La planification stratégique constitue un des éléments majeurs du rapport du vérificateur pour l'exercice 2008. Reconnue comme un outil de gestion essentiel - que d'autres villes utilisent déjà largement -, elle permet de mieux définir les orientations, les valeurs, les priorités de l'ensemble des services de la Ville. Or, Trois-Rivières ne s'est pas dotée d'un tel outil et, si on se fie aux propos du maire Yves Lévesque, elle n'entend toujours pas le faire.
Le vérificateur général note que la Ville a plutôt préféré se donner, par la voix de son maire, deux orientations principales dont l'une porte sur la création de la richesse et l'autre sur le service à la clientèle. «Ces deux orientations ne furent pas précisées et chacun des gestionnaires a dû les interpréter pour se guider dans la gestion de ses priorités, la mobilisation du personnel et la gestion du changement», note Jean-Yves Martin.
Dans son rapport déposé hier au conseil, M. Martin note aussi que si la planification à court terme des ressources financières ainsi que le suivi et le contrôle budgétaire sont bien effectués, il en est autrement de la planification financière à long terme. «La Ville doit se doit d'accorder une place prépondérante à la saine gestion financière de ses affaires et je regrette qu'elle n'ait pas encore pris l'initiative d'élaborer et de mettre en oeuvre des politiques formelles de gestion financière.»
Par ailleurs, le vérificateur met en lumière quelques bons coups de l'administration municipale, comme la participation des élus aux groupes de travail, qui facilite le processus budgétaire, notamment en ce qui a trait à l'approbation par le conseil. Il évoque aussi que le budget du service des travaux publics démontre une connaissance pointue de chacune des activités de ce service et contient des données de gestion de qualité sur le coût et la qualité des services rendus. Enfin, il mentionne que la direction des arts et de la culture agit de façon exemplaire en ce qui a trait à la reddition de comptes.
Situation financière
Le vérificateur se montre moins critique cette année quant à la dette de la Ville et la situation financière en général. Il note que «la hauteur de la dette est acceptable, mais sa progression mérite d'être surveillée parce que le conseil municipal ne s'est pas encore prononcé sur son plafond».
Plusieurs indicateurs sont passés en revue et comparés à différents groupes, notamment la moyenne de l'ensemble des municipalités du Québec, les villes de plus de 100 000 habitants et les quatre villes jugées comparables à Trois-Rivières (Gatineau, Lévis, Sherbrooke et Saguenay). En matière d'endettement total net à long terme, Trois-Rivières connaît une progression supérieure aux autres villes comparables. En 2009, l'endettement total net à long terme était de 205 200 511 $, soit 210 % de plus qu'en 2003.
Pour ce qui est du service de la dette, le vérificateur note que celui-ci occupe de moins en moins d'importance au budget. En 2009, le budget adopté présente un service de la dette de 32 millions $ par rapport à un budget total de 196 millions $, soit 19 %. «Malgré que la dette croisse d'année en année, la baisse des taux d'intérêt permet de diminuer le poids du service de la dette sur le budget. Ce poids diminue toutefois davantage dans les villes comparables», écrit-il dans son rapport.
Pour ce qui est de la charge fiscale, l'augmentation observée à Trois-Rivières est supérieure à la moyenne de toutes les municipalités du Québec et à celle des villes de plus de 100 000 habitants. La hausse de la charge fiscale moyenne pour les Trifluviens est de 31 %, dépassant de 18,7 % le taux d'inflation.
Suivi des recommandations
Enfin, puisqu'il s'agit de son dernier rapport comme vérificateur général, Jean-Yves Martin a récapitulé la centaine de recommandations qu'il a formulées, notamment dans les vérifications d'optimisation des ressources, entre 2002 et 2006.
Si 70 pour cent de ces quelque 110 recommandations ont été suivies, les huit qui concernent la gestion de la dette ont été ignorées par l'administration municipale.
«La dette, on la contrôle»
«Le vérificateur général voudrait qu'on encadre toutes sortes de choses dans des protocoles, des politiques ou des plans d'action. On n'a pas appliqué l'ensemble des recommandations à la lettre parce que le fait d'alourdir les procédures n'est pas toujours souhaitable.»
Le maire Yves Lévesque doute toujours de l'utilité de certaines recommandations du vérificateur général. Quand on lui demande ce qu'il pense du rapport déposé hier, notamment quant à la nécessité de doter la Ville d'une planification stratégique, le maire explique qu'il y a déjà du travail qui se fait en ce sens-là. «Ici, c'est davantage des actions spécifiques, des politiques sectorielles», remarque-t-il.
Yves Lévesque note qu'au cours des dernières années, Trois-Rivières a progressé en matière d'entretien des infrastructures et d'augmentation de la richesse foncière. Et il assure que l'endettement de la Ville est sous contrôle et qu'il doit être considéré parmi d'autres facteurs de croissance. «La dette, on la contrôle. Il faut faire attention quand on fait des comparaisons. Nous, on a choisi d'investir dans nos infrastructures et dans notre développement. C'est de l'investissement», a-t-il rappelé.
Comité de vérification
Dans son rapport, le vérificateur déplore l'inactivité du comité de vérification de la Ville. Depuis sa constitution en 2003, le comité s'est réuni seulement quatre fois et il n'y a pas eu de réunion depuis le 12 juin 2006. Pourtant, le maire Yves Lévesque en est toujours le président et il devrait être entouré des conseillers Fernand Lajoie et Denis Beaulieu.
«À mon avis, ce comité n'a pas joué son rôle, ni accompli le mandat que lui a donné le conseil, entre autres celui de soutenir la fonction de vérification. Le comité de vérification, à titre de responsable de la surveillance et de la qualité de l'information financière, devrait me rencontrer pour discuter de mes recommandations et de leur mise en application», explique Jean-Yves Martin.
Le maire s'est contenté de mentionner que le directeur général de la Ville était en lien continuel avec le vérificateur, ce qui permet une communication efficace. «Quand ils se parlent, ils se disent la même chose que si c'était le comité de vérification», remarque Yves Lévesque.•