Populiste le régime duplessiste?

Maurice Duplessis, au centre, lors d'une visite au parc des Pins, en aout 1944.

Le régime duplessiste était-il populiste? C'est à cette question que se sont intéressés les participants du colloque Duplessis, son milieu, son époque, alors que s'ouvrait, hier, à la salle publique de l'hôtel de ville de Trois-Rivières, le premier volet de cet événement organisé par les Entretiens Pierre-Bédard de la Société du patrimoine politique et le Centre interuniversitaire d'études québécoises, à l'occasion du 50e anniversaire de la mort de l'ex-premier ministre.


Frédéric Boily, de l'Université de l'Alberta, a lancé sa conférence en faisant remarquer qu'il n'y avait jamais eu de véritable recherche sur ce qu'est le populisme.

Mais cela dit, on s'entend généralement pour dire qu'il s'agit d'une manière de se présenter pour être plus proche de ses électeurs. Le politicien populiste se déclare avec le peuple contre les élites. Il se définit comme plus vrai, plus honnête.

Il semble par ailleurs que le populiste soit plus enclin à dénoncer qu'à proposer des idées. Enfin, il se prétend souvent comme au-dessus des lignes partisanes de manière à se faire le plus rassembleur possible. Son discours est simple, facile à comprendre.

Selon M. Boily, Maurice Duplessis s'est inspiré de Camillien Houde dans son approche de l'électorat et s'est avéré un politicien doué dans ce style de politique qu'il peaufinera particulièrement lors de sa tournée provinciale de 1934.

Plus près de nous, M. Boily cite les Andrée Boucher, Régis Labeaume et Mario Dumont comme des exemples de politiciens populistes.

«Le populisme, c'est d'abord une posture et un style avant d'être un contenu», a noté M. Boily qui a tout de même fait remarquer qu'il manque une caractéristique du populisme chez Maurice Duplessis. soit une réforme. Il n'en a pas fait.

À une participante, Chantal Trottier, qui se demandait comment un politicien qui se présentait «avec des mains nettes» en était arrivé à ériger le patronage et le clientélisme en système, le conférencier a eu cette réponse toute simple: «pour se maintenir au pouvoir.»

Mais on ne saura jamais si ce système tant décrié aurait fonctionné à nouveau, la mort et elle seule ayant mis fin à la carrière de Duplessis.

Pas besoin de maire

Sous Duplessis, Trois-Rivières n'avait pour ainsi dire pas besoin de maire. C'est Maurice qui décidait quand il fallait élargir la rue Saint-Maurice ou interdire un spectacle.

C'est encore lui qui s'ingérait dans les affaires municipales pour annuler un règlement d'emprunt. Manifestement, à ses yeux, le pouvoir municipal était insignifiant.

C'est au point que deux maires, Atchez Pitt et Joseph Alfred Mongrain, se sont présentés contre Duplessis mais sans succès. Désabusé, Mongrain renoncera même à la vie municipale.

C'est ce qui ressort entre autres de la conférence de Lucia Ferretti et Maéli Richard, de l'Université du Québec à Trois-Rivières, qui se sont arrêtées quant à elles au Duplessis, député de Trois-Rivières.

À la décharge de l'ex-premier ministre, il faut aussi dire qu'il était de toutes les inaugurations qui furent très nombreuses sous son long règne à Trois-Rivières: hôpitaux, écoles, palais de justice, parcs, usines, etc. Inaugurations où il ordonnait parfois... de ne pas inviter le maire de Trois-Rivières.

C'est aussi de son comté que Maurice Duplessis va étendre son pouvoir en nommant de nombreux Trifluviens à des postes stratégiques et en jetant les bases d'un vaste réseau chargé de surveiller non seulement ses ennemis mais aussi... ses amis.

Mme Ferretti a aussi raconté comment Maurice Duplessis n'hésitait pas à utiliser les données de différents ministères pour obtenir des informations confidentielles sur des citoyens et ainsi neutraliser des pouvoirs concurrents. Il possédait, dit-on, de nombreuses listes. Une sorte de Big Brother avant son temps quoi.

Le colloque Duplessis, son milieu, son époque, se poursuit aujourd'hui, à la salle publique de l'hôtel de ville de Trois-Rivières.