La fête du Canada a beau être un jour férié, les organismes oeuvrant dans l’habitation sociale et la défense des droits des locataires ne prennent pas congé devant la situation actuelle. Selon Carol-Ann Côté, coordonnatrice d’InfoLogis Mauricie, Trois-Rivières compte une vingtaine de familles sans bail en ce 1er juillet.
«C’est la première fois qu’on voit ça. L’OMH (l’Office municipal de l’habitation) a placé des familles en prêt d’urgence (de logement), une autre portion vit chez des amis, de la famille, en camping. J’ai deux ménages qui ont été placés dans des hôtels, car ils ne sont pas admissibles à des logements subventionnés. Ils étaient à la rue et n’avaient aucune autre possibilité. La Ville de Trois-Rivières a débloqué de l’hébergement d’urgence et il y a un programme avec la Société d’habitation du Québec.»
La situation a forcé l’OMH à mettre des équipes d’urgence à l’horaire du 1er juillet, une première dans l’histoire de l’organisation. L’OMH a traité une quarantaine de dossiers dans les derniers jours et l’organisme souhaitait mercredi en régler quatre avec des propriétaires de logements privés, car des aides financières existent pour l’accès au logement, mais cette option a échoué. L’Office a donc attribué à ces ménages des logements de façon temporaire, ces logements n’ayant pas été réclamés par les gens sur la liste d’attente, car ils ne correspondaient pas à leurs demandes. C’est sans compter les cinq demandes qui sont entrées jeudi.
«Ça fait 11 ans que je travaille à l’OMH. C’est du jamais vu. Dans les cinq nouvelles demandes, des gens sont dans leur famille, chez des amis. Ultimement, on attribue un logement en prêt temporaire pour les gens admissibles à des logements subventionnés. Ils ne sont pas à la rue. Dans nos dossiers, personne ne va dormir dehors ce soir (jeudi) et dans les prochains jours. Mais ce monde logé temporairement, c’est du travail à poursuivre après le 1er juillet pour stabiliser la situation. La demande reste ouverte pour trouver une solution permanente. Il y a une forte pression sur nos équipes», lance le directeur général par intérim de l’OMH de Trois-Rivières, Jimmy Ducasse.
Cette pression occasionnée par la rénoviction, par une rareté des logements et par une hausse des loyers est accentuée par la présence de 16 ménages dans des logements de l’OMH qui ont été victimes d’un sinistre comme un incendie ou un dégât d’eau engendré par la rafale du 8 juin.
Avec un taux d’inoccupation des logements de 1,3 %, alors que le taux d’un marché équilibré est de 3 %, Carol-Ann Côté n’est pas surprise de vivre une telle crise. Des gens sont obligés d’accepter un logement trop petit pour le nombre de personnes de la famille ou de vivre dans un logement insalubre, faute de mieux.
«On a une femme qui vit avec sa fille de 15 mois dans la salle de lavage chez sa mère. Des gens avec des enfants se retrouvent sans logement. Il y a une rareté du logement abordable. La liste d’attente pour les logements sociaux est longue. Les besoins sont criants. Mais 2021 ne sera pas quelque chose d’unique. On sait que les logements abordables ne vont pas pousser durant la prochaine année. La situation ne s’améliorera pas si aucune solution n’est mise en place. Notre solution est le logement social, investir dans du logement abordable. Le marché privé n’est pas une solution. Le but d’un propriétaire est que ce soit lucratif et on le comprend. Mais il faut être capable de loger les gens.»
Selon Mme Côté, Trois-Rivières a besoin d’environ 1300 unités de logement social d’ici les cinq prochaines années. D’après M. Ducasse, il faudrait miser sur 100 à 200 logements sociaux de plus à très court terme pour diminuer la pression.
À ce sujet, l’OMH poursuit les démarches dans le but de bâtir un immeuble de 36 logements sociaux sur le terrain de l’ancienne église Saint-Philippe. Cette bâtisse doit être prête au printemps 2022.
«Ça va aider des gens, mais ce ne sera pas suffisant. Ça prend de la volonté politique et il y en a. Mais c’est une question de sous.»
Jimmy Ducasse invite par ailleurs les propriétaires de logements privés à communiquer avec l’OMH de Trois-Rivières afin de loger des gens dans le besoin par le biais de programmes de subventions.