La Régie et Savoura: rien ne va plus

Selon le président de la Règle, Pierre Bouchard, les équipements des Serres du Saint-Laurent qui produisent les tomates Savoura à Saint-Étienne-des-Grès ne seraient pas adéquats pour l'utilisation du biogaz.

L'entente qui devait permettre à la Régie de gestion des matières résiduelles de la Mauricie de livrer du biogaz à Savoura pour chauffer ses serres devrait se retrouver sous peu devant la Cour supérieure.


Le président de la Régie, Pierre Bouchard.

Selon le président de la Régie, Pierre Bouchard, les équipements des Serres du Saint-Laurent qui produisent les tomates Savoura à Saint-Étienne-des-Grès ne seraient pas adéquats pour l'utilisation du biogaz.

 



«Nos experts disent que le biogaz qu'on livre est conforme aux spécifications du contrat, mais on se rend compte que leur équipement ne peut le recevoir», dit-il.

Les deux entités ont tenté de venir à bout de cette nouvelle difficulté au cours d'une longue période d'arbitrage qui s'est déroulée d'octobre 2008 jusqu'à la fin de janvier dernier.

«Là, on est dans une impasse», raconte le président de la Régie dans une entrevue exclusive accordée au Nouvelliste.

La Régie a récemment demandé à son procureur de trouver une solution temporaire, en attendant que le fond du litige soit entendu par la Cour supérieure. C'est que le gaz est prêt à être livré, mais Savoura refuse de l'utiliser et s'attend à ce que la Régie continue à lui payer la différence qu'elle doit débourser pour se procurer le gaz naturel de Gaz Metro.



La médiation ayant été un échec, ce sera donc à la Cour supérieure de se pencher sur cette affaire assez unique en son genre qui lie un lieu d'enfouissement technique à un producteur de tomates. Du jamais vu dans les annales judiciaires, sans doute, puisque ce genre d'association est unique au Canada.

C'est que les Serres du Saint-Laurent (Savoura) voulaient non seulement utiliser les biogaz qui émanent du LET de Saint-Étienne-des-Grès pour chauffer les serres de tomates, mais aussi pour envoyer du CO2 dans l'atmosphère des serres afin de nourrir les plants. Une autre partie devait aussi servir à produire de l'électricité, raconte Pierre Bouchard.

Le 1er octobre 2008, raconte-t-il, après avoir consulté de nombreux experts au Québec, la Régie était arrivée à traiter le méthane qui se dégage des cellules d'enfouissement pour en faire un gaz suffisamment pur pour répondre à ces exigences. «Nos experts nous ont dit que ça répondait enfin aux spécifications du contrat», raconte le président. Un des appareils employés pour vérifier la qualité du gaz a pu évaluer pas moins de 27 000 fois la teneur en méthane du biogaz, signale Pierre Bouchard pour montrer le sérieux des démarches.

La Régie fut alors soulagée d'un poids très lourd. N'ayant pas été en mesure de livrer le biogaz purifié dans les délais fixés au contrat, elle avait été contrainte, en effet, de payer à Savoura la différence entre le prix de son biogaz et le prix du gaz naturel de Gaz Metro qui alimente depuis les serres.

Total de la facture: 1,3 million $.

Mais la période de rodage ne s'est pas passée aussi bien que prévu, raconte Pierre Bouchard. «On pense que leurs équipements ne sont pas capables de recevoir notre biogaz», dit-il. «Il y a même eu une explosion.»



Toutefois, Pierre Bouchard avoue que ces informations sont difficiles à vérifier. Les experts de la Régie, dit-il, n'ont pas été autorisés à visiter les installations de Savoura.

C'est que le biogaz, explique-t-il, ne peut pas arriver dans le système de Savoura avec la même régularité de pression qu'on peut obtenir avec le gaz naturel de Gaz Metro. Selon lui, il existe des équipements de sécurité qui permettent de régulariser un tel système en cas de surpression. Mais il n'est pas possible non plus de vérifier comment est configuré le système de la serre. «Chaque fois qu'on voulait des renseignements, ils ne disaient rien. On n'est pas capable de parler aux experts de Savoura non plus», déplore Pierre Bouchard.

Devant l'impasse de l'arbitrage, la Régie a demandé de cesser de payer la différence qu'elle verse mensuellement à Savoura, ce que l'entreprise a refusé, raconte M. Bouchard.

La Régie, qui détient un contrat de 40 ans avec les Serres du Saint-Laurent, a aussi proposé à l'entreprise de se servir des biogaz uniquement pour chauffer les serres, ce qu'a refusé aussi l'entreprise, raconte M. Bouchard.

«Ils ne prendront pas la Régie pour une vache à lait», prévient-il.

Pour l'instant, les deux parties se sont livré une bataille d'experts infructueuse afin de déterminer laquelle des deux doit assumer l'échec de ce projet ou laquelle des deux doit faire de nouveaux investissements pour régler la situation.

Chose certaine, le contrat qui lie les deux parties stipule que la Régie a seulement une obligation de moyens. Si jamais la Cour démontre que le projet est un échec à cause des équipements inadéquats de Savoura, signale le président Bouchard, il se peut que le producteur de tomates soit non seulement obligé de rembourser la facture de 1,3 million $ à la Régie, mais aussi les 7 millions $ qui furent investis dans la construction du système de traitement des biogaz. Pierre Bouchard propose qu'il serait plus sage pour les deux parties de s'entendre que de dépenser des fortunes en batailles juridiques.