Les 50 ans de pérégrinations d'un «normalien» de Trois-Rivières

Le général Charles De Gaulle à Expo 67 à Montréal.

Cette fin de semaine, dans les locaux du Cégep, boulevard Laviolette, les étudiants de l'ancienne École normale Maurice-L.-Duplessis (intégrée en 1969 à la Faculté d'éducation de l'UQTR), promus bacheliers en pédagogie en 1967, se réunissent sur les lieux mêmes de leur alma mater. L'un d'eux, journaliste en France depuis une vingtaine d'années, livre quelques souvenirs en lien avec cette année mémorable.


À cette époque, Canadien-français et Québécois né quelques mois à peine après la fin de la Seconde Guerre mondiale, à mes yeux, les deux plus illustres Français du 20e siècle étaient Antoine de Saint-Exupéry et Charles de Gaulle. Mes études de littérature et d'histoire, surtout à l'École normale, m'avaient permis de les connaître et de découvrir leur rayonnement.

Or, les deux sont précisément venus au Québec en 1967. Le premier, à titre posthume, en prêtant le titre de l'un de ses romans devenu le thème de l'Exposition universelle de Montréal: Terre des hommes



Journaliste étudiant et détenteur d'une carte de la Presse étudiante nationale du Québec, j'avais présenté cet événement marquant de l'histoire du Québec, sur les deux pages centrales de l'édition du 26 octobre 1966 de l'Engagé, le journal fondé par les étudiants de notre institution. Cet article, illustré par de nombreuses photos, faisait place à de nombreuses citations tirées de Terre des hommes.

Un certain 28 avril

L'Expo a ouvert ses portes le 28 avril 1967. Ce jour-là, je m'étais rendu à Montréal, «sur le pouce», pour assister à l'inauguration officielle. Rendu sur place, je suis monté tout en haut d'une pyramide inversée nommée Katimavik, mot inuit qui signifie «lieu de rencontre» et, regardant les pavillons des pays présents «sur nos îles», j'ai ressenti un vif désir de vivre un jour, dans ma vie, une dimension internationale. 

Dix ans plus tard, presque jour pour jour, je commençais une carrière d'une vingtaine d'années, au ministère de l'Immigration du Québec, comme professeur de français aux nouveaux arrivants venus chez nous. Pendant toutes ces années, au quotidien, j'ai vécu au contact de gens de toutes langues, races, peuples, nations et religions provenant des quatre coins du monde. Puis, trente ans plus tard, en juillet 1997, je quittais le Québec pour devenir à mon tour immigrant, accueilli en terre de France.



Le «Vive le Québec libre»

En ce qui concerne De Gaulle, la date-clé demeure le 24 juillet 1967. Je me souviens de l'émotion ressentie en voyant le drapeau français flotter sur l'édifice situé au coin des rues Saint-Maurice et Laviolette et des deux petits drapeaux, français et québécois, que l'on nous remettait, avec le conseil de bien les agiter au passage du Général.

En matinée, à la radio, j'avais écouté ses discours prononcés dans les villes ou villages étapes sur le chemin du Roy, depuis Québec.

J'avais remarqué que, au «Vive la France», il avait ajouté «Vive le Canada», puis «Vive le Canada français». À Trois-Rivières, dans la cour du Séminaire Saint-Joseph, vers 12 h 30, il avait ajouté, pour la première fois, «Vive le Québec».

De retour dans ma famille, pour le dîner, j'avais dit à mon père: «Ce soir, à Montréal, il va dire: "Vive le Québec libre."» Mon père m'avait répondu que c'était impensable, impossible. En entendant le célèbre cri du balcon de l'hôtel de ville de Montréal, comme de nombreux compatriotes, j'ai jubilé.

Comme le chantait Beau Dommage, 1967, c'était «l'année de l'Expo»!



Michel Lemay

Blois, France