Deux cas suspects au Québec dont un en Mauricie

La grippe porcine est à nos portes. Six Canadiens ont contracté le virus qui a tué 20 personnes au Mexique, et les autorités craignent que deux Québécois aient fait de même. Le gouvernement a d'ailleurs indiqué hier que ce n'est qu'une question de temps avant que d'autres cas soient confirmés dans la province.


Il n'y a encore aucun cas avéré de grippe porcine au Québec. Mais deux patients sont actuellement l'objet d'une investigation, a indiqué le directeur national de la santé publique, le Dr Alain Poirier. L'un d'entre eux a été traité dans un établissement de Montréal. Ses symptômes n'inquiètent guère les médecins, si bien qu'il a été autorisé à rentrer chez lui. L'autre cas suspect est en Mauricie. Cas isolé? Non, affirme le Dr Poirier. Six cas de grippe porcine ont été confirmés au Canada, hier. Et rien ne permet de croire que le Québec sera épargné.

 



«Ce serait très étonnant qu'il n'y ait pas de cas au Québec, a-til convenu. Avec la grandeur de la population et toute la circulation qu'il y a, c'est un virus qui circule très facilement.»

La Nouvelle-Écosse a confirmé hier que quatre étudiants de Windsor ont contracté la maladie. Ils font partie d'un groupe de 21 adolescents qui ont été mis en quarantaine au terme d'un voyage organisé au Mexique. Un seul des quatre patients avait participé au voyage, un indicateur que la maladie peut être transmise d'une personne à une autre.

En Colombie-Britannique, deux autres personnes ont été infectées par le virus, a confirmé le gouvernement provincial, hier.

Dans un cas comme dans l'autre, les symptômes n'inspirent aucune crainte. Ils étaient si doux qu'aucun des patients n'a dû être hospitalisé. La maladie qui a frappé ces Canadiens semble donc moins virulente que celle qui a fait entre 20 et 80 morts au Mexique, et a infecté plus de 1300 personnes.



N'empêche, Ottawa ne veut prendre aucun risque. Les autorités demandent aux Canadiens de redoubler de vigilance pour éviter la propagation de la maladie.

«Même si les symptômes que nous avons observés au Canada sont relativement doux, il est important que les gens continuent de se protéger», a averti le Dr David Butler Jones, administrateur en chef de la santé publique au Canada.

En conférence de presse hier, le médecin a affirmé que le Canada possède une réserve de 55 millions de doses d'antirétroviraux, assez pour traiter chaque Canadien en cas de pandémie. Il ajoute que des experts canadiens ont commencé à élaborer un vaccin pour cette souche de grippe porcine.

De son côté, Québec a ouvert un centre d'urgence destiné à coordonner les mesures en cas d'épidémie. Les responsables de la santé publique ont tenu une série de rencontres et de conférences téléphoniques avec les dirigeants d'hôpitaux et de cliniques afin d'échanger des données sur le virus et de préparer le personnel à réagir en cas de pandémie.

«Pour l'instant, il n'y a pas d'ajout extraordinaire par rapport à ce que l'on fait habituellement, sinon d'être tous en alerte et de bien surveiller», explique le Dr Poirier.

Pas de contrôle aux douanes



Les autorités n'ont émis aucun avertissement pour ceux qui comptent visiter le Mexique. Et elles n'ont pas resserré les contrôles aux frontières pour empêcher des habitants de ce pays d'entrer au Canada.

Voilà pourquoi personne n'a questionné Alexandra Madera sur son état de santé, lorsqu'elle a traversé la douane de l'aéroport Trudeau, hier après-midi. Elle arrivait pourtant de Mexico, considéré comme le foyer de la maladie.

Quelques heures plus tôt, à l'aéroport de Mexico, des agents lui avaient fait remplir un formulaire pour vérifier si elle présentait des symptômes de la grippe, comme la toux, la fièvre ou des douleurs musculaires. «Si on avait les symptômes, on ne pouvait pas embarquer dans l'avion», a-t-elle expliqué.

Une fois dans l'avion, des employés de la ligne aérienne lui ont donné un numéro de téléphone qu'elle pourrait appeler si elle développe la maladie dans les prochains jours. Mais aucun agent canadien n'a voulu vérifier son état de santé.

