«On peut changer le climat»

Gilles Brien est météorologue et spécialisé en biométéorologie.

Trois-Rivières — Quand il est question de réchauffement climatique, le météorologue Gilles Brien voit «l’éléphant dans le magasin. C’est quelque chose de réel», assure-t-il «et c’est un problème très grave pour l’humanité.»


Il y a toutefois un gros «mais» dans son analyse de la situation. «Dire que c’est le problème le plus pressant, là, ça vient heurter le bon sens», croit-il.

Après avoir publié son premier livre, Le baromètre humain, le biométéorologue vient de lancer un deuxième ouvrage, Ce qu’on ne vous dit pas sur le changement climatique, dédié cette fois-ci à la climatologie, un sujet sensible et controversé dont il souhaite déboulonner les mythes et dépoussiérer la rhétorique politique.

Malgré toute la gravité du changement climatique pour l’humanité et même pour les écosystèmes planétaires, «c’est la pollution qui tue 8 millions de personnes par année», plaide-t-il. «C’est ça le plus grave problème de l’humanité», estime-t-il. Et c’est, selon lui, celui dont on parle le moins.

Sur le plan individuel, il y a beaucoup à faire pour contrer la pollution et les changements climatiques, dit-il. Pas besoin d’être riche et de s’acheter une voiture électrique pour y arriver.

Diminuer, voire éliminer sa consommation de viande, par exemple, a un impact très important, explique-t-il. «Les gaz à effet de serre libérés pour élever du bétail, c’est plus que toutes les autos, tous les camions de transport», affirme-t-il. «Manger moins de viande est encore plus efficace que l’achat local», affirme-t-il.

«Un seul cheeseburger génère à peu près l’équivalent de 15 kilomètres en voiture» en termes de gaz à effet de serre, illustre le météorologue. C’est sans compter la pollution de l’eau.

Donc, «les masses peuvent agir. On peut changer le climat; on peut changer le monde, si l’on veut, pour nos enfants. C’est ça, le message de mon livre», dit-il.

Bref, l’auteur lance un véritable plaidoyer en faveur de la responsabilisation tant individuelle que collective face à ce phénomène menaçant.

Le météorologue constate avec horreur la dérive du discours en matière de climatologie. Le sujet, constate-t-il, est amplement récupéré à la fois par les politiciens et les groupes écologistes, selon lui. 

«La fin du monde n’est jamais très loin dans le discours des écologistes militants extrémistes. Le changement climatique est récupéré par des groupes d’intérêt pour étirer ça à n’importe quelle sauce», dit-il.

«C’est devenu une religion, le changement climatique», analyse-t-il.«On entend des termes comme: "je ne crois pas à ça"», or, la croyance ne devrait pas faire partie de la science, plaide l’auteur en ajoutant qu’aussi, malheureusement, «la peur fait beaucoup partie du discours sur le changement climatique.» Or, la peur ne donne pas de pouvoir aux citoyens.

Dans l’arène du changement climatique, dit-il, «il y a les scientifiques qui font des prévisions de 100 ans, mais qui ont de la difficulté à faire de la météo sur 10 jours», dit-il. 

Dans cette même arène, il y a aussi les industriels. «On compte sur les industriels pour nous donner la vérité sur les gaz à effet de serre libérés par leurs produits, mais on a vu avec Volkswagen qu’on se fait pas mal rouler dans la farine», rappelle-t-il. Quant aux écologistes, dans cette arène, «ils veulent rééduquer le citoyen et culpabiliser la responsabilité individuelle. On n’a pas vu ça dans d’autres préoccupations scientifiques. C’est nouveau, ça», dit-il.

«Il y a une dérive dans le discours et de la poudre aux yeux», croit-il. 

«On le voit avec les voitures électriques qui sont conçues dans le désert, aux États-Unis, à des températures de 16-18° C», dit-il. Ces voitures n’ont pas été pensées pour le climat rigoureux hivernal du Québec, dit-il et n’apportent donc pas présentement une véritable solution globale au problème du réchauffement climatique. 

Il y a aussi la fameuse bourse du carbone qui n’est, en fait, qu’un «permis de polluer», selon son analyse. «Tant que la Chine et les États-Unis n’embarquent pas, ces petits marchés-là, ça ne donne rien», fait-il valoir.

Selon Gilles Brien, 70 % des changements climatiques actuels seraient d’origine anthropique, c’est-à-dire causés par l’humain. Or, l’humain est capable de remédier de façon importante à son influence néfaste, assure-t-il. 

À ce chapitre, le météorologue rappelle deux problèmes survenus dans les années 1970 et qui ont été «réglés par l’humanité», celui des pluies acides créées par les centrales au charbon dans le bassin des Grands Lacs qui faisaient craindre le pire pour les lacs et les érablières du Québec ainsi que la menace posée par le trou dans la couche d’ozone généré par l’utilisation des CFC dans les aérosols, un problème réglé grâce au Protocole de Montréal, rappelle l’auteur.

«Quand les pays travaillent ensemble, on peut régler des dangers», résume-t-il. «Le changement climatique, c’est la même chose. «Avec plus de bonne volonté, plus de temps sûrement, on peut le régler», assure-t-il. «La première chose à faire, c’est de changer le discours», résume-t-il.