Le juge Guy Lambert a exclu d'emblée que la peine soit servie dans la collectivité, la dissuasion et la dénonciation devant primer. Il a souligné que la sentence n'avait pas besoin d'être longue pour qu'elle produise l'impact souhaité.
Embauché à la caisse de Normanville en 1997, Serge Lessard a gravi les postes pour devenir conseiller financier. Dans le cadre de la vague de fusions qui se déroulait à cette époque, il acceptait difficilement les nouvelles façons de faire des dirigeants, notamment pour les prêts de moins de 5000 $ qui, de son avis, étaient systématiquement refusés.
Se définissant comme un altruiste, Serge Lessard a alors décidé de passer outre aux directives et d'accorder tout de même des prêts de moindre envergure.
Pour que son manège fonctionne, il s'était arrangé pour manipuler les comptes de plusieurs clients de la caisse. Il effectuait donc des virements d'un compte à l'autre et fabriquait de faux prêts personnels.
Il s'appropriait ainsi de l'argent comptant pour ensuite l'affecter à d'autres fins que ce qui était prévu initialement.
Pendant quatre ans, Serge Lessard a ainsi pu manipuler 132 713,67 $ dans quelque 25 comptes. Il utilisait par ailleurs deux comptes pour cacher la plupart des transactions. Ces deux comptes appartenaient à des clients qui ne vérifiaient pas souvent leurs affaires.
Au début du processus, tout allait bien mais il est arrivé un moment où Lessard a perdu le contrôle de ses dossiers. Des clients ont par ailleurs commencé à se plaindre de mouvements irréguliers d'argent dans leurs comptes.
En 2004, les dirigeants de la caisse ont mené une enquête qui a permis de mettre au jour le comportement illégal du conseiller. Ils l'ont congédié et ont remis le dossier à la police de Trois-Rivières.
Serge Lessard a par la suite collaboré avec les enquêteurs pour leur expliquer sa façon de faire. Il leur a mentionné qu'à la fin de 2003, il a détourné à des fins personnelles une somme de 22 694 $ pour régler des dépenses sur carte de crédit.
Son avocate, Me Maryse Brouillette, avait déclaré au tribunal que tous les clients avaient été remboursés et que Serge Lessard éprouvait un grand sentiment de honte pour avoir ainsi trompé la confiance de plusieurs membres.
Le juge Guy Lambert a retenu pour sa sentence plusieurs arguments servis en plaidoirie par Me Maxime Chevalier, procureur aux poursuites criminelles et pénales, tels le fait d'occuper un poste de confiance où il avait accès à tous les comptes de la caisse, d'avoir prémédité les manipulations d'argent et d'avoir créé un climat d'insécurité chez les membres.
Me Chevalier aurait souhaité que le tribunal impose une peine de 15 mois de prison ferme alors que Me Brouillette réclamait une sentence dans la collectivité.
La caisse populaire de Normanville relève maintenant de la caisse populaire des Trois-Rivières. Son directeur général, André Gauthier, a précisé hier que les mesures de sécurité et de surveillance avaient été resserrées dans l'ensemble du mouvement Desjardins.
«Tout a été revu de la gestion des risques aux contrôles internes», a-t-il expliqué en indiquant qu'il y a beaucoup plus de rigueur à tous les niveaux. D'ailleurs, un poste spécifique a été créé pour toutes les questions reliées à la sécurité et aux contrôles, a déclaré M. Gauthier. «Nous voulons être à l'avant-garde dans ce domaine», a-t-il conclu.