Pour certains, il ne fait pas de doute que la «réflexion» entamée ces derniers temps n'est pas étrangère à l'extraordinaire popularité de la Coalition pour l'avenir du Québec (CAQ) de François Legault dans les sondages, une menace claire à leur réélection et à celle du gouvernement.
Pour d'autres, cela n'a rien à voir, la décision ayant mûri depuis un temps. On invoquera plutôt des raisons personnelles, l'âge ou l'envie de passer à autre chose.
Au conseil des ministres, personne n'a encore annoncé officiellement sa décision de ne pas se porter candidat aux prochaines élections, mais quelques-uns ont déjà envoyé des signaux à leur entourage, aux collègues ou au Parti libéral du Québec (PLQ), indiquant qu'ils songeaient à tirer leur révérence.
Parmi eux: Monique Gagnon-Tremblay (Relations internationales), Raymond Bachand (Finances), Norman MacMillan (Délégué aux Transports), Michelle Courchesne (Conseil du trésor), Julie Boulet (Emploi et Solidarité sociale) et Yvon Vallières (Affaires intergouvernementales).
Dans le cas de Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), une septuagénaire, elle s'était déjà fait tirer l'oreille en 2008: le parti avait calculé que c'était sa seule chance de garder le comté, qui est passé près de passer au Parti québécois représenté par le Dr Réjean Hébert, demeuré actif au parti.
Certains ont de longs états de service: Yvon Vallières (Richmond), 62 ans, qui a déjà neuf mandats derrière la cravate, a confié à des proches avoir choisi de se retirer en douce à la fin de son mandat.
En prévision d'un éventuel scrutin printanier, l'organisation du PLQ a enclenché le processus des assemblées d'investiture des candidats dans les 125 circonscriptions et accélérera la cadence après les Fêtes. Le parti accroît la pression sur les députés et ministres pour décider très bientôt si oui ou non ils comptent porter les couleurs du parti aux prochaines élections, que le premier ministre pourrait déclencher dès ce printemps.
Avec le départ, vendredi, de David Whissell, qui préfère retrouver le monde des affaires, le parti doit déjà trouver un candidat dans Argenteuil pour une éventuelle élection complémentaire.
Chez d'autres députés libéraux, l'âge ou les désillusions auront eu raison de leur dévouement.
Yvon Marcoux (Vaudreuil), qui a été ministre de la Justice de 2005 à 2007, avant de retourner sur les banquettes arrière, a fini par se lasser de croire aux promesses qu'il y retournerait un jour. À 70 ans, il n'attend que le déclenchement du scrutin pour annoncer son départ.
Comme M. Marcoux, plusieurs députés libéraux ont atteint l'âge de la retraite (huit ont plus de 65 ans), un facteur qui pourrait entrer en ligne de compte avant de solliciter un nouveau mandat de quatre ou cinq ans: Lawrence Bergman (D'Arcy-McGee), a 71 ans, Jean-Paul Diamond (Maskinongé), 71 ans, Charlotte L'Écuyer (Pontiac), 68 ans, Henri-François Gautrin (Verdun) 68 ans, Norbert Morin (Montmagny-Lislet), 66 ans, et Michel Pigeon (Charlesbourg), 66 ans.
Dans le caucus libéral, la nervosité monte d'un cran à chaque nouveau sondage. Certains attendent de voir si la CAQ va continuer à se maintenir au sommet avant de prendre leur décision. «On attend de voir les chiffres» des prochains sondages, dira un député inquiet.
Chose certaine, si le taux d'insatisfaction de la population envers le gouvernement demeure aussi élevé et que l'appui à la CAQ se maintient au-dessus de 40 pour cent chez les francophones, plus aucun comté n'est sûr pour les libéraux, à part ceux de l'ouest de l'île de Montréal.
«Avec un taux d'insatisfaction à 75 pour cent, c'est l'abattoir assuré», confie un député libéral qui craint pour sa réélection et n'a pas encore pris sa décision.
C'est particulièrement le cas dans la région de Québec, où le parti de François Legault semble constituer une menace réelle: le dernier sondage CROP-Le Soleil-La Presse, rendu public vendredi, donne 54 pour cent d'appuis à la CAQ dans la capitale. C'est là que son message passe le mieux. Un balayage en règle de toute la région n'est plus exclu. À l'heure actuelle, presque tous les sièges de Québec appartiennent aux libéraux, sauf Taschereau (Agnès Maltais-PQ) et Chauveau (Gérard Deltell-ADQ).
Quand même, le ministre de la Santé, M. Bolduc, de même que celle de la Famille, Yolande James (Nelligan), font partie de ceux qui ont déjà annoncé leurs couleurs: ils seront candidats.
Un autre facteur qui pourra influencer les décisions des élus sera le redécoupage de la carte électorale, qui modifie les contours de la plupart des circonscriptions de manière à tenir compte des mouvements de population, De plus, trois circonscriptions s'ajoutent et trois autres disparaissent.