Chauffeur de taxi agressé au marteau... pour 75 $

Jacques Royer a été victime d'une sauvage agression dimanche matin. Les voleurs, qui sont repartis bredouille, ont saccagé son taxi sur la rue Cardinal-Léger.

«Je n'avais que 75 $ dans mes poches. S'ils m'avaient demandé de leur donner le cash, je n'aurais pas risqué ma vie et j'aurais donné l'argent sans faire d'histoire. Mais ils ne m'ont rien demandé. Ils ont frappé et je me suis enfui. Ils n'ont même pas réussi à avoir un seul sou».


Dimanche matin, vers 6 h 20, Jacques Royer répondait à un appel de routine à bord de son taxi, qu'il conduit depuis maintenant onze ans. Un simple appel pour deux clients qui attendaient à côté du magasin Zellers, au centre commercial Les Rivières. Son quatrième appel depuis le début de son quart de travail.

Deux hommes âgés dans la vingtaine prennent place à bord de son taxi. L'un s'assoit à côté de lui, l'autre derrière.

«J'ai commencé à rouler dans le stationnement et j'ai demandé où on s'en allait. L'un d'eux m'a fait signe avec son index en disant «par là». J'ai ensuite demandé quelle rue. Quand ils m'ont dit qu'ils allaient sur la rue Caron, j'ai répondu que ça ne se pouvait pas. Ils m'avaient demandé la mauvaise direction pour la rue Caron. C'est là qu'ils ont frappé», raconte Jacques Royer.

Le jeune homme qui se trouve à l'arrière lui assène un coup de marteau sur la tête. Sonné, M. Royer se retourne et voit que son agresseur se prépare à frapper une seconde fois.

«Je me suis penché, j'ai ouvert la portière et je me suis jeté dehors de l'auto encore en marche. Il a ouvert sa porte lui aussi et a essayé de me frapper de nouveau. Là, j'ai couru! Eux, ils ont filé avec la voiture», se souvient M. Royer, visiblement encore ébranlé des événements.

À cette heure très matinale, l'homme a pu trouver refuge au restaurant Eggsquis, situé en face, où des collègues de la compagnie Taxi Coop prenaient un café. «La serveuse a contacté l'ambulance et les policiers. Mes collègues se sont occupé de moi et ont prévenu la centrale», poursuit M. Royer qui, selon le diagnostic médical, a subi un traumatisme crânien. Il a reçu quatre points de suture à la tête.

Les malfaiteurs, quant à eux, sont repartis sans le moindre sou, et ont terminé leur course sur la rue Cardinal-Léger, où ils ont saccagé le taxi, volé l'enseigne de Taxi Coop, le GPS, le radio-émetteur, le compteur ainsi qu'une enregistreuse.

Traumatisme

Depuis deux jours, le sommeil est très rare pour Jacques Royer.

«J'ai passé la nuit debout à faire des Sudoku et à lire le journal. J'essaie de me tenir occupé, car je sens des montées d'anxiété à tout moment. Ça m'arrive d'avoir le shake. Il paraît que j'ai le syndrome post-traumatique», confie-t-il.

L'enquête policière dans ce dossier se poursuit et les deux hommes sont toujours activement recherchés par les enquêteurs de la Sécurité publique de Trois-Rivières.

«Les policiers font un bon travail. J'ai senti qu'ils prenaient l'affaire très au sérieux. Ça m'a rassuré», lance le chauffeur de taxi. D'ailleurs, toute personne possédant des informations sur cette affaire peut contacter la Sécurité publique au 819-370-6700.

Jacques Royer est maintenant en congé de maladie pour une dizaine de jours, mais compte bien prendre 15 jours pour se remettre de ses émotions. Par la suite, le retour au travail sera progressif... et sélectif.

«Je vais recommencer à temps partiel, et pas dans les zones dangereuses. Je vais rester dans les quartiers tranquilles», évoque-t-il.

 

Un métier difficile

Des histoires abracadabrantes, les chauffeurs de taxi en voient régulièrement à Trois-Rivières. Mais il y avait bien cinq ans qu'un chauffeur de taxi n'avait pas été agressé physiquement de la sorte à Trois-Rivières, signale Jacques Royer.

Dernièrement, par contre, le métier est devenu de plus en plus difficile. «Depuis la récession, on dirait que c'est pire. Notre chiffre d'affaires a baissé, mais on en voit aussi de toutes les couleurs. Récemment, j'ai eu deux clients en cinq jours qui ont refusé de me payer», mentionne Jacques Royer, soulignant que les fins de mois sont toujours pénibles pour ce genre de clientèle.

Pire encore! Une jeune femme qui refusait de régler sa course aurait menacé le chauffeur de l'accuser d'agression sexuelle. «Elle était assise à côté de moi et m'a dit que si je tentais quoi que ce soit pour l'empêcher de sortir du taxi, elle m'accuserait d'avoir tenté de l'agresser sexuellement. Que vouliez-vous que je fasse? J'ai croisé mes bras et j'ai attendu qu'elle sorte. Nous n'y pouvons pas grand-chose», se désole le chauffeur de 61 ans.

À ce rythme, Jacques Royer pourrait bien prendre sa retraite plus vite que prévu, et l'événement survenu dimanche matin n'a fait que confirmer ce choix. «J'ai décidé de changer mes heures de travail. Je ne travaillerai plus que de jour. Je suis en pleine forme, je pensais continuer au-delà de 65 ans, mais si c'est pour continuer de se dégrader comme ça, je vais arrêter de travailler. Ça n'a plus de sens», confie le chauffeur de taxi.