Le département de soins infirmiers de l’UQTR sous tutelle

L’UQTR tentera une nouvelle approche pour remédier à la situation.

Le conseil d’administration de l’UQTR a mis son département de sciences infirmières sous tutelle, le 23 mars dernier, pour une période de 180 jours, afin de tenter de remédier une fois pour toutes à un problème qui y perdure depuis une quinzaine d’années. Selon nos sources, les causes qui ont mené à cette situation ne datent pas d’hier. Il s’agit en effet au moins de la troisième mise en tutelle de ce département au fil des ans.


La décision du conseil d’administration a été adoptée lors de son assemblée ordinaire du 22 mars dernier.

La résolution indique qu’un mandat donné à une consultante externe fait état d’une «dynamique départementale dysfonctionnelle», de «mécanismes de coordination inefficaces» et «d’une insatisfaction généralisée».



Selon nos sources, le malaise proviendrait du fait que le département n’arrive pas à conserver une stabilité à la direction départementale. Selon les règles du réseau de l’Université du Québec, cette personne doit être élue par le département, mais il semble que la perle rare soit difficile à trouver. «La tâche est extrêmement lourde», confie notre source. «Notre département est le plus gros de l’UQTR, mais on n’a pas droit à plus de ressources que d’autres. En plus, nos programmes sont dictés par le gouvernement, donc, il y a énormément de pression de l’interne, de l’externe, des conflits qui perdurent depuis 15 ans, donc à chaque fois qu’on met un professeur là, il démissionne», dit-elle.

Le président du Syndicat des professeur(e)s de l’UQTR, Gilles Bronchti, ajoute que ces particularités font en sorte «qu’il faille presque tout abandonner quand on devient directeur ou directrice de ce département et ça, tout le monde n’est pas capable de ça. Tout le monde ne veut pas», indique-t-il.

Cette absence d’une direction stable donne lieu à des tiraillements internes, selon nos sources, au point de générer du harcèlement, des congés de maladie et des démissions tout en faisant en sorte que les professeurs ne demeurent pas longtemps en poste. «Les gens s’arrachent les budgets. En 2020, ça a commencé à sérieusement dérailler», nous confie-t-on.

Selon nos informations, cette situation n’affecte pas la réussite des étudiants. «Nos étudiants réussissent. Ils sont dans les meilleurs à l’examen de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec. Nous avons au-dessus de 1200 étudiants en sciences infirmières inscrits dans une dizaine de programmes différents et ça marche. Nous avons des chercheurs performants. De façon paradoxale, il n’y a pas de direction, mais nous avons de belles réussites», tient à souligner une source interne du département qui a demandé à conserver l’anonymat. Malgré tout, les étudiants «n’ont personne pour les accueillir quand il y a des problèmes», dit-elle. «Les programmes ne sont pas arrimés entre eux parce qu’il n’y a personne pour prendre de décisions. C’est souffrant pour les étudiants», fait-elle valoir.



Cette personne signale toutefois que le département, qui compte en moyenne une trentaine de professeurs, «n’arrive pas à garder son personnel non plus. Les professeurs viennent passer quelques années et sans soutien, ils s’en vont dans d’autres universités», constate cette personne avec désarroi.

Ce phénomène, selon nos sources, serait dû au manque de soutien qui génère une mauvaise atmosphère. «Quand il y a des projets à mettre en place, il n’y a personne pour décider. Ça tiraille d’un bord, ça tiraille de l’autre» ajoute notre source en précisant que plusieurs démissions sont survenues à la Clinique Apprentissage en sciences infirmières (CASI) aussi.

Selon nos informations, plusieurs tentatives pour redresser la situation ont été faites par l’Université, au fil des ans, mais sans succès.

Il y a toutefois une leur d’espoir. L’UQTR déploie en effet non pas une, mais trois personnes pour soutenir le département au niveau des ressources humaines et de la gestion des conflits notamment, indique notre source. «L’Université nous tend la main. Je pense que c’est sincère», dit-elle. En ce moment, «l’atmosphère est difficile. Quand il n’y a pas de patron, il a toujours des sous-patrons, une sous-structure qui s’est créée avec des gens qui ont acquis du pouvoir et qui mènent la barque comme ils veulent», déplore-t-elle.

Le président du Syndicat des professeur(e)s de l’UQTR s’inquiète du fait qu’il y ait mise sous tutelle du département, donc qu’on enlève les droits de l’Assemblée départementale, car les départements sont souverains, explique-t-il. «Nous allons être très proches des professeurs pour voir que tout se passe le mieux possible, mais nous avons beaucoup d’espoir que ce soit pour un mieux.»

Selon lui, ce sera une occasion de «réfléchir à d’autres façons de faire».

L’UQTR n’a pas voulu nous accorder d’entrevue à ce sujet. «Il s’agit d’une procédure administrative que nous traitons à l’interne. Cela ne remet aucunement en doute l’excellence de la formation et du soutien que nous offrons à nos étudiantes et nos étudiants, ni la qualité de nos activités de recherche. D’ailleurs, l’UQTR s’illustre chaque année à l’examen professionnel de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec grâce à la performance exceptionnelle de ses étudiantes et étudiants», a rappelé le porte-parle de l’UQTR, Jean-François Hinse du service des communications.