Le projet de loi C-71 a été déposé en mars. Il a été adopté à la Chambre des communes le 24 septembre dernier, mais n’a pas encore franchi l’étape de la deuxième lecture au Sénat.
«Constamment, on doit revenir pour parler de la question des armes à feu. C’est la nécessité qui nous oblige à venir ici, ce n’est pas parce qu’on le veut vraiment. On n’est pas un club qui se réunit pour le plaisir de se réunir. On vient ici parce qu’il y a une cause à défendre», soutient Serge St-Arneault.
La porte-parole du groupe Polysesouvient, Heidi Rathjen, considère le projet de loi comme «un strict minimum», mais elle souhaite le voir adopté «le plus rapidement possible».
Elle n’a pas trop voulu spéculer sur les raisons qui expliquent cette progression qu’elle juge trop lente, mais elle a pointé du doigt le lobby pro-armes.
Mais les sénateurs sont nommés, et ne sont donc pas soumis aux mêmes pressions que les députés qui cherchent à se faire réélire, ont argué tour à tour les représentants des groupes. Serge St-Arneault les a donc mis au défi.
«Ne faites pas de compromis. Et montrez aux députés comment on se tient debout quand on n’a pas peur du lobby des armes», a plaidé M. St-Arneault.
Ce dernier soutien également les chasseurs n’ont rien à craindre de cette loi.
«Ce que l’on dénonce c’est la vente, pratiquement libre sur le marché, d’armes d’assaut, d’armes de guerre, d’armes militaires… Ce type d’armes peut être vendu pratiquement sans contrôle. C’est une aberration.[…] Les chasseurs n’utilisent pas des armes d’assaut pour aller à la chasse. Ce serait complètement stupide. On ne tue pas un orignal avec une mitraillette. Il faut être logique. Cette loi est pour protéger la population», note M. St-Arneault.
En plus de réclamer l’adoption rapide de C-71, les représentants des groupes priaient les sénateurs de le «renforcer» avec trois amendements.
Ils réclament notamment de rétablir des contrôles sur les ventes privées et de «permettre l’accès facile et rapide» aux données sur les ventes d’armes pour les autorités policières.
Et on croise les doigts pour que le gouvernement de Justin Trudeau bouge rapidement, avant la fin de son mandat, dans le dossier des armes de poing et d’assaut.
Autrement, les libéraux auront rompu un engagement contenu dans leur plateforme électorale de 2015, a insisté Heidi Rathjen.
«Les libéraux ont promis de sortir de nos rues les armes de poing et les armes d’assaut», a-t-elle fait valoir.
Le gouvernement a lancé en octobre dernier une consultation sur la possibilité d’interdire les armes de poing et les armes d’assaut au Canada.
La démarche arrive «très tard dans le processus», mais «c’est techniquement possible d’avoir des changements avant les prochaines élections», a suggéré Mme Rathjen.
Le Latuquois Serge St-Arneault a également invité la population à se manifester afin de soutenir leur démarche.
«On invite les gens à soutenir notre cause et militer pour un meilleur contrôle des armes à feu et retirer surtout du marché légal, la vente d’armes d’assaut et de poings qui sont de portée militaire», a-t-il lancé.
Pratte veut rassurer
Le sénateur indépendant André Pratte, parrain du projet de loi au Sénat, dit comprendre le sentiment d’urgence exprimé lundi, mais il juge que C-71 progresse somme toute assez bien.
Il se dit confiant que la mesure législative sera envoyée en comité avant le congé des Fêtes, et qu’elle sera adoptée à l’hiver et au printemps.
«C’est sûr qu’on s’impatiente, et que ça concerne la vie des gens, donc on voudrait tous que ce soit adopté le plus rapidement possible et que ce soit le régime le plus fort possible», a-t-il dit.
Selon lui, le projet de loi jouit d’un très bon appui dans le camp des sénateurs indépendants. En revanche, dans les banquettes conservatrices, on est «fermement opposé», a-t-il convenu.
Le sénateur Pratte a par ailleurs confirmé que le lobby pro-armes s’est «beaucoup activé» en «inondant» de courriels et de lettres les membres de la chambre haute.
«Ils ont même publié un livre à ce sujet-là, «The Bill C-71 Book», alors ils ont travaillé très fort», a-t-il illustré.
Amendements: Goodale sceptique
Le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a dit craindre que l’ajout d’amendements puisse retarder l’adoption du projet de loi.
«À ce moment-ci du processus, il serait potentiellement très difficile de rouvrir le projet de loi dans le sens que cela retarderait (l’adoption)», a-t-il exposé en mêlée de presse, lundi.
Le ministre n’a toutefois pas voulu se prononcer sur les amendements en tant que tels, n’ayant pas eu le temps d’en prendre connaissance au moment de répondre aux questions des médias.