en route, ce qui, selon elle, ne m’aurait pas laissé suffisamment de temps pour avoir de mauvaises intentions. Elle était rassurée.
Elle logeait chez un gentil couple, racontait-elle, qui lui avait refilé les meilleurs tuyaux pour découvrir la région. À leur recommandation, elle a abandonné l’idée de visiter le château et s’est plutôt éloignée de la ville pour explorer les villages avoisinants. Elle se disait emballée. C’est grâce à elle, plus aventureuse que moi, que j’ai pu goûter le haggis, ce plat traditionnel à base de panse de brebis et d’abats de mouton. Elle m’en a partagé une bouchée.
S’il est toujours essentiel de filtrer ses conversations sur une application mobile, avec un peu de prudence, il semble y avoir encore moyen, dans les grandes villes du moins, de rencontrer des voyageurs accueillants sur Couchsurfing.