M. Ricard le reconnaît d’emblée: il ne débarque pas en terrain inconnu. Cela fait déjà plusieurs années qu’il travaille sur une base régulière au quartier général de l’APPQ, à Sainte-Julie. Avant d’accéder à la présidence de l’Association, il en a été le vice-président. Il a également été représentant de la Mauricie au sein de l’APPQ, en plus de participer aux dernières négociations de la convention collective des policiers de la SQ.
Ce qui ne veut pas dire pour autant qu’il compte se tourner les pouces au cours des quatre ans que durera son mandat. Parmi les dossiers auxquels il compte s’attaquer, il évoque d’abord celui de la santé psychologique des policiers et policières.
«C’est difficile d’avoir des services spécialisés, surtout avec plusieurs points de services répartis à travers la province. Présentement, on a un système qui ne fonctionne pas vraiment. On en parle dans notre livre vert, dont on va faire la présentation prochainement», annonce-t-il.
M. Ricard aimerait que l’organisme La Vigile, dont les services sont adaptés aux personnes qui portent l’uniforme, que ce soit des agents de la paix, des militaires, des ambulanciers ou des pompiers, soit en charge de fournir le soutien demandé par les agents de la SQ. Selon lui, il offrirait de meilleurs services que l’organisme qui remplit actuellement ce mandat pour la SQ.
Plus de détresse chez les policiers
Si ce soutien est nécessaire, probablement plus aujourd’hui qu’avant, c’est que les policiers d’aujourd’hui doivent endurer davantage de stress et une charge de travail beaucoup plus lourde qu’auparavant. Selon M. Ricard, les policiers doivent composer avec des procédures judiciaires beaucoup plus complexes aujourd’hui, ce qui implique davantage de rapports à rédiger et des interventions qui, elles aussi, sont de plus en plus complexes, notamment lorsque la question de la santé mentale est impliquée. Sans compter que les policiers sont fréquemment filmés par des citoyens lors de leurs interventions et peuvent se retrouver partout sur les réseaux sociaux.
«Les agents sur le terrain, il faut se rappeler que ce sont aussi des pères et des mères de famille. De se faire filmer, hors contexte, pour que cet extrait soit ensuite diffusé, ça peut avoir des impacts, notamment au niveau familial. Nous, on est là (pendant l’intervention), on comprend ce qui se passe, mais on est souvent jugés sur des bouts de vidéos, avec les réseaux sociaux qui s’enflamment, mais quand on explique les choses, les gens comprennent souvent mieux pourquoi tel ou tel geste a été posé», explique M. Ricard.
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Le policier, qui compte 23 ans de carrière en uniforme, souhaite d’ailleurs que l’APPQ et les organisations policières, dont la SQ, en fassent davantage pour expliquer à la population les subtilités et les difficultés du métier de policier.
Un autre facteur qui peut générer beaucoup d’anxiété chez les policiers est le délai lorsqu’une enquête est menée sur certaines interventions, notamment par le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI). Celui-ci doit automatiquement ouvrir une enquête dès qu’un civil est gravement blessé ou tué au cours d’une intervention policière, entre autres choses.
«La moyenne au niveau du BEI, c’est 18 mois d’attente avant d’avoir une décision, avant de savoir si des accusations seront portées ou non. On a des gens, dont la majorité n’ont pas d’accusations qui seront portées contre eux, qui attendent, et attendent encore. Ça crée une immense pression psychologique», souligne M. Ricard.
Ce dernier demande donc qu’avant de complexifier encore davantage le mandat du BEI, ce qui est selon lui dans l’air en ce moment, il en soit fait davantage pour réduire ces délais.
Manque d’effectifs et retards dans la formation
Deux autres dossiers qui tiennent à cœur au policier shawiniganais sont le recrutement et la formation des policiers. L’APPQ croit en effet qu’il faudrait engager plus de 300 patrouilleurs supplémentaires pour revenir au ratio de policiers par 1000 habitants, qui était de 1,28 il y a une vingtaine d’années. Ce ratio a diminué depuis, notamment en raison de compressions budgétaires.
Quant à la formation, M. Ricard souhaite travailler pour qu’elle soit dispensée plus rapidement, ce qui implique d’avoir davantage de formateurs.
«Il y a de plus en plus de formations à donner. Seulement au niveau des armes intermédiaires: quand j’ai commencé à travailler, on avait seulement le poivre de cayenne et l’arme à feu. Aujourd’hui, on a ajouté le bâton télescopique et le pistolet à impulsion électrique (taser). Mais à chaque fois, il faut suivre une formation, et il y a des requalifications. Ça prend une capacité de diffusion de la formation supplémentaire, sinon, c’est trop long. Le temps qu’on fasse le tour de tout le monde, il y a déjà d’autres formations qui s’ajoutent», affirme-t-il.
«On a regardé ce qui se faisait ailleurs, notamment à Vancouver. La formation s’en vient, elle est en période de rodage. Je crois qu’elle est très intéressante et même révolutionnaire par rapport à l’intervention. Elle va donner de nouveaux outils aux policiers», se réjouit-il.