Le marché du travail se stabilise à Shawinigan

Le maire Michel Angers entend bien démontrer que c'est intéressant et payant de vivre à Shawinigan.

La dernière enquête annuelle sur la population active de Statistique Canada auprès de 46 villes au pays démontre que le marché du travail se stabilise à Shawinigan. Cependant, les départs à la retraite et le nombre insuffisant de jeunes pour prendre la relève mettront beaucoup de pression sur le taux d'activité et le taux d'emploi au cours des prochaines années.


Selon Statistique Canada, 500 emplois ont été créés à Shawinigan en 2011, un élément plutôt encourageant dans le contexte où seulement 38 500 nouveaux travailleurs ont été recensés à travers tout le Québec au cours de la dernière année. Ce bilan s'est avéré tout aussi positif pour la Mauricie, avec la création de 4200 emplois en 2011.

À Shawinigan, la population active s'est appréciée dans les mêmes proportions. Étant donné que le nombre de chômeurs est demeuré stable, le taux de chômage a légèrement fléchi au cours de la dernière année, passant de 8,5% en 2010 à 8,4% en 2011. Sur ce plan, il s'agit incontestablement de la meilleure performance de Shawinigan depuis que l'agence fédérale s'intéresse à ces données, en 1987. Traditionnellement, son taux de chômage se situe au-dessus de 10 %.

«On n'observe pas de grands changements à Shawinigan au cours de la dernière année», constate Vincent Ferrao, analyste à la division statistiques du marché du travail à l'agence fédérale. «La situation de l'emploi est restée plutôt stable, avec une légère hausse.»

Voilà un indicateur qui réjouit le maire, Michel Angers.

«Depuis 2009, sur le plan des personnes en emploi, nous suivons la même tendance que la Mauricie», observe-t-il. «Notre taux de chômage est passé de 11,7 % à 8,5 %, puis à 8,4 %. C'est très intéressant.»

Par contre, une fois de plus, Shawinigan arrive en queue de peloton en ce qui concerne le taux d'activité et le taux d'emploi. Après une encourageante embellie l'an dernier, ces indicateurs ont retrouvé la moyenne historique de l'agglomération.

Ainsi, Statistique Canada évalue le taux d'activité de Shawinigan à 49,6 % et le taux d'emploi, à 45,5 %. Dans les deux cas, il s'agit de la pire performance parmi les 46 villes comparables étudiées à travers le Canada, dont neuf au Québec.

Ces données s'expliquent notamment par une invraisemblable augmentation de la population inactive au cours de la dernière année. Selon Statistique Canada, le nombre de personnes sans emploi et qui n'en recherchent pas à Shawinigan serait passé de 20 100 en 2010 à 25 500 en 2011. Mais si on recule de cinq ans, le nombre estimé en 2011 demeure tout de même un peu plus élevé que la moyenne observée au cours de cette période.

N'empêche que la région de recensement, qui inclut également Saint-Boniface et Grandes-Piles, n'a sans doute pas absorbé 5400 personnes inactives en l'espace d'une seule année. Il reste qu'une tendance se profile et pour l'expliquer, M. Ferrao propose de jeter un coup d'oeil vers les retraités. «Ces gens se retirent complètement du marché du travail et sortent ainsi de la population active», rappelle-t-il. «J'imagine que la population des jeunes n'est pas en forte croissance non plus...»

En quittant massivement la population active tout en faisant toujours partie des 15 ans et plus dans les compilations, les retraités nuiront aux taux d'activité et d'emploi, surtout si l'arrivée des jeunes sur le marché du travail ne compense pas ces pertes. Mais sur le plan économique, cette strate apporte tout de même de l'eau au moulin, rappelle M. Angers.

«Ces gens qui quittent le marché du travail peuvent aussi contribuer au développement de l'économie», rappelle-t-il. «Ces personnes ne tombent pas automatiquement pauvres! Pour moi, les vraies statistiques sur lesquelles il faut s'appuyer, ce sont les personnes en emploi et en chômage. Ce sont des indices reconnus. Or, nous augmentons le nombre de personnes en emploi et nous diminuons celui des personnes en chômage.»

