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Le 29 mars dernier, sans tambour ni trompette, Jocelyn Carignan a tourné la page sur le Café Foin-Fou. Un petit courriel envoyé à certains collaborateurs pour les remercier, un petit mot sur Internet, et voilà! «Je n'ai plus la force, plus l'énergie de continuer. Ma santé ne me le permet plus, tant sur le plan physique que psychologique», confie-t-il, en regardant sa main gauche, toujours affaiblie même après trois ans.
Le soir du 31 août 2006, Jocelyn Carignan s'apprêtait à fermer le café, quand il a surpris deux voleurs cagoulés qui tentaient de s'introduire à l'intérieur. L'homme a voulu s'interposer, et l'un des deux voleurs lui a tiré une balle dans le bras gauche. Les deux malfaiteurs ont par la suite ligoté le propriétaire du café avant de quitter les lieux.
L'homme a passé un long moment à l'hôpital, et a dû subir quelques opérations pour tenter de réparer les dégâts causés par le coup de feu. Aujourd'hui encore, il fait de la physiothérapie et de l'ergothérapie trois fois par semaine au centre de réadaptation Interval. Sa main gauche est un peu repliée sur elle-même, les muscles sont atrophiés, mais il y a eu un sacré progrès depuis trois ans. Les spécialistes poursuivent le travail pour tenter de lui redonner le maximum de capacités avec son bras et sa main.
Ses deux agresseurs, pour leur part, sont derrière les barreaux. Marc Hamel, 52 ans, et Mario Levasseur, 30 ans, ont en effet été trouvés coupables de cette sauvage agression, en plus de nombreux autres vols dans d'autres commerces.
Quand leur sentence avait été prononcée, plus d'un an après l'agression, Marc Hamel s'était tourné vers Jocelyn Carignan dans la salle d'audience. «Il m'avait dit que ce n'était pas contre moi. Il a aussi dit que s'il pouvait recommencer, il ne serait pas venu au café ce soir là, sachant comment les choses allaient tourner», lance M. Carignan. Rassuré par ces propos, l'homme continue pourtant de vivre avec des séquelles physiques et psychologiques de l'attaque.
«Avant, je pouvais transporter six ou sept caisses de bières. Aujourd'hui, si je transporte deux caisses, je dois me reposer une demi-heure. Ça m'a pris un an avant d'être capable de tenir un oignon pour le couper. Ce n'est pas évident quand on travaille en restauration. Puis, quand c'est arrivé, on a vécu sur l'adrénaline pendant un an, le temps des procédures judiciaires et pour continuer à faire vivre le café. Depuis un an et demi, la poussière est retombée et je vis un syndrome post-traumatique. Je vis plus d'anxiété qu'avant», confie l'homme.
Fier de son accomplissement
Jocelyn Carignan ne cache pas qu'il ferme le café avec quelques regrets, mais se dit fier de ce qui a été accompli, soulignant toute l'aide que sa conjointe et son fils lui ont apporté depuis les événements de 2006.
«C'est quand même très bien, ce qu'on a pu faire. D'avoir un café et une salle de spectacle à Champlain pendant huit ans, c'était tout un défi et on l'a relevé. On a réussi à faire vivre la diffusion culturelle en région, et même en campagne. Mais je ne peux m'empêcher de me dire que je n'en serais pas là s'il n'y avait pas eu d'agression», ajoute le résident de Champlain.
Au fil des années, de nombreux artistes se sont produits entre ces murs, et Jocelyn Carignan conserve le souvenirs d'amis plutôt que de simples collaborateurs. Il nomme au passage Fabiola Toupin et Manu Trudel, qui se sont produits à maintes reprises au café, tout comme Jean-Paul Daoust, Yves Boisvert, Jamil, Marco Calliari, Guy Marchamps, le chanteur Pierrot Fournier ainsi que Trop Loin d'Irlande et Sylvie Tremblay.
Pour le moment, M. Carignan dit ne pas avoir de projets précis. Il espère prendre un temps de repos, ce qu'il n'a pas fait depuis plusieurs années.
«On va faire quelques travaux dans le café et ça va devenir un chalet que nous allons louer à des visiteurs», explique-t-il.