Des robots et autres équipements automatisés ont ainsi fait leur apparition un peu partout dans cette nouvelle usine 4.0 à la fine pointe de la technologie qui permet de laver et brosser plus efficacement les patates avant qu’elles soient inspectées et triées selon la grosseur et la qualité par des trieurs optiques.
«Il n’y avait rien d’innovateur parce que des trieurs optiques étaient déjà implantés un peu partout dans le monde et même ici au Québec. Il fallait simplement rattraper notre retard technologique», souligne M. d’Astous, qui a joint l’entreprise en 2014 et piloté cette importante transformation.
Automatiser le plus possible
L’entreprise, qui a initialement injecté 12 M$ dans ce projet de modernisation, en a profité pour analyser attentivement ce qui se fait ailleurs dans le monde afin de «trouver les meilleures pratiques et créer une nouvelle usine la plus automatisée possible», ajoute-t-il.
Les dirigeants ont poussé plus loin cette transition en optant pour des trieurs optiques qui permettent de trier les patates en 12 catégories, alors que la plupart des autres entreprises se contentent de six critères d’inspection. Un choix justifié par le «nombre élevé de nos variétés de pommes de terre et de nos clients», explique Hugo d’Astous.
La PME travaille même à améliorer la performance des trieurs optiques, qui n’offraient qu’une efficacité de 70 % au moment de leur acquisition. Pour diminuer le taux d’erreur de 30 %, elle a fait appel à l’expertise en intelligence artificielle de la firme québécoise Vooban qui a notamment intégré des caméras haute définition et un nouveau modèle de vision par ordinateur dans les trieurs optiques.
L’entreprise mise aussi sur des palettiseurs robotisés. «On a implanté des équipements automatisés qui permettent de réduire les manipulations tout au long de la chaîne de production», indique M. d’Astous.
Rattrapage technologique et organisationnel
Outre son retard technologique, Dolbec devait aussi faire du rattrapage en matière de gestion. «On n’avait pas de culture d’innovation, ni d’équipe de direction pour entreprendre un tel virage technologique», souligne Hugo d’Astous en précisant que l’entreprise s’est également assurée de recruter des employés ou de former ceux déjà en place afin de pouvoir suivre la cadence.
Il cite l’exemple d’une employée de très longue date, Nathalie Frenette, qui est passée de trieuse de patate à opératrice du nouvel équipement de trieuse optique. D’autres trieurs ou employés d’usines travaillent maintenant à la planification de la production. L’entreprise a aussi engagé des électromécaniciens et un ingénieur en mécanique.
Patates Dolbec, qui emploie 150 personnes, n’entend pas s’arrêter là. «L’automatisation amène des gains de productivité qui, en retour, nous permettent d’investir dans d’autres projets qui vont nous aider à maintenir et même améliorer ces rendements», constate Hugo d’Astous.
Parmi les futurs projets figurant dans sa roadmap technologique, à laquelle elle entend consacrer 4,5 M$, l’entreprise entend connecter ses équipements de production pour recueillir des données qui lui permettront, par exemple, d’analyser les causes liées à des arrêts de production.
Fondée en 1967, avec seulement 25 acres de terre, un cheval et une charrue, Patates Dolbec exploite aujourd’hui quelque 10 000 acres de terre dans une dizaine de municipalités situées dans un rayon de 70 kilomètres qui produisent plus de 15 variétés de pommes de terre. La production annuelle de l’usine est passée ces dernières années de 65 millions à 120 millions de patates qui sont distribuées dans les grandes chaînes d’alimentation et de restauration principalement au Québec (80 %), ainsi qu’en Ontario et dans les provinces de l’Atlantique.
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Trois questions à Hugo d’Astous
1. Quel est le meilleur conseil que vous avez reçu ou que vous aimeriez avoir reçu?
«Pendant mes études en administration j’ai eu la chance de faire un stage chez Quincaillerie Richelieu et de rencontrer Richard Lord qui m’avait dit qu’en affaires, on ne faisait pas que des bons coups mais que l’important c’est d’apprendre de ses erreurs et de réussir à faire plus de bons coups que de mauvais. J’ai gardé ça en tête tout au long de ma carrière.»
2. Qu’est-ce qui vous motive, comme entrepreneur, comme dirigeant?
«Donner le pouvoir aux employés et aux équipes de se réaliser et de les voir s’épanouir dans leur travail. C’est le plus beau cadeau. À l’usine d’emballage, par exemple, on a une équipe semi-autonome d’employés qui font leur propre horaire et planifie leur travail. Parmi ceux qui ont le plus d’ancienneté, et qui étaient habitués à se faire dire quoi faire, j’en vois qui se font aujourd’hui davantage confiance.»
3. Si vous étiez en politique, quel enjeu économique retiendrait votre attention prioritairement – et comment le résoudre?
«J’augmenterais tout de suite le salaire minimum à 20 $ l’heure, puis à 25 $ d’ici cinq ans. Il n’y a personne qui peut réussir à se loger, s’habiller et à faire l’épicerie convenablement avec le salaire minimum actuel. Il y a des employés qui travaillent aussi fort que des dirigeants et qui méritent de meilleurs salaires. Il faut en arriver à mieux répartir la richesse.»
En collaboration avec l’École d’Entrepreneurship de Beauce et le Groupement des chefs d’entreprise
Pendant des décennies, les entreprises ont adopté une approche ponctuelle et à court terme en matière de gestion des talents. Or, dans le contexte actuel de pénurie de main-d’oeuvre et même de vague de départs volontaires, il est temps que les entreprises s’affairent plus sérieusement à développer une bonne chaîne d’approvisionnement pour recruter et garder leurs employés, suggère le Harvard Business Review qui propose des façons de faire.
Les employeurs doivent notamment travailler activement pour puiser dans une base de talents plus large. Et ce, par exemple, en s’assurant de former des personnes qui n’ont pas nécessairement toutes les compétences nécessaires pour occuper tel emploi. Les employeurs doivent donc investir dans leur main-d’œuvre de la même manière qu’ils investissent dans la R&D, soit en reconnaissant que le rendement des investissements à court terme génère des rendements à long terme.
Construire de l’intérieur, c’est aussi montrer aux travailleurs qu’ils peuvent évoluer au sein de l’entreprise, en leur donnant du même coup une raison d’y réfléchir à deux fois avant de vouloir changer d’organisation.
Les entreprises, contrairement à la pratique qui a cours depuis très longtemps, ne peuvent plus embaucher et licencier à volonté. Cette capacité de recruter du personnel à la demande dépend évidemment de la disponibilité des travailleurs qui, aujourd’hui, se font beaucoup plus rares. Pour revenir à un meilleur équilibre entre les emplois et les personnes, il faut donc aller au-delà de la stratégie ad hoc que la plupart des entreprises ont employée jusqu’à présent pour recruter leurs talents.
Pour en savoir plus : Manage Your Talent Pipeline Like a Supply Chain
Avec la participation de l’École d’Entrepreneurship de Beauce