La situation étonne le Dr Karl Weiss, infectiologue à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Ce spécialiste souligne que plusieurs pays, notamment en Asie, ont commencé à resserrer les contrôles aux frontières.

L'aéroport Narita de Tokyo a installé un appareil qui permet aux passagers en provenance du Mexique de mesurer leur température. «Il y a des gens qui devraient poser des questions, au moins avoir un questionnaire, a-t-il indiqué. Surtout qu'il y a beaucoup de Québécois qui devraient revenir du Mexique.»

La situation aux douanes n'inquiète pas les autorités québécoises. Le Dr Alain Poirier souligne qu'il y a tellement de voyageurs qui transitent par les aéroports chaque jour qu'il serait impossible de contrôler leur état de santé systématiquement. D'ailleurs, une personne peut porter le virus de la grippe sans développer des symptômes.

 



Le groupe de sixième année de l'École Vision de Trois-Rivières a été accueilli par une dizaine de journalistes à son retour à l'aéroport de Québec, samedi. Les jeunes sont ici accompagnés de la directrice de l'école, Caroline Melançon.

«On n'en entendait pas parler»

Le hic, c'est que personne n'avait même informé le groupe ni la directrice de l'école, Caroline Melançon, de l'existence d'une possible épidémie au Mexique. «Nous l'avons appris dans l'avion au retour vers le Québec. Là-bas, personne ne nous a jamais parlé de rien», évoque  Mme Melançon, jointe hier soir.

Le groupe, qui se trouvait à faire un échange avec des jeunes étudiants d'une école située à Playa del Carmen, ne s'est toutefois pas inquiété outre mesure lors de son retour, puisque les cas observés se concentraient surtout dans la région de Mexico City, à douze heures de route de l'endroit où les jeunes se trouvaient.

«Au Mexique, on n'en entendait pas parler. J'ai lu quelques journaux quotidiens là-bas et ils n'en faisaient mention nulle part. Même que nous étions avec une école internationale, accompagnés par des parents originaires d'un peu partout et vraiment personne n'en a parlé. C'est comme si ça n'existait pas au Mexique», constate Caroline Melançon.

C'est donc à son retour au Québec qu'elle a constaté l'ampleur de l'inquiétude qui a gagné la communauté internationale au sujet de cette maladie. En charge d'un groupe de 15 jeunes âgés de 12 ans, Mme Melançon admet qu'elle aurait aimé que l'hôtel au Mexique ou encore le grossiste du voyage la tienne au courant, d'autant plus que les jeunes allaient être en contact avec des élèves mexicains.

Toutefois, Caroline Melançon n'a observé personne, durant le voyage, qui portait un masque pour se protéger le visage, comme on le voit sur les images qui circulent dans les médias depuis quelques jours. «Ce n'est qu'une fois à l'aéroport où les douaniers nous ont demandé si on faisait de la fièvre. Après, les journalistes nous posaient des questions à savoir si les gens toussaient dans l'avion. C'était un peu surréaliste. Les enfants ont été plutôt surpris de ça», évoque la directrice de l'École Vision.

Cependant, une maman d'élève travaillant pour la Santé publique s'est montrée rassurante envers le groupe et les parents d'élèves. «Elle nous a bien renseignés sur les cas qui étaient sous observation. Ça a rassuré beaucoup de monde et ça a dédramatisé la chose. Elle nous a donné les consignes d'usage, de bien surveiller les symptômes de la grippe au cours des jours suivant le retour. Mais à date, tout le monde va bien», se réjouit-elle.

Échange compromis?

La question qui demeure, pour le moment, c'est de savoir si la venue des élèves mexicains au Québec sera compromise. En effet, le groupe de sixième année devait recevoir la visite des élèves de l'école de Playa del Carmen le 15 mai prochain. La directrice devra maintenant surveiller les nouveaux développements concernant la propagation de la maladie et les consignes qui seront données au niveau des aéroports.

«Le groupe du Mexique devait partir de Mexico City pour s'en venir ici. Ça se pourrait que ça cause problème. Peut-être qu'on pourra les faire partir de l'aéroport de Cancun. On verra», affirme Caroline Melançon.