Alors que la première phase du procès se terminait, hier après-midi, le juge Martin s'est adressé aux deux parties pour expliquer à nouveau, comme il l'avait fait au tout début, qu'une entente à l'amiable demeure la meilleure solution pour venir à bout du litige qui les oppose.
À mesure qu'il avance dans cette cause et après avoir entendu plusieurs experts se prononcer, le juge Martin en arrive déjà à une conclusion: «Je me dirige vers une solution que les deux parties pourraient trouver elles-mêmes», a-t-il dit en ajoutant que s'il faut continuer le procès, il le fera, mais au bout du compte, il pourrait tout simplement imposer aux parties de s'entendre.
Le juge Martin a en effet remarqué qu'un partenariat comme celui qui lie la Régie et Savoura devrait susciter la collaboration «et ça n'a pas lieu», a-t-il constaté.
Le juge a fait cette déclaration tout juste après le témoignage et le contre-interrogatoire de Réjean Paradis de la firme PROCD Groupe conseil. Cet ingénieur en instruments et contrôle de procédés, qui a participé à divers travaux pour le compte de la Régie depuis 2006, notamment à titre d'employé de la firme André Simard, est venu raconter comment s'est déroulé le démarrage de la livraison du biogaz de la Régie aux chaudières de Savoura en 2008.
Le 30 septembre 2008, alors que se fait la mise en route des systèmes et que le biogaz est envoyé dans la tuyauterie, le technicien employé par Savoura pour s'occuper des brûleurs, Pierre Larouche de Combustion Expert, essaie de régler les courbes de combustion du brûleur, a raconté M. Paradis. À mesure que la situation évolue, Combustion Expert éprouve des difficultés avec les chaudières. «Les demandes de débit de la chaudière sont trop variées», raconte-t-il.
«Ça crée des fluctuations de pression. On a continué les tests et ça s'est replacé mais M. Larouche semblait désemparé», poursuit M. Paradis.
L'expert de la Régie, Michel Ruel, lors de son premier interrogatoire, avait lui aussi expliqué que Pierre Larouche de Combustion Expert «ne savait pas ce qu'il faisait» et que Savoura n'avait pas les bonnes personnes pour procéder au démarrage.
«Il disait qu'il n'avait pas l'habitude de faire fonctionner ça au biogaz et qu'il n'était pas à l'aise», poursuit M. Paradis. «La chaudière partait de 0 à 100 % en quelques secondes. Ça créait des demandes de débit excessives et engendrait une chute de pression.»
Michel Ruel avait d'ailleurs expliqué, lors de son témoignage d'expert, que l'idéal, pour éviter des surpressions dans le système ou des pertes de pression subites, serait d'installer des instruments permettant de générer des croissances et des décroissances graduelles, ou en rampes, de la consommation du biogaz.
Sans ce genre de contrôle, les brûleurs consommaient trop de biogaz, ce qui occasionnait des chutes de pression, a expliqué l'ingénieur Paradis.
Réjean Paradis propose alors aux gens de Savoura d'installer un régulateur de pression arrière («back pressure limit»). «C'est un module de contrôle très répandu», fait-il valoir, qui intervient quand une chaudière monte en pression trop rapide.
«Pierre Larouche ne comprenait pas ce que je voulais dire», raconte M. Paradis qui tente alors de faire valoir son idée à Jacques Marchand, l'ingénieur de Savoura. Étant ingénieur en mécanique, M. Marchand aurait mieux compris cette idée, mais elle est malgré tout restée lettre morte, a raconté le témoin.
Le procès entre Savoura et la Régie pourrait reprendre dans la semaine du 26 avril, mais il se peut, pour des questions de disponibilité de salles, que le tout se fasse à Québec ou à Shawinigan. D'ici là, le juge Martin a dit souhaiter que les parties en arrivent d'elles mêmes à une entente.