Serge Lessard dit avoir honte de ses gestes

Serge Lessard

Un ancien conseiller aux finances personnelles de la caisse populaire de Normanville, Serge Lessard, saura le 10 mars prochain si le juge Guy Lambert accepte de lui permettre de purger sa peine de prison dans la collectivité.


L'homme qui s'est reconnu coupable de détournements de fonds de plus de 130 000 $ aux dépens de la caisse et de 25 clients impute son comportement au fait qu'il n'était pas d'accord avec certaines façons de faire de ses patrons qui refusaient des prêts à certains clients.

Selon l'accusé, il y a au moins un cas où le prêt qu'il a accordé, en procédant par des moyens illégaux, a permis à l'individu de se payer une formation technique et d'obtenir un emploi lucratif par la suite.



Serge Lessard, selon son propre aveu, n'était probablement pas destiné à un emploi de conseiller financier. «Ils n'auraient jamais dû m'engager» confesse-t-il. Il a expliqué hier qu'il avait d'abord été embauché comme commis puis promu rapidement comme conseiller. «Mon intelligence m'a permis de m'en sortir», a-t-il avoué en disant qu'il trouvait difficile de dire non aux gens qui sollicitaient un prêt.

Il a donc décidé d'utiliser divers subterfuges pour détourner des sommes d'argent de certains comptes dont il savait que les détenteurs étaient négligents à surveiller leurs affaires. Un peu à la manière d'un Robin des bois, il cherchait des solutions rapides pour aider ceux qui avaient besoin d'argent.

Ainsi, lors de promotions entourant le renouvellement d'un prêt hypothécaire, la caisse pouvait consentir une baisse du taux et/ou une remise en argent. Serge Lessard s'arrangeait pour détourner cette remise, à l'insu du client, pour le déposer dans le compte d'un autre client qui faisait une confiance sans limite à la caisse.

Il disposait ainsi de fonds pour faire des prêts qui, autrement, auraient été refusés. Et personne ne lui posait de questions. Il préparait également des documents avec le nom de faux endosseurs. Ceux-ci étaient aussi des clients de la caisse.



Ce système a bien fonctionné pendant un bon moment mais le pot aux roses a fini par être découvert lorsque des clients se sont rendus compte que leur identité avait été faussement usurpée. Serge Lessard a admis que ce système était extrêmement difficile à gérer à tel point qu'il ne savait plus à un moment donné où se trouvait l'argent.

En 2004, a-t-il déclaré au tribunal, il ne faisait «qu'éteindre les feux». Il a mentionné que son stratagème était devenu étourdissant. «Ça m'a complètement usé», dira-t-il en précisant qu'il vivait en fait une profonde dépression. «J'étais débordé et je ne voulais que les gens perdent de l'argent» a-t-il confié en ajoutant qu'il n'avait pas fait tout cela pour s'enri- chir.

La preuve soutenue par Me Maxime Chevalier, le procureur aux poursuites criminelles et pénales chargé du dossier, démontre que l'enrichissement véritable de l'accusé se situait entre 22 694 $ et 34 500 $.

En effet, comme l'a précisé le comptable agréé Gilles Mathon qui témoignait pour la défense, même s'il y a eu beaucoup de manipulation de fonds, l'enrichissement personnel de l'accusé, soit 22 694 $ (selon son analyse) a servi majoritairement à acquitter des dépenses sur une carte de crédit. Serge Lessard n'aurait mis que 619 $ dans ses poches.

L'ancien conseiller financier a précisé qu'il roulait avec un vieux véhicule et qu'il tirait des revenus approximatifs de 15 000 $ par an comme ébéniste.

Serge Lessard dit être couvert de honte pour ce qu'il a fait. La diffusion de cette affaire la semaine dernière a ajouté à son embarras car, dit-il, les gens ont le jugement sévère sans tout savoir. L'accusé a collaboré avec les enquêteurs de Desjardins et de la police de Trois-Rivières pour qu'ils découvrent l'ensemble des opérations illégales.



Son avocate, Me Maryse Brouillette, a dit au juge que les risques de récidive étaient nuls dans ce cas puisque son client ne travaillera plus dans le domaine financier. Serge Lessard a même indiqué qu'il n'était pas du genre à se foutre des autres.

«J'ai fait des choses qui étaient mal mais j'ai aussi voulu aider des gens», a-t-il conclu en ajoutant qu'il pourrait éventuellement rembourser l'argent détourné à son avantage personnel. À noter que les clients qui ont été lésés ont été remboursés par la caisse populaire.

Me Chevalier a demandé au juge Guy Lambert une sentence de 15 mois de prison ferme afin de dénoncer un tel comportement. Me Brouillette a pour sa part réclamé une sentence dans la collectivité sans en préciser le quantum. Le juge rendra sa sentence le 10 mars.