Christian Lamoureux, président de construction Steco de Saint-Jérôme, a déposé cette requête le 1er avril. Une hypothèque légale est une garantie des créances des constructeurs impliqués dans la construction d'une bâtisse. M. Lamoureux veut ainsi protéger les travaux qu'ils a réalisés et être en mesure de payer la quinzaine de sous-traitants embauchés pour ce chantier.
«Le contrat est d'environ 700 000 $ et j'ai reçu environ 240 000 $. J'ai suspendu le chantier depuis le mois de janvier. Je ne suis plus capable de durer financièrement. Ma marge de crédit est au top! Mais on se fait dire que le chèque va rentrer mardi, ou jeudi, ou l'autre mardi, ou l'autre jeudi», raconte M. Lamoureux.
Ce dernier dit avoir parlé à Francine Lavoie, présidente des Sources Saint-Élie, il y une dizaine de jours. Il sait qu'elle est à la recherche de financement pour son agrandissement à Saint-Élie. Mais ce qui a choqué M. Lamoureux, c'est d'apprendre par Le Nouvelliste que Mme Lavoie vient de débourser 2,6 millions de dollars pour une usine d'embouteillage à New York.
«Jusqu'à temps qu'elle achète cette usine, je n'étais pas en mauvais terme. Mais là, ouf!»
Daniel Ayotte dirige une entreprise de maçonnerie à Saint-Boniface. Construction Steco lui doit 40 000 $, mais il sait bien que l'entrepreneur ne peut le payer tant qu'il ne reçoit pas d'argent de la part des Sources Saint-Élie.
«Quand j'ai vu ça (la nouvelle concernant les investissements étrangers), c'est frustrant. Ça fait six mois qu'on attend d'être payé», raconte M. Ayotte, en mentionnant que cette situation complique sérieusement la gestion de son entreprise.
«On ne demande pas la charité. On demande notre dû. On a tous travaillé sur le chantier. Qu'elle fasse des investissements, je n'ai rien contre ça. Mais pas sur notre bras», ajoute Gilles Bellerive, de l'entreprise d'excavation J. Bellerive de Saint-Élie-de-Caxton, qui attend lui aussi environ 40 000 $.
Denis Bourassa, de fondation DB de Saint-Barnabé, attend 60 000 $ de la part de Steco. Du côté de Toiture St-Bo, la facture est de 19 000 $.
L'hypothèque légale est le premier moyen pris par Steco pour avoir son argent. Si rien ne bouge d'ici quelques jours, Christian Lamoureux promet d'entreprendre d'autres procédures.
«Les banques tuent notre croissance»
C'est du moins l'avis de Francine Lavoie, la présidente de la compagnie. Mme Lavoie sait que son entrepreneur en construction a pris une hypothèque légale à l'endroit de son entreprise. Mais selon elle, tout cela ne se serait pas produit si les banques et les organismes publics de développement économique faisaient vraiment leur travail.
«Le projet a été approuvé en 2008 pour le financement. Mais avec la crise économique, les banques ont reculé et ont changé des conditions. Elles exigent plus de mise de fonds. Je suis allée voir Investissement-Québec. Il y a de l'argent réservé pour nous, 600 000 $, mais ça ne débloque pas. C'est en fidéicommis depuis février et ça ne débloque pas.»
Claude Lamarche, gestionnaire du Fonds d'intervention économique régional (FIER) pour la Mauricie, confirme qu'une somme d'argent est en fidéicommis pour les Sources Saint-Élie. Cependant, cette somme ne sera pas débloquée avant que les conditions imposées par tous les partenaires financiers soient respectées.
«C'est un montage financier et nous sommes sept ou huit partenaires. Il faut que tout le monde débourse. L'argent est chez un avocat et il attend que toutes les conditions soient respectées avant de débourser», précise M. Lamarche, en disant que la somme provenant du Fier-Mauricie est nettement inférieur à 600 000 $.
Mme Lavoie avance qu'il est maintenant plus facile de faire des affaires aux États-Unis qu'au Québec, même si elle y est une étrangère.
«Les banques sont en train de tuer notre croissance. J'achète une usine aux États-Unis, car je ne suis pas capable de répondre à la croissance ici. J'ai été financée aux États-Unis et ça s'est réglé en trois secondes. J'ai des contrats de plusieurs millions de dollars, mais je ne suis pas capable de produire ici, car je n'ai pas le financement et les équipements.»
La présidente des Sources Saint-Élie assure que la compagnie respecte ses engagements financiers. Mais le retard dans la mise en marche de l'agrandissement fait en sorte que la compagnie doit supporter un équipement incomplet qui gruge de l'argent sans en produire.
«La compagnie va très bien. On paie nos factures. Mais le projet d'agrandissement est de trois millions de dollars. J'ai deux millions d'investis. Et ça ne rapporte rien!»