Tétraplégique, Jocelyn Ouellette trace sa voie et guide les autres

Inscrit en dessin de bâtiment, Jocelyn Ouellette est un élève apprécié dans une classe. Il en aura la preuve ce soir, dans le cadre du Gala entrepreneurial de la Commission scolaire de l'Énergie.

Jocelyn Ouellette était au beau milieu de ses vacances lorsqu'il a plongé dans la piscine hors-terre d'un ami. «J'ai frappé le fond avec ma tête. J'ai entendu un «crounch» et j'ai perdu contact avec mes bras et mes jambes. J'étais conscient, mais plus rien ne fonctionnait», raconte le Trifluvien de 32 ans qui, depuis cette journée du 30 juillet 2008, est paralysé des quatre membres.


Ce soir, cet ancien plombier se présentera sur la scène du Centre des Arts de Shawinigan, dans le cadre du 3e Gala entrepreneurial de la Commission scolaire de l'Énergie.

À l'automne dernier, Jocelyn a décidé d'effectuer un retour aux études, en dessin de bâtiment, un programme dispensé au Carrefour formation Mauricie, à Shawinigan. L'élève n'a aucune idée de ce qui l'attend lors de cet événement honorifique, mais il devine que l'invitation qui lui a été personnellement adressée a quelque chose à voir avec tout le chemin parcouru depuis qu'une lésion de la moelle épinière, au niveau de la cinquième cervicale, l'a rendu tétraplégique.



Sa mère, Huguette Bédard Ouellette, cache difficilement sa fierté.

«Au départ, ça prend une force de caractère assez puissante», affirme-t-elle avec admiration. Son fils ne s'est jamais laissé décourager, pas même lorsque le chirurgien a avoué que la seule chose que Jocelyn pourrait faire à l'avenir, c'est manipuler le levier de commande d'un fauteuil roulant motorisé.

«Je pense que les médecins sont là pour nous dire le pire, pour nous confronter en quelque sorte», explique le jeune homme. Depuis trois ans, il ne cesse de déjouer le pessimiste pronostic.

Non seulement Jocelyn arrive à pousser son fauteuil roulant manuel, mais pour se dégourdir un peu, il n'hésite pas à se lever debout et à faire quelques pas en utilisant des béquilles avec appui d'avant-bras.



L'exercice est loin d'être évident, il se fatigue vite et ses gestes manquent de flexibilité, mais le résultat lui donne néanmoins le goût de prendre, à chaque fois, un nouvel élan.

Il faut dire que Jocelyn n'a pas perdu de temps depuis sa sortie de l'Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal, en s'investissant corps et âme dans sa propre prise en charge, tant physique que psychosociale.

Ses séjours à l'Institut de réadaptation Gingras-Lindsay et au Centre de réadaptation Lucie-Bruneau, à Montréal, n'ont pas toujours été de tout repos, tout comme ses visites au Centre de réadaptation InterVal, à Trois-Rivières.

«On te pousse à fond. Des fois, le corps ne veut plus suivre, mais si tu te forces le moindrement, en étant positif, ça t'aide», soutient le célibataire dont l'attitude a inspiré les autres résidents dont plusieurs sont devenus de véritables amis.

«Tu te retrouves avec des gens qui sont dans le même état que toi», explique Jocelyn en parlant de cet homme paralysé en raison d'un accident de moto, ou de cet autre copain également confiné à un fauteuil roulant depuis que des chums ont eu la mauvaise idée, le jour de son anniversaire, de lui faire la bascule avant de le lancer dans une piscine...

Depuis novembre dernier, Jocelyn habite seul dans son logement adapté. Là encore, il a refusé de se laisser envahir par ses appréhensions du départ. Le Trifluvien n'en était pas à ses premiers défis.



Il a réappris à conduire sa voiture, également adaptée, dans la circulation montréalaise. Enfin, il a décidé de retourner à l'école pour mieux reprendre sa place sur le marché de l'emploi, en janvier 2012.

«Ça n'a pas niaisé», admet Jocelyn qui, depuis juillet 2008, avance sans jamais reculer même s'il repense parfois à sa vie passée, sur deux jambes. «Dans mes rêves, je marche. C'est tellement réel. C'est spécial, ça va faire trois ans», laisse-t-il tomber.

Des dix-huit élèves inscrits en septembre dernier en dessin de bâtiment, on en compte neuf aujourd'hui, dont Jocelyn. Lui-même s'est demandé, devant la complexité de la formation, s'il allait s'en sortir. Jocelyn a eu raison de persévérer. Ses enseignants ont proposé sa candidature pour un prix qui lui sera remis ce soir.

«Tout ce qu'on m'a dit, c'est que j'allais recevoir un bout de papier qui serait bon à mettre dans mon C.V.», souligne Jocelyn Ouellette en riant.