Janie Croteau et Nathalie Levasseur habitent la résidence voisine de la prison trifluvienne. De leur salle à manger, elles ont une vue sur les bâtiments et la clôture qui les entoure.
À les entendre, il n'est pas rare que certaines personnes s'aventurent à pied dans le boisé.
«Ça arrive ! Il y a une camionnette qui les laisse puis vient les rechercher plus tard. Ils ne sont pas très subtils mettons», lance Janie Croteau, qui soupçonne bien sûr que ces visiteurs ne soient pas là pour une randonnée pédestre mais bien à des fins illicites.
Ces voisines assurent en revanche ne ressentir aucune crainte de résider à quelques pas d'une prison.
«C'est la question que tout le monde nous pose. Mais on s'habitue. Ce n'est pas inquiétant», laisse tomber Nathalie Levasseur.
Un boisé prisé
Le boisé qui borde les installations carcérales servirait à merveille le travail des malfaiteurs. «Les gars se font des trails avec des scies mécaniques pour aller lancer des balles», avance Frédérick Grenier, un ex-détenu qui a séjourné derrière les barreaux du centre de détention en novembre dernier.
Cette situation retient aussi l'attention de la Maison Carignan. L'établissement, qui offre des thérapies pour l'alcoolisme et la toxicomanie, est situé face à la prison trifluvienne.
«Nous autres, on a eu des rôdeurs en fin de semaine. Je sais qu'il y a des gens qui se faufilent sur les terrains, dans le bois», disait un intervenant, samedi, peu surpris par les événements qui ont défrayé la manchette au cours des dernières semaines.
De ce côté, on ne craint toutefois pas que le phénomène qui semble prendre de l'ampleur au centre de détention ne gagne le lieu de thérapie. La drogue, assure-t-on, n'y est en aucun temps tolérée. «Ici, si les gens consomment, c'est l'expulsion tout de suite. Je ne dis pas que ce n'est jamais arrivé, mais la dope ça ne passe pas», a expliqué un autre responsable qui préférait à son tour conserver l'anonymat.
Commerce payant
La drogue, sur le marché noir, constitue une source de revenus appréciable. Mais transportez-la en prison et le risque deviendrait particulièrement payant.
C'est à tout le moins ce que soutiennent les ex-détenus qui se sont confiés au Nouvelliste, lors d'une rencontre tenue samedi.
Selon les différents témoignages, le coût des stupéfiants peut passer du double au quintuple, selon la marchandise choisie. Le paiement s'effectuerait par virement bancaire ou encore grâce à l'argent obtenue par les détenus pour la cantine, cet endroit réservé à la vente de différents objets pour les criminels.
«C'est très, très cher et c'est des petites quantités», explique Frédérick Grenier, assurant au passage que drogues douces et drogues dures se retrouvent entre les mains des détenus.
Il semble aussi que le marché soit fortement contrôlé par les groupes criminalisés. À Trois-Rivières, on chuchote que «les gars de bicycle» détiennent encore le pouvoir sur ce qui s'y transige.
Ailleurs, les gangs de rue prendraient de plus en plus de place. Mais chose certaine, peu importe qui contrôle l'établissement, vaut mieux respecter les lois tacites du milieu carcéral.
«Ce qui se dit c'est que même si tu réussis à amener ton stock, tu dois quand même donner ta cote si tu ne veux pas une table dans les dents», raconte Herby Dieudonné, qui a séjourné à quelques reprises derrière les barreaux.
«Mais c'est difficile de dire qui règne en dedans. Il y a les Hells et il y a les gangs», ajoute l'ex-détenu de 33 ans.
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