La nouvelle traduction du «Notre Père» nous rapproche de l’enseignement de Jésus

D’un point de vue pastoral, l’auteur croit néanmoins que l’adoption de cette nouvelle traduction par les communautés chrétiennes reflète le cheminement d’une Église qui cherche à évoluer dans sa fidélité à l’Évangile.

L’auteur, Mgr André Gazaille, est évêque du diocèse de Nicolet.


Dès le premier dimanche de l’Avent, soit le 2 décembre prochain, un verset de la prière du Notre Père sera récité dans une nouvelle traduction par les assemblées catholiques francophones du Canada, incluant toutes les paroisses du diocèse de Nicolet. La sixième et avant-dernière demande adressée à Dieu se lira désormais «ne nous laisse pas entrer en tentation», en remplacement de la traduction en usage depuis 1966 «ne nous soumets pas à la tentation».

Ce changement dans la liturgie catholique poursuit deux objectifs: le premier est de rendre cette prière plus fidèle à la version grecque du texte de l’Évangile, la plus ancienne que nous connaissions; le second est d’éviter une compréhension erronée selon laquelle la «tentation» serait l’œuvre du Père pour nous éprouver.

Dans la lettre de saint Jacques, il est dit clairement: «Dans l’épreuve de la tentation, que personne ne dise: “Ma tentation vient de Dieu”, Dieu, en effet, ne peut être tenté de faire le mal, et lui-même ne tente personne» (Jc 1,13). La nouvelle formulation du Notre Père est donc moins susceptible d’induire une fausse compréhension, puisque l’expression “ne nous laisse pas entrer en tentation” écarte l’idée que Dieu lui-même pourrait nous y soumettre.

Pour les catholiques qui auront à vivre cette transition, j’aimerais souligner que les évêques du Canada ont promulgué ce changement en unité avec toute la francophonie. Depuis juin 2013, le texte de la Bible de la liturgie – celle qu’on utilise généralement pour proclamer la Parole de Dieu dans les assemblées – a été entièrement révisé. Sa traduction modifiant la prière du Notre Père, dans l’Évangile, a été approuvée par la Congrégation pour le culte divin de l’Église catholique. Depuis, d’autres conférences épiscopales francophones l’ont adoptée dans la liturgie, dont celles de la France, de la Belgique, du Bénin et de la Suisse romande. La Conférence des évêques catholiques du Canada, secteur francophone, a entériné son adoption le 26 septembre dernier, en assemblée plénière.

En tant qu’évêque, il me semble tout naturel de promouvoir cette version auprès des fidèles, puisqu’elle traduit mieux l’esprit de la prière enseignée par Jésus à ses disciples, tel que le décrivent les récits des évangélistes Matthieu et Luc. Ce verset ainsi traduit reflète d’une manière plus juste la figure du Père bienveillant envers tous ses enfants; c’est ainsi que Jésus lui-même nous décrit Dieu dans son enseignement.

J’encourage donc tous les croyants qui prient le Notre Père à adopter l’expression «ne nous laisse pas entrer en tentation» en toutes circonstances, incluant leur prière personnelle. Toutefois, les catholiques qui ont prié Dieu dans une autre version, depuis leur enfance, peuvent continuer de le faire dans l’intimité de leur cœur, sans crainte de commettre une faute.

D’un point de vue pastoral, je crois néanmoins que l’adoption de cette nouvelle traduction par les communautés chrétiennes reflète le cheminement d’une Église qui cherche à évoluer dans sa fidélité à l’Évangile. C’est pour cette raison que les gens de plus de 60 ans, comme moi-même, en viennent aujourd’hui à formuler, avec la communauté des croyants, une troisième version du Notre Père, la prière que tous les chrétiens adressent à Dieu avec confiance.