Le piège démographique

Encore une fois, le facteur démographique pèse lourd dans le bilan annuel du marché du travail à Shawinigan. Pas pour rien que le conseil municipal fait des pieds et des mains pour attirer les jeunes familles sur son territoire.

Les baby-boomers sont officiellement entrés dans leur retraite depuis 2010 et le phénomène s'accentuera au cours des prochaines années, à moins que les conditions changent. À Shawinigan, on dénombrait 9027 personnes âgées de 65 ans et plus en 1996. En 2010, l'Institut de la statistique du Québec estimait ce nombre d'aînés à 12 017, un bond de 33 % en 15 ans. Il s'agirait d'un moindre mal si les jeunes prenaient la relève, mais ce n'est pas le cas. À Shawinigan, le nombre de 15-34 ans est passé de 13 235 en 1996 à 10 163 en 2010, une chute de 23 %.

Avec moins de jeunes et plus d'aînés, le défi d'afficher un taux enviable d'activité et d'emploi à Shawinigan s'annonce assez costaud.

D'ici 2031, l'Institut de la statistique du Québec estime que l'âge médian passera de 50,1 à 54,5 ans à Shawinigan. Pour l'ensemble de la Mauricie, le même indice s'établissait à 47,1 ans en 2011 et dans 20 ans, il devrait augmenter à 51,2 ans. Au Québec, l'ISQ s'attend à ce que l'âge médian passe de 41,5 à 45,2 ans au cours de la même période.

La tendance démontre que la population de Shawinigan vieillira plus rapidement que la moyenne provinciale. L'ISQ estime la moyenne d'âge des Shawiniganais à 46,8 ans en 2011 et qu'elle franchira 51,3 ans en 2031. Au cours de la même période, l'âge moyen passera de 40,9 à 44,8 ans au Québec. Le vieillissement de la population s'accélérera encore davantage en Mauricie, puisque la moyenne d'âge devrait passer de 44,4 ans en 2011 à 49 ans en 2031, selon l'ISQ.

«Le défi sera de trouver du monde pour les emplois disponibles», résume le maire, Michel Angers. «Le vieillissement est plus accentué ici parce que ceux qui sont demeurés fidèles à la grande entreprise sont demeurés fidèles à Shawinigan. Nous avons tardé un peu à faire notre diversification économique, mais nous y travaillons. Bien sûr, des jeunes sont partis, mais notre volonté est de les rapatrier. Compte tenu du vieillissement de la population, des emplois deviendront de plus en plus disponibles.»

«Pour le même travail, la jeunesse d'aujourd'hui choisira une ville par rapport à une autre pour sa qualité de vie», croit M. Angers. «Les médecins, les infirmières et les spécialistes viennent s'établir ici en raison de la nouvelle philosophie des familles. Le travail ne passe plus nécessairement en premier. Il faut aussi garder nos jeunes en les assurant qu'il y a de l'avenir ici!»

Si on met l'évolution démographique de côté, le portrait de la population active s'améliore à Shawinigan. Au cours de la dernière année, on dénombre moins de prestataires d'assurance-emploi et de sécurité du revenu. Pendant ce temps, la population active connaissait une deuxième hausse consécutive, après une chute de 1700 individus en 2009.

Selon Statistique Canada, le nombre de bénéficiaires de l'assurance-emploi était passé de 1650 personnes à novembre 2010 à 1500 un an plus tard. Il s'agit d'une baisse de plus de 9 %.

Au cours de la même période, les centres locaux d'emploi de Shawinigan et Grand-Mère ont observé une baisse de 4 % dans leur nombre de ménages prestataires de programme d'aide financière de dernier recours, passant de 4961 à 4764. Bien que moins prononcée, la même tendance s'observe en Mauricie, avec une baisse de 2,2 % en novembre dernier par rapport à l'année précédente.

Par contre, la région occupe toujours le pire taux d'assistance sociale au Québec chez les 18-64 ans, à 10,2 % en novembre.