Construction Mont Sainte-Adèle se dit harcelée par la CCQ

Le promoteur François Veillette avec en main la lettre remise par le huissier, sommant les travailleurs de se présenter aux bureaux de la CCQ hier matin, pour s'enregistrer une fois de plus.

Les travailleurs et travailleuses des chantiers de Construction Mont Sainte-Adèle à Trois-Rivières ont bruyamment manifesté hier matin devant les bureaux de la FTQ, puis devant ceux de la Commission de la construction du Québec (CCQ) à Trois-Rivières, pour dénoncer le harcèlement dont ils se disent victimes de la part de l'organisme gouvernemental.


Encore lundi midi, des inspecteurs de la CCQ, escortés de policiers, se sont présentés sur le chantier de la rue Thibeau, dans le secteur Cap-de-la-Madeleine, pour vérifier que les travailleurs étaient en règle.

Or, selon le promoteur du chantier, François Veillette, c'est la septième fois depuis septembre que les inspecteurs se présentent. Cette fois, les 50 travailleurs du chantier ont même reçu, en soirée lundi, une lettre par huissier leur indiquant qu'ils avaient jusqu'à hier pour s'identifier aux bureaux de la CCQ.



C'est donc en groupe que les travailleurs se sont présentés devant les bureaux de la CCQ, afin de s'enregistrer une nouvelle fois. Toutefois, l'exaspération était palpable et le ton a vite monté lorsqu'ils ont constaté qu'ils devraient attendre dans le corridor pour s'enregistrer, et que ce sont des policiers qui allaient gérer les entrées et sorties des bureaux de la CCQ.

«Eux se permettent de venir me déranger chez nous n'importe quand, mais moi faut que j'attende. Ça fait dix ans que ça dure», a hurlé l'un d'eux, à bout de nerfs.

L'entreprise avait connu les mêmes démêlés avec la CCQ à Sherbrooke, avant de plier bagage en avril dernier, excédée par le harcèlement dont elle se disait victime. Une action de 4 millions $ en dommages et intérêts sera maintenant déposée en cour en février par Construction Mont Sainte-Adèle.

«On n'y comprend rien. C'est du harcèlement. Ce sont les événements de Sherbrooke qui recommencent. Les gars en ont ras-le-bol, ils vont exploser, c'est ce qui est arrivé ce matin», signale François Veillette.



Ce dernier explique que les travailleurs n'ont pas voulu faire grand bruit des nombreuses visites reçues depuis septembre en raison des contrats qui devaient être honorés, mais que la visite de lundi a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. «À Sherbrooke il y a eu un gros impact, le chiffre d'affaires de l'entreprise a baissé de plus de 11 millions $. À date, on a des pertes de 2 millions $ ici», ajoute M. Veillette.

Lors de la visite de lundi, le promoteur dénonce le fait que les inspecteurs ont fait preuve d'un excès de zèle. «Si le travailleur avait ses cartes dans son auto, il était escorté par deux policiers juste pour aller chercher ses cartes. Ils ont bloqué l'accès à la porte de garage, les gars ne pouvaient plus sortir du bâtiment pour aller dîner», raconte-t-il.

En 2008, Construction Mont Sainte-Adèle avait remporté sa cause devant la cour, une cause qu'elle avait intenté en 2001 contre la CCQ, toujours pour harcèlement et abus de pouvoir. «Ça a pris sept ans à se faire entendre en cour. Ça fait donc dix ans que le harcèlement dure. Mais on a gagné et on va gagner encore. Mme (Diane) Lemieux veut ma peau et elle ne l'aura pas», lance-t-il.

Devant les bureaux de la FTQ, les travailleurs ont aussi dénoncé le fait qu'ils se sentent abandonnés par leur syndicat dans cette histoire. François Veillette n'a pas hésité, au passage, à écorcher l'attitude de la FTQ, qui représente 95 % de ses travailleurs et de ses sous-traitants sur le chantier de la rue Thibeau.

«On les trouve carrément moumounes. Ça fait deux semaines que les travailleurs en ont ras-le-bol, ils veulent se faire aider par leur représentant. Ils n'en ont rien à foutre, c'est aberrant», signale-t-il.

Une procédure normale, selon la CCQ



La Commission de la construction du Québec se défend de faire du harcèlement sur les chantiers de Construction Mont Sainte-Adèle, mais souligne que si elle avait, mercredi dernier, obtenu la pleine et entière collaboration des travailleurs du chantier lors de la visite de vérification, elle n'aurait pas eu besoin d'y retourner ce lundi, avec l'aide des policiers.

«Lorsque nous sommes intervenus mercredi dernier, il y avait un climat d'agressivité et nous n'avons pas pu compléter le travail. Lundi, nous sommes retournés et nous nous sommes assurés de disposer des outils nécessaires pour compléter notre travail», résume Louis-Pascal Cyr, porte-parole de la CCQ.

Quand on lui fait remarquer qu'après autant de visites, il se peut que les travailleurs se montrent exaspérés, M. Cyr soutient plutôt qu'il est normal que les inspecteurs de la CCQ se rendent fréquemment visiter les chantiers, et celui de Trois-Rivières est l'un des plus gros dans la région, ce qui justifie d'autant plus leur présence fréquente.

«Il y a plusieurs étapes lors de la construction, et à chaque fois, de nouveaux sous-traitants arrivent. Nous ne pouvons pas deviner qui était là la première fois et qui est nouveau sur le chantier. C'est une procédure normale. Nous faisons environ 40 000 visites de chantiers par année au Québec», ajoute M. Cyr.

Ce dernier réfute d'ailleurs les allégations de François Veillette, voulant que la CCQ cherche à se venger du jugement rendu en faveur du promoteur en 2008. «Au contraire, nous avons tiré des leçons de ce jugement, et nous nous assurons maintenant que toutes nos interventions sont justifiées et effectuées dans les règles de l'art. On ne pourrait pas se permettre d'avoir un autre jugement de la sorte», signale-t-il.