Le juge de la Cour supérieure Dominique Goulet n’est pas tendre à l’endroit de l’attitude de la mère de jumeaux nés en 2018, qu’il a déclarée coupable d’outrage au tribunal, la semaine dernière à Gatineau.
«Le recours à l’outrage au tribunal constitue, et particulièrement en matière matrimoniale, l’arme ultime, le dernier rempart contre l’indifférence ou le mépris à l’égard des ordonnances rendues, lit-on dans la décision. Il s’agit d’une mesure exceptionnelle. Toutefois, il peut arriver des situations où malgré toute la retenue ou la réserve rattachée à la matière sous étude, l’outrage n’en demeure pas moins la seule avenue viable. Le présent jugement traite d’une telle situation.»
Les jumeaux sont nés après une «brève relation» entre leurs parents, qui n’ont jamais fait vie commune. «Malheureusement, il appert que la [mère] fait tout pour exclure le [père] de la vie des enfants», relate le juge Goulet.
L’homme a été déclaré père des jumeaux en juin dernier – après un test d’ADN –, alors qu’il n’avait toujours pas vu ses fils.
L’homme a cru pouvoir «enfin établir un contact avec ses enfants» à la suite d’une entente prévoyant des accès supervisés pendant trois mois. Mais la mère a encore une fois refusé de collaborer.
Un «présumé test de dépistage» de la COVID-19
«Toutes les raisons sont bonnes pour éviter les accès dont notamment la pandémie [de] COVID-19, souligne la décision. La [mère] est même allée jusqu’à prétendre avoir été en contact avec une personne déclarée positive. Elle a donc allégué devoir subir elle-même un test de dépistage. Dans ce contexte, il ne pouvait pas y avoir accès selon elle.»
En août dernier, un autre juge a ordonné que le père puisse avoir accès aux enfants et que la mère fournisse les résultats de son test de dépistage.
«Les résultats de test n’ont pas encore été communiqués et les accès n’ont pas été respectés à ce jour, indique la décision. Voilà pourquoi une demande pour citation à comparaître afin de répondre à une accusation d’outrage a été déposée et accueillie par le Tribunal.»
Cette mesure d’emprisonnement est nécessaire en raison du mépris flagrant de la [mère] à respecter les ordonnances rendues, de sa désobéissance systématique et de son comportement passé.
La mère ne s’est toutefois pas présentée à l’audience prévue le 6 octobre, souligne le juge Goulet. «Par un subterfuge, le matin de l’audience, la [mère] réussit à faire faux bond à l’officier exécutant et elle ne se présente pas pour répondre à l’outrage.»
Selon le juge Goulet, il est évident que la mère connaît les ordonnances du tribunal et qu’elle évite «intentionnellement» de les respecter. Le magistrat souligne que la mère «met tout en œuvre pour arriver à ses fins, soit éviter la création d’une relation entre le père et les enfants».
Une amende de 1000$ lui a donc été imposée à titre de «sanction de nature punitive» à l’outrage au tribunal.
La mère devra aussi passer trois jours consécutifs dans un établissement de détention «à titre de mesure coercitive» visant à lui faire respecter les accès accordés au père.
«Mépris flagrant»
«Cette mesure d’emprisonnement est nécessaire en raison du mépris flagrant de la [mère] à respecter les ordonnances rendues, de sa désobéissance systématique et de son comportement passé», précise le juge Goulet. Ce dernier rappelle qu’un autre outrage au tribunal avait été prononcé dans ce dossier lorsque la mère refusait d’obtempérer aux ordres de la cour au sujet du test d’ADN.
«Le Tribunal ne peut passer sous silence la gravité des gestes reprochés puisque les agissements de la [mère] et son mépris des ordonnances empêchent le [père] d’avoir accès aux enfants et privent les enfants de leur droit de bénéficier d’une relation avec leur père», souligne aussi la décision.
Une fois sa peine de détention purgée, la mère devra par ailleurs retourner devant le tribunal «afin qu’elle explique qu’elle a obéi ou entend obéir aux ordonnances.
Avec Louis-Denis Ebacher, Le Droit