Déficit budgétaire en vue pour le CHRTR

Lucie Letendre, directrice générale du CHRTR.

La pression accrue sur l'urgence, le nombre important de patients en attente de ressources d'hébergement ou de réadaptation et l'enseignement médical auront finalement eu raison de l'équilibre budgétaire du Centre hospitalier régional de Trois-Rivières.


La directrice générale Lucie Letendre a confirmé, hier soir, au conseil d'administration du CHRTR, que le déficit réel en date du 6 décembre dernier était rendu à 1,1 million $ et ce, sur un budget total de 180 millions $. Les quelques mois qui restent à l'année financière (elle se termine le 31 mars 2009) et la réserve d'un million de dollars (bien utile ces deux dernières années dans l'atteinte de l'équilibre budgétaire) ne suffiront pas à renflouer les coffres: cette année, l'établissement fonce droit vers un déficit budgétaire.

 



Le dernier déficit remonte à 2005-2006. Le CHRTR avait enregistré un manque de 5,1 millions $ dont la moitié résultait de l'intégration des services au site Sainte-Marie.

Les problèmes se sont aggravés cet été avec la forte pression sur l'urgence. Le CHRTR avait notamment prévu fermer 80 lits sur les étages pour donner une chance au personnel mais il a réussi à en fermer 50 tout au plus. En contre-partie, plusieurs employés ont non seulement été privés de vacances mais le temps supplémentaire obligatoire a grimpé en flèche.

À cela, il faut ajouter un nombre accru d'ambulances qui se présentent à l'urgence. À ce jour, le CHRTR a accueilli 800 ambulances de plus que l'an passé. Dans la plupart des cas, les patients qui s'y trouvent sont âgés de 75 ans et plus.

Ces mêmes patients, une fois leur épisode de soins terminé, ne réussissent pas à quitter le CHRTR et à libérer des lits car ils attendent des ressources en hébergement ou en réadaptation.



Mme Letendre note aussi que les séjours de plus de 48 heures ont augmenté de 43%, «ce qui prouve à quel point la situation s'est détériorée», a-t-elle mentionné.

Elle précise que l'urgence enregistre à elle seule un déficit de 817­000­$, malgré une consolidation au budget qui a été faite ces deux dernières années. «Nous avons une capacité de 45 patients sur civière mais nous en avons généralement 70 à 80. Il n'est pas rare non plus qu'en une seule journée, on passe de 45 à 80 patients. Cela signifie que les employés qui ont été libérés sont rappelés au travail en temps supplémentaire», a-t-elle indiqué.

On enregistre d'ailleurs des déficits de 525­000­$ en temps supplémentaire à l'urgence et sur les unités de soins, de 267­000­$ en assurance-salaire, de 120­000­$ dans le transport ambulancier, et même un déficit de 307­000­$ en main-d'oeuvre indépendante. On a en effet de plus en plus recours à des agents de sécurité pour surveiller des patients sur des unités de soins.

Enfin, l'enseignement médical a aussi un impact majeur sur la situation financière de l'établissement. Même si on sait que cette mission favorisera la rétention et l'attraction de médecins dans la région, elle entraîne des coûts supplémentaires et peut diminuer la productivité dans certains secteurs comme le bloc opératoire.

Qui plus est, le CHRTR n'a toujours pas reçu la désignation universitaire et l'enveloppe budgétaire qui l'accompagne. «L'Agence de santé nous a avancé 800­000­$ au printemps, ce qui nous a beaucoup aidé mais c'était pour la première phase des coûts. L'impact de l'enseignement est progressif. Nous sommes justement en train d'évaluer tous les coûts reliés à l'enseignement», a ajouté Mme Letendre.

Maintenir les services aux usagers



En dépit du déficit envisagé, la direction du CHRTR promet de ne pas couper dans les services aux usagers.

«Nous allons poser des gestes pour limiter les dépenses mais ils vont davantage se faire sentir sur un plan administratif. Il est primordial pour nous de maintenir les services à la population. La situation est préoccupante mais nous ne perdons pas espoir», a assuré Lucie Letendre, directrice générale du CHRTR.

Les gestionnaires ont déjà été rencontrés et des mesures administratives sont en train d'être appliquées pour resserrer les dépenses.

Une analyse des processus internes, en particulier du fonctionnement de l'urgence, est également en cours.

Enfin, des discussions sont faites avec l'Agence pour mettre en place des mesures visant à désengorger l'urgence et améliorer l'efficience du réseau.

«Il y a bien quelques solutions mais elles ne sont pas simples à réaliser à court terme car nous sommes limités par la pénurie de médecins et d'infirmières et le manque de lits chronique», a-t-elle ajouté.

Parmi les solutions envisagées pour réduire les coûts, on peut penser entre autres à la prise en charge des patients de longue durée par les résidents de l'UMF. Une annonce pourrait être faite ce matin à ce sujet.

Un autre projet consiste à mettre en place une unité de court séjour aussi appelée unité de décision clinique. Celle-ci accueillerait une clientèle ayant un profil particulier pour des séjours de 24 à 72 heures maximum.



«Elle nous permettrait d'organiser des soins de façon plus convenable et de dégager les personnes affectées à l'urgence. Une telle unité a été mise en place en psychiatrie et elle a contribué à diminuer la durée des séjours», a expliqué Mme Letendre. 

En vertu de la loi sur l'équilibre budgétaire, les établissements de santé publics ne peuvent pas faire des déficits. Mme Letendre en est bien consciente.

«L'Agence et le ministère de la Santé et des Services sociaux sont bien au fait de notre situation. Ils ne nous ont pas demandé un plan d'équilibre budgétaire; ils sont plutôt en train de regarder avec nous des moyens qui nous permettraient d'améliorer la situation. En fait, nous sommes en mode recherche et analyse de situation», a précisé Mme Letendre.

Elle soutient également que la situation financière n'aura pas d'impact sur la phase II. «Le manque de lits est un problème flagrant chez nous et l'Agence le sait. Elle n'est pas en mode critique. Elle connaît les problèmes de la région», a-t-elle ajouté.

En conclusion, la DG a par ailleurs tenu à souligner le travail effectué par les équipes internes et a réaffirmé sa confiance dans les gestionnaires de l'établissement.