Aider les pères pour le bien-être de tous les membres de la famille

POINT DE VUE / Alors que s’ouvre la Semaine québécoise de la Paternité, un récent sondage commandé par le Regroupement pour la Valorisation de la Paternité (RVP) nous apprend qu’après deux ans de pandémie, environ un père sur sept est en situation de détresse psychologique. Pour certains d’entre eux, notamment les pères à faible revenu ou ceux ayant vécu une séparation récente, ce taux peut grimper jusqu’à près de 30 %.


Le thème choisi pour la 10e édition de cette semaine qui valorise l’engagement paternel, «Papa, as-tu besoin d’aide», nous invite à nous interroger sur la vulnérabilité des pères. Le simple fait de soulever la question constitue une façon de poser un regard différent sur les défis vécus par des hommes dans leur rôle de père. Car émettre l’hypothèse que les pères peuvent être vulnérables revient à affirmer qu’ils ne sont pas, justement, invulnérables.

Nommer leur vulnérabilité nous permet de prendre du recul par rapport aux problèmes que peuvent vivre certains d’entre eux et qui font les manchettes. Cela nous permet également de rendre les pères visibles autrement qu’à travers ces problèmes. Dès lors, on peut s’approcher d’eux d’une façon différente en s’intéressant à ce qu’ils vivent et, surtout, à comment les soutenir.



À ce titre, les résultats du sondage sont troublants. Parmi les pères en situation de détresse psychologique, à peine le tiers (34 %) disent avoir consulté une ressource d’aide. Cela revient à dire que les deux tiers des pères parmi les plus vulnérables n’ont obtenu aucun soutien psychosocial. Ce constat suggère que les services sont trop peu accessibles ou encore sont peu efficaces pour rejoindre la grande majorité d’entre eux.

Cette impression que les services aux parents ne s’adressent pas vraiment aux pères commence dès la grossesse et la naissance où, souvent, ils se rendent compte que le parent principal est la mère et qu’ils sont des accompagnateurs de celle-ci.

Cette interface précaire entre le dispositif de services et les pères fait dire à 58 % de ceux interrogés dans le sondage que la société québécoise ne valorise pas le rôle de père autant que celui de la mère.

À l’échelle canadienne, le Québec fait pourtant figure de champion en ce qui concerne l’engagement paternel. L’évolution sociale du rôle de père s’est faite ici à vitesse beaucoup plus élevée que dans le du reste du Canada. Le hasard n’est pas en cause: c’est le résultat de politiques publiques innovantes, en particulier la mise en place du réseau des services de garde éducatifs à l’enfance (les CPE) et l’avènement du congé de paternité inclus au Régime québécois d’assurance parentale, l’un des plus généreux au monde.



Dans notre marche vers une plus grande égalité entre les mères et les pères au sein des familles, reconnaître la vulnérabilité des pères avec bienveillance et leur proposer un soutien répondant à leurs besoins constitue une étape incontournable. Il est important de prendre conscience qu’aider un père en détresse, c’est aussi aider ses enfants et leur mère, qui sont affectés eux aussi par les conséquences de cette détresse.

En cette Semaine québécoise de la Paternité, prenons un instant pour prendre les devants et demander aux pères de notre entourage : Papa, as-tu besoin d’aide? La réponse pourrait nous surprendre.

Carl Lacharité

Professeur en psychologie

UQTR