La Mauricie n’échappe pas à la crise du logement qui frappe tout le Québec. Ce problème frappe toute la région, sans épargner de secteur, selon le président du Consortium en développement social de la Mauricie, Jean-Yves St-Arnaud.
«On était déjà au top de l’offre de logement et maintenant, on reçoit du monde qu’on ne peut pas loger. Automatiquement, quand un appartement se vide, il se remplit immédiatement. Donc vous vous ramassez avec des gens qui sont sans logement. C’est partout en Mauricie. C’est terrible, effrayant», commente celui qui porte également les chapeaux de maire de Saint-Sévère et de préfet de la MRC de Maskinongé.
Le manque de logement cause donc des soucis aux ménages au revenu faible ou modeste, qui n’ont pas forcément accès facilement à la propriété. Mais le casse-tête est encore plus grand pour les personnes vulnérables, comme les aînés, les femmes victimes de violence conjugale, les personnes vivant avec un handicap, un trouble du spectre de l’autisme ou des problèmes de santé mentale, et les membres des Premières Nations, pour n’en nommer que quelques-unes. Le Consortium a d’ailleurs présenté les résultats préliminaires d’une étude menée par le Centre de recherche sociale appliquée (CRSA) destiné à dresser un portrait de l’habitation en Mauricie.
«On avait fait une grosse démarche en 2010, où on avait consulté différents territoires pour connaître les besoins et les pistes de solution. Là, on avait besoin de savoir où on est rendu, d’actualiser le portrait et d’identifier nos priorités d’action. Dans l’urgence, on a senti le besoin de se retourner sur les personnes, ce qu’elles vivent dans le contexte de la crise actuelle», résume Stéphanie Milot, coordonnatrice du Consortium.
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Recueillies par le biais de groupes de discussion et d’entrevues individuelles, les données préliminaires de ce portrait permettent d’avoir un aperçu des choix difficiles auxquelles sont confrontées les personnes vulnérables de la région. Plusieurs ont mentionné être obligées de demeurer dans un logement insalubre, faute de trouver mieux à un prix abordable. Plusieurs se disent victimes de discrimination de la part des propriétaires. Les conséquences peuvent aller jusqu’à des atteintes à la sécurité physique et psychologique, en particulier chez les femmes qui tentent de se sortir d’un contexte de violence familiale.
Or, dans la région, très peu de logements sont disponibles en ce moment. À Trois-Rivières, le taux d’inoccupation est de moins de 1%. À Shawinigan, il est passé d’environ 5% à 2% en un an et à La Tuque, de 8% à 5,5%.
«Il y a vraiment une détérioration de la situation, et la spéculation immobilière met aussi la pression sur les locataires les plus vulnérables, qui n’ont pas d’autre endroit où aller s’ils sont forcés de quitter leur logement», souligne Véronique Laflamme, porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU).
Les pistes de solution
La journée de jeudi n’était que la première étape de la mobilisation que souhaite favoriser le Consortium pour la construction de davantage de logements sociaux. La coordonnatrice de l’organisme promet que d’autres rendez-vous suivront dans les prochains mois, afin de refaire le point sur les actions mises en place et pour en déterminer de nouvelles.
«Il faut ramener la personne au cœur des préoccupations. À Trois-Rivières, il est en train de se dessiner une politique d’habitation. Or, il faut s’assurer que l’on a vu tous les aspects, qu’il n’y ait aucun angle mort. Il faut voir régionalement s’il y a des choses à travailler ensemble», plaide Mme Milot.
Parlant de Trois-Rivières, son maire et plusieurs de ses conseillers municipaux ont assisté aux activités de la journée. Parmi eux figurait Dany Carpentier, conseiller du district de Sainte-Marguerite. Celui-ci a exprimé sa déception de voir que la Ville n’a pas agi plus tôt, alors qu’il dit avoir tiré la sonnette d’alarme il y a belle lurette.
«Je suis gêné, parce qu’à Trois-Rivières, on a débloqué des fonds pour le logement social, mais rien ne bouge vraiment, alors que le 1er juillet arrive et qu’il va y avoir des gens qui se retrouveront sans toit. On donne des permis de construction, mais on n’a pas fixé d’objectifs de mixité, alors que d’autres villes ont mis des incitatifs pour la construction de logements sociaux, elles sont créatives», critique-t-il.
De son côté, Jean-Yves St-Arnaud dit aussi espérer que les acteurs pouvant intervenir sur la question du logement social vont cesser de «travailler en silo» pour plutôt «travailler ensemble». Il estime cependant que les municipalités sont freinées par Québec lorsque vient le temps de construire.
«La loi 103 a bloqué les municipalités qui veulent agrandir leur périmètre urbain. Elles se retrouvent limitées dans l’espace. Par exemple, à Louiseville, il n’y a pas de logement disponible. La Ville a des terrains sur lesquels on pourrait construire des logements, mais le ministère de l’Environnement nous bloque, parce qu’on n’est pas capable d’amener les égouts jusque là», illustre-t-il.
La journée de jeudi était organisée conjointement par le Consortium en développement social de la Mauricie, le Centre de recherche sociale appliquée et du comité régional en habitation. Une nouvelle journée de ce genre pourrait être organisée dans six à huit mois, indique-t-on.