Santé mentale : un renouveau

Selon Georgia Vrakas, «le regard qu’on portera sur la vie, sur nos vies, risque d’être différent de celui de la pré-COVID».

CHRONIQUE / En ce début d’été, la deuxième dose du vaccin COVID-19 dans le corps, je me sens libre. Je sens qu’un poids a été enlevé de mes épaules, une certaine légèreté ayant frayé son chemin vers moi.


Je m’étais ennuyée de tellement de choses durant les multiples confinements. Des choses que je tenais pour acquises : voir mes sœurs et ma famille élargie à Montréal, aller au bureau, enseigner «en présentiel», serrer la main de gens, serrer les gens que j’aime dans mes bras, très fort. Oh que je me suis ennuyée d’aller au restaurant pour un 5 à 7 ou pour souper avec mes ami.e.s! Tout cela devient de plus en plus possible en tenant compte bien sûr de certaines mesures sanitaires toujours en vigueur.

On le sait toutes et tous, la dernière année et demie a été très difficile. Pour plusieurs d’entre nous travaillant à distance, l’isolement et la solitude étaient rendus la norme. Pour certain.e.s, le quotidien était complexifié par l’école à la maison en plus du télétravail. Et pour d’autres, les pertes d’emploi signifiaient d’autres problèmes importants. De plus, se changer les idées était rendu quasi-impossible à cause des confinements et du couvre-feu.

On se retrouve maintenant presque au seuil d’un retour «à la normale». En fait, non. Je ne pense pas qu’on va revenir à la normale d’avant. Je ne pense pas que ce soit possible. Pas après avoir vécu le trauma collectif qu’est la pandémie.

Bien sûr, je crois qu’on va reprendre un rythme de vie plus actif ce qui est très important, mais je pense que le regard qu’on portera sur la vie, sur nos vies, risque d’être différent de celui de la pré-COVID.

Notre étude sur la santé mentale positive durant la pandémie a aussi examiné les prises de conscience chez les répondants. Nos résultats révèlent que les gens ont eu une variété de prises de conscience dont, entre autres, le besoin de ralentir, l’importance de prendre soin de soi, de se concentrer sur ce qui est essentiel, l’importance des contacts sociaux, la solidarité sociale, les inégalités sociales, et la fragilité de la vie. À mon avis, ces réalisations laisseront des marques sur la post-pandémie. Reste à savoir si elles auront des effets durables.

De mon côté, je peux vous dire que j’ai été profondément affectée par la COVID-19 : séparation, solitude, télétravail, voyage annulé, loisirs annulés. Ai-je dit solitude? Ah oui, désolée de me répéter, mais pour une personne sociable, extravertie comme moi les contacts sociaux sont essentiels. La pandémie m’a rappelé ce fait quasi quotidiennement.

Une autre prise de conscience importante que j’ai eue lors des derniers mois est l’importance de ma santé mentale. De la préserver, d’en prendre soin. Comme je l’ai déjà mentionné ici, j’ai reçu un diagnostic de trouble bipolaire de type 2 au début du mois de mai. Ceci m’a obligé de ralentir et de prendre soin de moi avec le suivi approprié. Je suis de nature quelqu’un qui aide les autres. Là il a fallu que je m’aide moi-même. Pas facile pour une psychologue habituée à être là pour les autres. Mais je n’ai pas eu le choix pour entreprendre mon rétablissement.

Une année pas facile en effet. Comme je disais, je ne pense pas que nous pouvons « revenir à la normale » pré-pandémie. Pourquoi? Deux choses. Premièrement, on ne peut jamais revenir en arrière et deuxièmement, la COVID-19 a laissé des marques sur nous individuellement et collectivement. Nous allons plutôt avancer et nous allons nous reconstruire, mais désormais avec l’expérience de la pandémie imbriquée dans notre mémoire collective.  Ainsi nous allons pouvoir nous rétablir collectivement, un petit pas à la fois.

*Chers lecteurs, chères lectrices, je vous souhaite un très bel été. Profitez-en! On se revoit vers la mi-août.

Si vous êtes suicidaires ou l’un de vos proches l’est : 1-866-APPELLE

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