Huit ans de prison réclamés contre Jean-Louis Lahaye

Jean-Louis Lahaye

«Il m'a salie, il m'a fait perdre ma virginité et ma famille m'a rejetée.» Pierrette Lahaye, une femme qui a maintenant atteint la soixantaine, ne s'explique toujours pas pourquoi son frère a abusé d'elle sexuellement pendant une vingtaine de mois alors qu'elle avait à peine 13 ans et qu'il lui a fait un enfant quelques mois plus tard.


Témoignant lors des représentations sur sentence de son frère Jean-Louis, hier, au palais de justice de Shawinigan, cette femme en avait encore gros sur le coeur.

Elle s'est rappelée que son frère Jean-Louis Lahaye, de cinq ans son aîné, se payait du bon temps avec elle lorsqu'il revenait de soirées dans les bars. Il allait la chercher dans son lit, l'amenait dans sa chambre et avait une relation sexuelle complète avec elle.



Selon la procureure aux poursuites criminelles et pénales chargée du dossier, Me Marie-Ève Paquet, la victime était contrainte au silence. Et comme elle était le souffre-douleur de son père qui la battait régulièrement et que sa mère s'effaçait derrière l'autorité du père, elle n'avait personne à qui se confier.

Et lorsqu'elle est tombée enceinte, elle a été lâchée par la famille pour ne pas semer le déshonneur. Elle a accouché d'un garçon qui a été adopté dans les premiers jours de la naissance. Celui-ci, aujourd'hui âgé de 45 ans, est atteint de déficience intellectuelle. Pierrette Lahaye a réussi à le retrouver en 1996 et depuis, elle veille à son bien-être autant qu'elle le peut.

Pierrette Lahaye a été marquée pour la vie à la suite de ces abus. «J'étais seule au monde, j'ai accouché comme un chien, j'étais complètement démunie à 15 ans. Ma vie a été détruite pour longtemps», a-t-elle expliqué dans une lettre qu'elle a lue à la juge Dominique Slater. Si la vie a été dure pour elle, elle l'a aussi été pour son fils. Il a été institutionnalisé très tôt, il a été battu, il a été atteint de l'hépatite B. Il ne méritait pas ça», a-t-elle mentionné en déplorant que Jean-Louis Lahaye n'ait jamais reconnu ce fils et n'ait jamais cherché à entrer en contact avec lui.

En 2006, elle a décidé de porter plainte. Jean-Louis Lahaye a bien mal encaissé la chose. Il a nié être le père de ce fils. Lui qui était un homme apprécié tant au travail que dans les loisirs notamment comme instructeur au baseball, lui qui avait une vie familiale stable, se faisait ainsi rattraper par son passé.



Son avocate, Me Christine Goyette, a expliqué que ce sont les parents de son client qui ont organisé les choses à l'époque. Selon l'avocate, les moeurs étaient complètement différents d'aujourd'hui et l'autorité des parents était incontestable. Elle a longuement insisté sur le fait que Jean-Louis Lahaye avait mené une vie exemplaire depuis 64 ans, sauf cette période où il a abusé de sa soeur.

Les positions des parties ont toujours été diamétralement opposées dans cette affaire. Au terme des plaidoiries, c'était encore plus perceptible alors que Me Paquet a réclamé huit ans de pénitencier et que Me Goyette a demandé une sentence entre 15 mois et deux ans moins un jour dans la collectivité.

Jean-Louis Lahaye a été invité par la juge Slater à dire quelques mots. «J'ai fait du mal à une personne, je le reconnais et il n'y a pas une journée depuis 45 ans que je n'ai cessé de penser à ça», a-t-il déclaré en ajoutant qu'il espérait qu'un jour sa soeur allait lui pardonner. «Je m'excuse, je demande pardon», a-t-il dit. La sentence sera prononcée le 7 mai.