L'usine s'envole en fumée

Les flammes ont tout détruit sur leur passage, causant des dommages de plusieurs millions $.

L'un des fleurons de l'industrie de la construction au Québec, Toiture mauricienne, a vu son centre névralgique du secteur Sainte-Marthe-du-Cap lourdement endommagé par les flammes en fin de semaine. Les pertes s'élèvent à plusieurs millions de dollars pour l'entreprise trifluvienne de fabrication de solives et de fermes de toit de la rue des Toitures.


Deux employés de Toiture mauricienne, Yanicq Paquin et Dave Duval, sont venus constater le sinistre samedi soir.

Les pompiers ignorent pour l'instant ce qui a pu causer le feu. À leur arrivée, l'embrasement était déjà général. «C'était pris à l'intérieur sur une bonne superficie. Il n'y avait aucune tentative à faire en-dedans», explique le chef de division des opérations incendies à la Sécurité publique de Trois-Rivières, Dany Cloutier.

 



Une soixantaine de pompiers ont été appelés à combattre les flammes, qui les ont tenus occupés durant plusieurs heures. Une dizaine de véhicules d'urgence ont été nécessaires pour mener l'opération. Personne n'a été blessé.

C'est un gardien de sécurité qui aurait remarqué le premier que quelque chose ne tournait pas rond, vers 19 h. «Il a entendu l'alarme et a appelé le service des incendies. Rapidement, il a vu de la fumée. Quinze minutes plus tard, le feu s'était propagé», raconte le président-directeur général de l'entreprise, André Lemyre.

Avec des collègues et des pompiers, M. Lemyre a pu entrer à l'intérieur des bureaux administratifs, qui ont été épargnés par le feu, afin de récupérer des ordinateurs et les précieuses données qu'ils contenaient. «La vraie salle de serveurs a brûlé, mais nous avions des copies de sécurité. Je crois que nous avons sauvé notre base de données de clients et une bonne partie des commandes, mais nous allons devoir regarder de plus près si c'est vraiment le cas», mentionne-t-il.

Fondée il y a plus de 40 ans, l'entreprise a pratiquement toujours fait partie du quotidien de M. Lemyre. Il voyait donc des années de labeur s'envoler en fumée samedi soir. «Je vois une vie brûler. Quand j'avais six ans, en 1964, mon père m'a dit: «aujourd'hui, tu ne vas pas à l'école, on va acheter l'usine!». Toute ma vie, ça a été ma salle de jeu.»



À l'époque, rappelle-t-il, les normes au niveau de la prévention des incendies n'étaient pas les mêmes. «Lorsque nous avons fait des agrandissements, ça aurait coûté une fortune de mettre des gicleurs, donc nous avons pris la chance de nous dire qu'il y avait des bornes-fontaines, un gardien sur place et un système d'alarme. Nous ne pensions pas nous faire jouer un tour comme ça, car nous avions pris toutes les précautions», affirme-t-il.

Comme s'il avait eu un mauvais pressentiment, son père lui avait souvent répété qu'il vivrait un incendie un jour. Ce jour est finalement arrivé samedi.

En milieu de soirée, la scène était plutôt impressionnante du côté de la rue Jérôme-Hamel. Le feu avait atteint les inventaires de bois, l'entrepôt, l'usine de solives, le bureau des ventes et le centre de mécanique. Il s'étendait sur plus de 8360 mètres carrés, soit l'équivalent d'un terrain et demi de football. Tout a été détruit. «C'est la plus belle partie de l'usine qui a brûlé, déplore M. Lemyre. Si j'avais eu le choix, ce n'est pas celle que j'aurais choisie.»

L'entreprise a pu sauver une partie de ses installations situées de l'autre côté, soit l'usine de fermes de toit et le bureau technique.

Ancien employé de l'endroit, Jean-Guy Abel, qui réside tout près, a eu un pincement au coeur en réalisant ce qui se passait sous ses yeux. Il a également eu une petite pensée pour son fils, qui y travaille comme assembleur, de même que pour ses anciens collègues. «J'ai travaillé là pendant 20 ans, et j'ai des amis qui sont là depuis 20-25 ans. J'ai vu dans la cour un gars de 62 ans. Qui va le réengager?», se demande-t-il.

Selon lui, il ne fait aucun doute que les activités touchées repartiront très rapidement. «Si André retient de son père, je ne suis vraiment pas inquiet du tout. Ils vont se retrousser les manches et ça ne sera pas long», assure-t-il.



Les pompiers n'avaient aucune piste samedi soir pour expliquer ce qui a pu causer l'incendie. Une équipe d'enquête était attendue sur place.

Une entreprise touchée en son coeur

Les activités de Toiture mauricienne risquent d'être paralysées un peu partout au Québec aujourd'hui, alors que le centre névralgique de l'entreprise, situé dans le secteur Sainte-Marthe-du-Cap, a été ravagé par un incendie samedi.

Même si les installations trifluviennes opéraient à effectifs réduits en cette période hivernale, ce sont tout de même quelque 200 personnes qui se retrouveront temporairement sans emploi, en plus de celles qui ne seront pas rappelées.

Des conséquences se feront également sentir dans les cinq autres usines de l'entreprise, prévoit le président-directeur général, André Lemyre.

«L'impact est total à la grandeur du Québec. Toutes les usines que j'ai sont reliées au serveur central qui se trouve ici», explique-t-il.

M. Lemyre n'était pas en mesure, samedi, de déterminer ce qui se passera avec ses salariés maintenant sans travail. «Il faut calculer les dommages et voir où on s'en va. Les employés pourront peut-être rentrer travailler du côté des fermes de toit, mais même si j'ai les machines, si je n'ai pas les ordinateurs, je ne pourrai peut-être pas partir lundi matin», analyse-t-il.

Inquiets, plusieurs étaient venus constater de leurs propres yeux samedi soir ce qu'ils avaient entendu. Effectivement, leur lieu de travail était en train de se consumer. «Nous allons tomber sur le chômage du jour au lendemain, ce qui est difficile, surtout avec la récession. J'espère qu'ils vont me relocaliser à l'autre usine», lance Gaétan Desrosiers, qui y oeuvre depuis 12 ans.



Au service de Toiture mauricienne depuis 20 ans, Danielle Lyonnais avait de son côté de la difficulté à croire ce qui se passait. «C'est dur à prendre quand ça fait autant d'années qu'on travaille ici. Mais quand on m'a dit qu'il y avait le feu, je savais que ça se propagerait vite, parce qu'il y avait beaucoup de bois ici», mentionne celle qui s'occupe de facturation et d'administration des transports.

Pour ce qui est des commandes, aucune livraison ne devrait être retardée en raison de l'incendie, croit M. Lemyre.