Stéphane Turcot et Annie Vincent ont ouvert leur épicerie en vrac à Trois-Rivières au mois de mars, soit en plein confinement gouvernemental. Une de leurs employées, Karelle Massy, est une personne malentendante. L’imposition du port du masque à l’intérieur des commerces a compliqué la vie des gens comme Mme Massy.
«J’ai des appareils auditifs, raconte-t-elle, mais j’ai besoin de lire sur les lèvres. J’entends tout, mais ça ne veut pas dire que je comprends tout. Le port du masque me stressait beaucoup pour mon travail et aussi quand je vais faire l’épicerie. Même les personnes entendantes ont de la misère à comprendre quand on parle à travers un masque. Mon employeur est très compréhensif et voulait que je travaille même avec le port du masque.»
Pour M. Turcot, il était hors de question de remercier une aussi bonne employée à cause d’une difficulté de communication. Il fallait trouver une solution pour améliorer la situation.
«On le savait que ça poserait problème, car elle lit sur les lèvres. Avant (l’obligation du port du masque), elle demandait aux gens de l’enlever. Mais maintenant que c’est obligatoire, on a trouvé une alternative. Karelle nous a montré un prototype de ce genre de masque. On les a achetés pour pouvoir communiquer entre nous afin que Karelle comprenne nos directives. Et ça a connu un succès monstre auprès de la clientèle qui voulait acheter ce masque.»
C’est la raison pour laquelle les entrepreneurs ont commandé une trentaine de masques munis de cette pellicule plastique transparente située face à la bouche. Selon M. Turcot, le commerce écoule des masques chaque jour.
«On s’attend à un boom, croit M. Turcot. Au-delà des personnes sourdes, il y a des professeurs du primaire qui sont venus en acheter pour avoir un contact d’expression avec leurs jeunes à la prochaine rentrée scolaire.»
«C’est le fun de voir ça. Ça me touche de voir que les gens sont compréhensifs par rapport à ça», confie Mme Massy, tout en soulignant la gentillesse des clients de M. Vrac à son égard.
L’initiative de la direction de M. Vrac va aussi aider la Fondation Interval. Pour chaque masque à fenêtre vendu 15 $, un dollar sera remis à cette fondation.
«Ça fait quelques jours qu’on a commencé l’initiative et on s’attend à remettre entre 300 $ et 500 $ à la fondation d’ici la fin de l’automne. Tant que la directive du port obligatoire du masque va être là, on va être confiant d’atteindre notre objectif. On a trouvé cette initiative. Pourquoi ne pas la partager?», poursuit Stéphane Turcot.
Ce partenariat avec M. Vrac réjouit la Fondation Interval, dont les activités de financement sont annulées en temps de pandémie.
«L’argent amassé nous permet d’offrir de l’aide financière aux usagers pour bénéficier d’une meilleure qualité de vie et de plus d’autonomie. Le port du masque obligatoire apporte des lacunes au niveau de la communication. La beauté de la chose est que cette initiative fait une communauté plus inclusive. On combine l’achat local et la philanthropie», déclare la directrice de la Fondation Interval, Roxanne Lemay.
Selon le Réseau québécois pour l’inclusion sociale des personnes sourdes et malentendantes, environ 10 % de la population se présente comme étant sourde ou malentendante.
Le même organisme avance que 25 % de la population vit avec une déficience auditive. Ce pourcentage augmente à 65 % chez les gens de plus de 70 ans.