Quatre femmes de la région, toutes spécialisées en relation d’aide, ont constaté, chacune de leur côté, les besoins énormes des personnes endeuillées, car beaucoup de personnes n’osent pas accabler leur entourage avec leur plaie intérieure. Ces femmes ont décidé de consacrer leur carrière à accueillir ces gens pour les aider. Loin d’offrir une thérapie psychologique, elles offrent plutôt une oreille attentive neutre et s’il le faut, elles recommanderont la personne endeuillée aux ressources dont elle a besoin.
Anik Bertrand est travailleuse sociale et travaille surtout en deuil périnatal et deuil d’enfant. Ginette Chapdelaine est célébrante funéraire et peut accueillir des personnes endeuillées de toutes les dénominations et croyances. Karine Leclerc, elle, accompagne le deuil en fin de vie et Josée Maltais est éducatrice spécialisée et travaille en suivi de deuil.
C’est cette dernière qui a d’ailleurs initié l’équipe La Cellule du deuil. Lorsqu’elle a commencé à s’intéresser aux personnes endeuillées, «dès la première journée, je me suis rendu compte que c’était beaucoup trop vaste, qu’il y avait beaucoup trop de demandes pour ce que je pouvais combler», raconte-t-elle.
Rapidement, les quatre femmes ont uni leurs forces «pour se référer, s’aider et se stimuler.» Quelques jours à peine après son ouverture, la page Facebook La Cellule du deuil comptait déjà 800 abonnés, un nombre qui ne cesse de croître depuis.
La Cellule du deuil est une entreprise et non un service à but non lucratif, précisons-le. Le service est donc payant. Toutefois, La Cellule du deuil offre aussi des cafés-rencontres gratuits et le 29 août, à 19 h, une activité d’environ une heure sur le deuil sera également offerte gratuitement à tous au Sanctuaire Notre-Dame-du-Cap.
Intitulée Hommage à nos deuils — rendez-vous avec nos étoiles, cette activité «n’est pas une séance de gratte-bobo et personne ne sera forcé de parler en avant», assure Josée Maltais. La célébration n’est associée à aucune religion ou croyance. Il s’agira de créer de nouveaux souvenirs et d’apaiser la souffrance de son ou ses deuils. L’activité se terminera par une marche dans les jardins du Sanctuaire en compagnie de Christian Haerinck et sa cornemuse.
Les quatre femmes travaillent souvent en collaboration avec des psychologues à qui elles recommandent certaines personnes. Elles travaillent également avec divers organismes. Anik Bertrand, par exemple, collabore avec Le Papillon bleu, un organisme en deuil périnatal en Mauricie qui est rattaché à Maternaide. «Une grossesse sur cinq se termine en fausse-couche», rappelle-t-elle pour montrer jusqu’à quel point les besoins sont importants.
Karine Leclerc travaille avec la méditation, l’hypnose et les groupes de deuil. «Je fais des textes, aussi, pour apporter des mots à ceux qui en manquent», dit-elle. Ces mots peuvent être fort importants puisque les victimes du deuil doivent souvent composer, dans leur entourage, avec des phrases assassines du genre: ‘‘Ça fait trois semaines qu’il est mort, reviens-en’’, ou encore ‘‘Ma belle-soeur a fait des fausses-couches et ça ne l’a pas affectée, elle.’’
«Il n’y pas deux deuils pareils», dit-elle. Certains endeuillés auront des pertes de mémoire. Le sommeil est atteint. Il peut y avoir de l’irritabilité, la dépression. Certaines personnes deviennent moins fiables, moins cohérentes dans ce qu’elles vous disent ou ressentent», explique Mme Maltais. La durée des symptômes peut varier d’une personne à l’autre.
La Cellule du deuil s’intéresse aussi au deuil vécu par ceux et celles qui perdent un animal de compagnie. «Il faut le traiter de la même façon», indique Mme Maltais. «En fait, le mot deuil peut être changé par le mot perte.» Ça peut être la perte d’un emploi, un déménagement non souhaité, la perte de collègues de travail appréciés, une peine d’amour ou d’amitié.
«L’activité Hommage à nos deuils consistera à déposer nos deuils devant la table et à aller chercher les forces qui nous ont portés et les ressources qu’on est allé chercher», résume Ginette Chapdelaine.
«Les larmes, c’est de l’eau salée. Ça purifie, ça nettoie», plaide Mme Maltais. «Pleurer pour les bonnes choses diminue la douleur», fait valoir Mme Maltais. «Si l’on évite de parler de quelque chose, c’est comme si l’on mettait le couvercle sur une marmite qui bouille», ajoute Mme Leclerc. «Cette soirée-là, c’est un pas de plus vers la vapeur qui s’échappe.
Les quatre membres de la Cellule du deuil entendent répéter cette activité une fois l’an.