Steve Bégin: une histoire de résilience et de détermination

Steve Bégin, retraité de la Ligue nationale de hockey depuis janvier.

C'est en lisant dans La Presse l'histoire de résilience de Steve Bégin que des employés du Centre jeunesse Mauricie et Centre-du-Québec ont tout de suite compris qu'il était le conférencier rêvé pour le tout premier Rendez-vous SOCEN, tenu cette semaine à Trois-Rivières, qui réunissait de nombreuses familles d'accueil.


Même s'il n'a pas été placé lui même en famille d'accueil durant sa jeunesse (mais son frère l'a été), l'ancien joueur de hockey professionnel raconte avoir été élevé par un père alcoolique.

S'il en est un qui peut parler de détermination, c'est bien ce jeune Trifluvien.



Nourri de chips, de boissons gazeuses et de chocolat plus souvent qu'à son tour, il prend sur lui, à neuf ans, de faire le souper, après l'école. À 10 ans, c'est lui qui fait le lavage et le ménage de la petite maison modique où il vivait de l'aide sociale avec son père, son jeune frère et sa soeur aînée.

À 12 ans, il rêvait déjà d'avoir une famille bien à lui «pour que ma famille ne manque de rien», dit-il.

Entendre cela de la bouche d'un athlète professionnel de 35 ans, aujourd'hui retraité, qui a joué pour le Canadien de Montréal, les Bruins de Boston et les Flames de Calgary, donne à réfléchir.

Cette misère dans laquelle il a grandi - au point où le propriétaire du dépanneur lui donnait de la viande pour l'aider à mieux manger - c'est le terreau dans lequel a germé le rêve fou, inaccessible et presque loufoque d'un petit gars de six ans de vouloir jouer dans la Ligue nationale de hockey. Et le plus étrange, c'est que c'est son père qui l'a pointé dans cette direction.



Grâce au travail au noir, son père lui avait même acheté un équipement de hockey de seconde main, trop grand, mais au moins, il en avait un pour aiguiser ses habiletés.

Vivre avec un père alcoolique est déjà un triste défi en soi pour un enfant et aspirer aux sports professionnels, quand on vit pauvrement, c'est un obstacle titanesque, surtout quand la «glace» est souvent, au début, le sous-sol de la maison.

Et la pauvreté ne sera qu'un obstacle parmi d'autres auxquels le jeune aspirant hockeyeur sera confronté par la suite.

Pas assez gros, pas assez grand, pas assez bon. Voilà des phrases que Steve Bégin entendra continuellement au fil des ans.

Encore là, il s'inspirera d'une certaine sagesse de son père qui, malgré son alcoolisme, lui répétera continuellement les paroles les plus importantes de sa vie: «Le succès de la réussite, c'est le travail.»

Et pas juste le travail pour gagner de l'argent. Le travail du développement de soi. «Mon père m'a inscrit à un cours de boxe quand j'avais 12 ans», raconte Steve Bégin. «Il me disait: Tu vas en avoir besoin.»



Dès le Midget AAA, le jeune Bégin est nommé capitaine pour les Estacades de Cap-de-la-Madeleine.

Aussitôt, il vise le junior. «Je n'avais besoin de personne pour me motiver. J'ai toujours été comme ça. J'avais toujours quelque chose à me prouver», dit-il.

«Un professeur m'a demandé quel était mon rêve et je lui ai répondu que c'était de jouer au hockey dans la Ligue nationale. Il s'est mis à rire vraiment fort. Il m'a dit Steve, il y a 1 % des joueurs qui jouent dans la Ligue nationale. Tu ferais mieux de commencer à étudier. Je lui ai répondu: check moi aller, tu vas être déçu.»

Fortement motivé à réaliser son rêve, il perd des amis en refusant de consommer avec eux drogues ou alcool (il avait peur de devenir alcoolique comme son père, dit-il en précisant que ce dernier ne boit plus depuis maintenant 14 ans). L'entraînement prenait toute la place dans sa vie.

Ses efforts finissent par rapporter. Les équipes juniors commencent à téléphoner chez lui. Elles perçoivent Steve Bégin comme un joueur intense, capable de frapper, capable de faire face à tout le monde, sans peur.

On le recrute chez les Foreurs de Val-d'Or. Et c'est là que la prédiction de son père s'est réalisée à propos de la boxe. Lors d'un match contre les Olympiques de Hull, il doit en effet affronter Peter Worrell, 6 pieds 6 pouces, 240 livres.

Steven Bégin, 5 pieds 11 pouces, 170 livres, n'a pas le choix. Les gants tombent...

«Ça a bien été», dit-il à la blague. «Je suis resté beau après...»



Ce «passage obligé» fut payant pour le jeune hockeyeur. «Il y avait beaucoup de dépisteurs sur place. Cette année-là, c'était mon repêchage», dit-il.

En 1996, tous les murs tombent, tous les obstacles ont été franchis à coups de détermination. Le rêve de toute une vie se réalise. Steve Bégin peut enfin faire taire les mauvaises langues et gagne son pari.