Chronique|

COP 26: ça sert à quoi?

Photo: AP Photo/Alastair Grant

La 26e Conférence des Parties (Conferences of the Parties - COP) s’est ouverte dimanche à Glasgow en Écosse avec un an de retard et se déroulera jusqu’au 12 novembre. Ce sommet international sur le climat réunit les chefs de 190 pays ainsi que plus de 10 000 négociateurs, ministres et représentants de la société civile. Tout ce beau monde se penche sur un problème complexe : freiner drastiquement les changements climatiques d’ici les huit prochaines années.


Mais à quoi ça sert une COP?

Il y a de bonnes chances que vos céréales goûtent la même chose avant et après. On s’entend.



C’est normal que le citoyen se sente concerné surtout lorsqu’il reçoit des subventions pour améliorer l’efficacité énergétique de sa maison, par exemple en l’isolant davantage. On est alors en aval des efforts climatiques. Mais en amont, soit avant de voir la couleur de l’argent, il y a tout un processus de négociation et de décisions qui influence la direction que prennent les fonds publics.

La COP 26, à quoi va-t-elle servir concrètement? J’ai demandé l’avis d’Annie Chaloux, professeure à l’École de politique appliquée de l’Université de Sherbrooke et directrice de la revue de vulgarisation scientifique Climatoscope.

Elle m’a rappelé que lorsque les pays signataires de l’Accord de Paris se sont engagés en 2015 à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C d’ici 2030, il était déjà prévu que les États revoient leurs objectifs cinq ans plus tard, soit maintenant. Le premier objectif de la COP 26 est donc d’amener les dirigeants – surtout les grands émetteurs de gaz à effet de serre (GES) comme le Canada – à rehausser leurs ambitions, car on s’enligne vraiment pour rater notre but.

Le Royaume-Uni, qui est l’hôte de l’événement, y voit la meilleure des dernières chances qu’a le monde de maîtriser l’emballement climatique.



Un sommet international comme la COP 26 est une plateforme exceptionnelle pour prendre des engagements devant témoins. Annie Chaloux sera attentive à ce que le Canada va y annoncer. Les États y jouent, en quelque sorte, leur crédibilité.

Rappelons que le 22 avril 2021, lors du sommet des dirigeants qu’a organisé le président américain Joe Biden, Justin Trudeau avait déjà annoncé de nouvelles cibles de réduction de GES, c’est-à-dire entre 40 et 45 % d’ici 2030.

Est-ce que sept mois plus tard, le Canada rehaussera son ambition climatique? De quelle manière la nomination de Steven Guilbeault – qui en est à sa 19e COP – au poste de ministre de l’Environnement et des Changements climatiques fera-t-elle rayonner le Canada? Nous le saurons dans les prochains jours.

La COP 26 permet également de s’inspirer des autres. L’interdiction de vente de véhicules neufs à essence, le remplacement du charbon par des énergies éolienne et solaire ou encore les chantiers de protection et de restauration des milieux naturels font partie des solutions et des actions qui seront mises de l’avant.

Glasgow devient donc une plateforme pour faire rayonner des expertises en vue de créer des partenariats d’affaires. Par exemple, le premier ministre François Legault a l’intention de convaincre les dignitaires que le Québec est la batterie verte du nord-est de l’Amérique grâce à sa filière électrique et au développement prometteur de l’hydrogène vert. Le Québec pourra inspirer les autres États, mais aussi aspirer à décrocher de juteux contrats pour les entreprises de chez nous.

Au-delà des GES, il y a aussi la question de la justice climatique. Il s’agit là d’une autre utilité à la COP 26.



Partout sur la Terre, des populations vivent les effets dévastateurs de la météo extrême qui est exacerbée par les changements climatiques. Or, les personnes les plus exposées aux risques climatiques sont majoritairement celles qui y ont le moins contribué et qui vivent dans des pays pauvres.

C’est par le biais d’une coalition internationale, Adaptation Action Coalition, qui regroupe des pays développés et d’autres en voie de développement, que des solutions sont explorées et pourront être bonifiées durant la COP 26. En gros, comment les pays riches peuvent-ils mieux soutenir les pays pauvres durement touchés par l’impact des changements climatiques?

Par ailleurs, ce grand rendez-vous devient l’occasion de mobiliser les sociétés financières, les banques, les compagnies d’assurances, les investisseurs et les grandes entreprises pour rassembler des milliards de dollars. La COP 26 a pour ambition de convaincre le monde que chaque décision financière doit prendre en compte le climat pour le passage à une économie neutre en carbone. Il en va même de la rentabilité à moyen long terme des investissements.

À ce sujet, l’ancien gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre, Mark Carney, agit à titre de conseiller financier du premier ministre britannique pour la COP 26. Il dirige notamment l’Alliance financière de Glasgow pour la neutralité carbone, pour laquelle 160 entreprises et 43 banques centrales se sont déjà engagées à investir 70 milliards d’actifs d’ici 2050.

Bref, la COP 26 sert à tout ça.

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Pour les gens qui n’ont pas pu aller à Glasgow, je vous invite à consulter les activités virtuelles et gratuites des Dialogues pour le climat.

Pendant les deux prochaines semaines, la programmation offre des déjeuners-causeries, tables rondes pour comprendre les enjeux climatiques et séances de débreffage avec des personnes accréditées présentes à la COP 26 qui résument les éléments clés de la journée et pourront répondre à vos questions.



La COP 26 en chiffres :

+ de 190 pays représentés

+ 10 000 diplomates, ministres et représentants de la société civile

12 jours de négociations

1,5 °C cible maximale du réchauffement à atteindre d’ici 2030

2,7 °C tendance réelle de l’augmentation du réchauffement

8 ans qu’il reste pour y arriver

40-45 % cible canadienne de réduction des GES

37,5 % cible québécoise de réduction des GES

100 milliards $ fonds à créer par les pays riches pour les pays pauvres

1000 $ coût d’une chambre d’hôtel à Glasgow pour une nuit pendant la COP